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À retenir

Trois questions à : « La responsabilité de l’employabilité est de plus en plus partagée »

À retenir | publié le : 24.04.2023 | Lys Zohin

Aurélie Feld, présidente de LHH France, et Sophie Piot, directrice des programmes de transformation RH et de l’innovation pour le même cabinet de conseil en ressources humaines et en transition de carrière, s’expriment sur la nécessité de plus en plus grande pour les entreprises de trouver en interne les compétences indispensables à leur évolution. Les réponses passent souvent par une stratégie claire et des outils adéquats.

La situation actuelle des entreprises impose-t-elle davantage de réflexion sur l’évolution des compétences ?

Aurélie Feld : Absolument ! Nombre d’organisations sont actuellement aux prises avec plusieurs transformations : numérique, environnementale et énergétique et démographique, notamment. Et si, dans le passé, les transitions avaient lieu une à une, aujourd’hui, elles ont lieu en même temps, de façon accélérée et, de surcroît, elles s’opèrent sur fond de tensions sur le marché de l’emploi et d’obsolescence plus rapide des compétences. Tout cela veut dire que les employeurs ont souvent intérêt à trouver en interne les nouvelles compétences dont ils ont besoin, et pour cela, il leur faut former les collaborateurs et les faire évoluer.

Sophie Piot : Il faut également rajouter un autre élément que sont les aspirations des salariés. Les jeunes exigent un renouvellement très rapide de leurs activités professionnelles, tandis que les moins jeunes s’inquiètent de leur évolution professionnelle mais aussi de leur employabilité. Enfin, dernier élément qui se conjugue avec les précédents, la difficulté actuelle à fidéliser les salariés…

Face à tous ces phénomènes, sentez-vous une prise de conscience accrue de la part des entreprises ?

A. F. : Oui, et les employeurs veulent – et doivent, d’ailleurs – agir dans diverses directions. Direction et RH tendent à adopter plusieurs leviers de transformation. Il ne s’agit plus, par exemple, de penser simplement à se séparer de certains collaborateurs dont les compétences ne seraient plus requises. Les responsables, en interne, essaient de mettre sur pied le bon mix pour un transfert de compétences adéquat. En outre, nos clients nous demandent un accompagnement renforcé des managers. Après tout, ces derniers sont non seulement les ambassadeurs de la stratégie d’entreprise auprès des salariés, mais en plus, ils et elles doivent repérer les talents, notamment pour ce qui est des soft skills, au sein de leurs équipes afin de les faire évoluer en fonction de la stratégie de l’entreprise et de ce qu’on pourrait appeler un changement d’intention par rapport aux métiers.

S. P. : Pour cela, les cabinets comme le nôtre mettent à disposition des entreprises des outils et des méthodes qui permettent d’accompagner ces mobilités et détecter, notamment grâce à des tests, les aptitudes des collaborateurs, parfois ignorées, y compris d’eux-mêmes, afin de bâtir un vrai parcours de formation ou de reconversion. Enfin, s’il est clair qu’une évolution ou une reconversion professionnelle ne peut réussir que si le salarié est impliqué et volontaire, alors qu’il y a encore quelques années, la philosophie dominante était plutôt à la responsabilisation du salarié en ce qui concernait sa formation et son employabilité, nous notons désormais que la responsabilité de l’employabilité est de plus en plus partagée entre salariés, RH et direction.

Quelle articulation voyez-vous entre la réforme des retraites, les fins de carrière, les questions de pénibilité et les reconversions ?

A. F. : Certains de nos clients travaillent effectivement déjà sur tous ces sujets. D’une part, en tentant de « dépénibiliser » certains métiers ou de proposer, pour certains seniors, du temps partiel, et d’autre part, en accompagnant leurs salariés dont le poste n’existera plus forcément dans les années à venir – je pense en particulier à certains secteurs de l’industrie comme l’automobile et les moteurs thermiques, avec l’émergence des véhicules électriques – pour les diriger vers des métiers en tension, souvent, d’ailleurs, dans un cadre plus large, celui d’un bassin d’emploi.

S. P. : Il faut ajouter à cela des réflexions qui pourraient d’ailleurs faire l’objet de négociations par les partenaires sociaux sur la question du temps partiel et des cotisations retraite, en imaginant par exemple une surcotisation pour certains seniors qui continuent à travailler mais à temps partiel et ne seraient ainsi pas pénalisés pour leur pension. Pour l’heure, trop de salariés, du fait, notamment, de la trop forte pénibilité, se retrouvent en invalidité parce qu’ils ne peuvent plus exercer leur métier d’origine, tandis que d’autres pointent au chômage. Cette absence de prise en compte et d’anticipation des fins de carrière a un coût non négligeable pour la société.

Auteur

  • Lys Zohin