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« Les RH doivent sécuriser, dans l’opérationnel, les profils à retenir »

À retenir | publié le : 29.05.2023 | Lys Zohin

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« Les RH doivent sécuriser, dans l’opérationnel, les profils à retenir »

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Associé au cabinet Moncey Avocats, ce spécialiste de la fiscalité d’entreprise revient sur les enjeux en matière de transmission d’entreprise, qui vont bien au-delà de la fiscalité. Ils portent d’abord sur le capital humain et le rôle des ressources humaines.

On évoque souvent, dans les transmissions d’entreprises, les aspects financiers, fiscaux et d’accompagnement du chef d’entreprise, mais qu’en est-il des salariés ?

En effet, l’une des premières préoccupations, de la part d’un acquéreur – entrepreneur ou fonds d’investissement –, c’est la rétention des talents. Si une proportion significative des effectifs quitte l’entreprise, c’est la survie de l’organisation rachetée qui est en danger. Il existe ainsi des outils pour s’assurer que, de la direction aux cadres dirigeants jusqu’aux collaborateurs qui sont la force vive de l’entreprise, les bons profils restent à bord. Cela peut être, en particulier pour les dirigeants et les top managers que l’on nomme souvent « le premier cercle », réalisé sous forme d’actionnariat ou de récompense des performances corrélées à celle du groupe, pour un alignement des intérêts. Attention, cependant, à quelques difficultés fiscales inhérentes : si les plus­values sont un jour qualifiées en salaire, comme cela a été le cas dans la trilogie d’arrêts rendus le 13 juillet 2021 par le Conseil d’État et même avant ces décisions, notamment dès 2014, le coût latent sur la fiscalité personnelle des bénéficiaires est autrement plus élevé que le prélèvement forfaitaire unique, qui est de 30 % à 34 % sur les plus-values (contre 45 % à 49 % en cas de requalification en salaire) ! En outre, les montants requalifiés en salaires sont susceptibles d’être assortis de charges sociales à payer. Il faut donc s’assurer de mettre en place des garde-fous, au regard, notamment, des fonctions exercées. Quant aux autres salariés, mieux vaut réfléchir à la solution la plus adaptée. Rendre tous les salariés actionnaires n’est pas forcément une solution, certains ne valorisant pas la logique actionnariale, d’autres étant simplement nerveux à l’idée d’être convoqués à une assemblée générale. L’intéressement, par l’intermédiaire d’un fonds commun de placement d’entreprise, peut être une option. Elle reste assez lourde et coûteuse, et est essentiellement utilisée par les grandes entreprises. D’autres outils, tels que le contrat de partage de plus-value, instauré en 2019 par la loi Pacte, au terme duquel l’acquéreur s’engage à rétrocéder une partie de la plus-value qui sera dégagée, en partie exonérée de charges fiscales, peuvent constituer une belle marque de bien-veillance envers les équipes, de nature à les rassurer face à la transmission. Je constate que les fonds d’investissement français qui reprennent des entreprises, et plus particulièrement des ETI, sont désormais nombreux, environ un sur deux, à proposer cette dernière solution.

Est-ce que cela suffit pour garantir que les bons profils resteront ?

En fait, les spécialistes des ressources humaines ont un rôle essentiel à jouer, principalement en matière de transparence et de dialogue social. Un dossier de reprise peut être confidentiel du fait de la concurrence, et les RH doivent donc faire preuve de retenue en ce qui concerne l’information partagée aux représentants des salariés trop en amont d’une opération. Mais c’est en concertation avec les RH que le repreneur et le « premier cercle » doivent s’assurer que les bons profils restent à bord. Les RH ont ainsi un rôle d’assistance, entre le vendeur et le repreneur, et doivent veiller à sécuriser, dans l’opérationnel, les profils à retenir.

Et si les salariés veulent racheter l’entreprise ?

Il existe des cas de succès, en particulier en ce qui concerne les opérations de Management Buy Out, mais le cadre légal n’est pas forcément adapté à toutes les opérations, particulièrement si elles impliquent l’intégralité des salariés. Par ailleurs, il y a un autre écueil courant, dans le cas où un patron de PME cède son affaire à son bras droit. Les aspects psychologiques prennent souvent le dessus. Le repreneur désigné aura-t-il réellement les épaules assez solides pour prendre la suite ? Et surtout, les deux parties sauront-elles valoriser correctement la société ? On voit trop souvent des cas où le bras droit du patron s’endette pour acheter, sans processus de valorisation concurrentiel, une entreprise bien au-dessus de sa valeur…

Auteur

  • Lys Zohin