Alors que plusieurs pays industrialisés en mal de main-d’œuvre n’hésitent plus à organiser une immigration de travail, la France, aux prises avec d’autres sujets comme la réforme des retraites, a décidé d’enterrer la proposition de loi qui devait être étudiée à partir de la semaine prochaine. Pourtant, les employeurs français se trouvent dans la même situation que leurs homologues allemands, espagnols, britanniques ou canadiens. Petit tour du monde des dispositifs en vigueur ailleurs que chez nous.
Le gouvernement Trudeau veut attirer toujours plus d’immigrants : après 435 000 résidences permanentes prévues pour cette année, il s’est fixé comme objectif d’en atteindre un demi-million par an d’ici 2025. Pays d’immigration, majoritairement économique, le Canada a récemment déployé une nouvelle série de mesures pour attirer des immigrants face à la pénurie de talents et à près d’un million de postes vacants. Prolongation des permis de travail post-diplômes pour retenir les talents hautement qualifiés, quotas record pour les visas « Programme vacances-travail », davantage de permis de travail pour les conjoints des travailleurs étrangers : autant de mesures récentes qui viennent renforcer l’arsenal de l’attractivité canadienne.
À son arrivée au pouvoir, Joe Biden annonçait son intention de revenir sur la politique restrictive en matière d’immigration des années Trump. Depuis, il a notamment suspendu la construction du mur à la frontière mexicaine, levé les interdictions liées à la carte verte et restauré le programme d’admission des réfugiés en fixant le seuil à 125 000 personnes par an. De même, une mesure récente autorisera jusqu’à 30 000 migrants en provenance de Cuba, de Haïti, du Nicaragua et du Venezuela à entrer chaque mois sur le territoire américain et à recevoir un permis de travail.
Depuis le Brexit et la fin de la liberté de travailler sans visa pour les Européens, le gouvernement britannique a revu, fin 2020, son système à points réservé jusqu’alors aux immigrés économiques non européens, en l’étendant aux ressortissants de l’Union européenne. Qualification, maîtrise de l’anglais, âge, offre d’emploi : les candidats doivent obtenir un certain nombre de points pour avoir droit à un visa de travailleur qualifié. Face à la pénurie de talents dans certaines professions, les exigences sont moindres pour, par exemple, le secteur du soin. En mars, le gouvernement a ajouté à cette liste plusieurs métiers du secteur de la construction.
En août dernier, le gouvernement espagnol a voté une vaste réforme visant à intégrer des milliers d’étrangers au marché du travail afin de tenter de remédier à des pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs tels que l’hôtellerie, l’agriculture, la construction. Elle permet notamment aux immigrés illégaux installés depuis deux ans sur le territoire espagnol d’obtenir un permis de résidence d’un an, extensible à deux ans s’ils s’engagent dans une formation dans un secteur en manque de main-d’œuvre. Par ailleurs, les travailleurs saisonniers peuvent désormais obtenir une autorisation de travail de quatre ans, avec des obligations de rentrer dans leurs pays après chaque saison. Enfin, la nouvelle loi permet aux étudiants de combiner études et travail dans la limite de 30 heures.
Deux millions de postes vacants et même sept millions d’ici à 2035 : face à cette perspective, le gouvernement allemand prépare une nouvelle loi en matière d’immigration, qu’il veut « la plus libérale d’Europe ». Objectif : renforcer l’attractivité du pays pour mieux attirer les travailleurs qualifiés, en simplifiant notamment les démarches et en assouplissant les critères. Mesure phare, les ressortissants des pays tiers n’auront plus besoin de présenter un contrat de travail avant de s’installer. Autre exemple, la maîtrise de l’allemand ne sera plus une condition avant l’entrée. Le tout dans le cadre d’un système à points, inspiré de celui qui est pratiqué au Canada.