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Quel recrutement ?

Diversité : Émanciper les femmes avec des métiers verts

Quel recrutement ? | publié le : 06.03.2023 | Lys Zohin

Cofondateur, en 2016, de la société Lancey Energy Storage, qui a mis au point un radiateur intelligent conjugué à du photovoltaïque, Raphaël Meyer se désole du fait que les femmes pourraient passer à côté des métiers de la transition écologique. Il a pris diverses mesures en interne pour conjurer le sort.

C’est un vrai problème et une réelle frustration. « Pour nos postes de développeurs, nous recevons environ un CV de candidate sur cinq. Pour les postes électroniques, encore moins. Et pour l’électronique de puissance, aucun, zéro ! », s’exclame Raphaël Meyer, qui, après une thèse de doctorat sur le solaire et cinq ans de recherche et développement, a lancé, en 2016, avec deux autres ingénieurs de la région de Grenoble, Lancey Energy Storage, une entreprise qui commercialise des radiateurs intelligents, dotés d’une batterie qui stocke l’énergie en heures creuses et permet de l’utiliser pendant les heures pleines, le tout relié à des panneaux solaires. « Certes, nous faisons mieux que le secteur de la tech, par exemple, puisque sur nos 39 salariés, nous avons 42 % de femmes. Mais elles sont quand même sous-représentées au codir et au comex », soupire-t-il. Une situation à laquelle il veut remédier. Non seulement par souci éthique, mais aussi pour des raisons pragmatiques. « Au même titre que les écosystèmes naturels doivent être équilibrés, mon expérience de quelques années dans le monde des affaires me dit que des avis hétérogènes, au sein d’une direction, permettent de mieux gérer les risques et de prendre les bonnes décisions. Surtout en périodes de crise – perte d’un contrat, tensions sur la trésorerie, problèmes d’homologation d’un produit… – qui sont récurrentes au sein d’une start-up. »

Répondre aux besoins

Mais pour étoffer l’équipe de direction en y intégrant des femmes, il lui faut d’abord les recruter, puis les préparer à ces responsabilités. Ainsi, même s’il n’aime pas le terme, il pratique une certaine forme de « discrimination positive » en ce qui concerne la petite demi-douzaine d’alternants que Lancey accueille chaque année. La jeune pousse choisit en majorité des jeunes femmes, dans l’espoir, à terme, de les garder. De même, la DRH, composée de trois femmes, d’ailleurs, s’assure de répondre aux besoins touchant particulièrement les femmes. Cela va de deux collaboratrices actuellement en congé maternité et pour qui il faut préserver le poste, malgré un remplacement obligatoire dans une petite structure comme Lancey, afin qu’elles puissent poursuivre sans encombre leur carrière à leur retour, jusqu’à la formation et la montée en compétences d’une autre, qui souhaite aller vers la gestion de projet. Elle pourrait ainsi être amenée, à l’avenir, à prendre des responsabilités de gestion d’équipe, puis d’autres. Enfin, de manière plus générale, l’entreprise soigne l’organisation du travail, qui fait une place de choix à la flexibilité et au télétravail. « L’accompagnement, la formation, l’organisation flexible et le management bienveillant valent évidemment pour tous nos salariés, mais nous espérons que les candidates et les salariées y seront sensibles », explique Raphaël Meyer.

Enfin, la société communique, notamment auprès des doctorants et des élèves ingénieurs, hommes et femmes, de la région de Grenoble, dans l’espoir de susciter un intérêt, voire créer des passerelles entre les futurs jeunes diplômés et la start-up spécialisée dans la transition énergétique. Mais attention, pour tenter d’avoir des effectifs techniques et des instances de direction plus équilibrés, Lancey n’emploie pas n’importe quelle méthode.

Envoyer le bon message

C’est sur sa culture d’entreprise qu’elle mise. Pas question de se contenter d’indicateurs RSE – « surtout s’il s’agit de slides de paysages verdoyants commentés par une femme, précisément… », ironise le cofondateur de l’entreprise. Et pas question non plus de servir aux jeunes étudiantes ou aux postulantes un discours selon lequel elles lutteraient – ce qui est pourtant vrai – contre la précarité énergétique en réduisant les factures des usagers grâce aux produits Lancey. « Il faut sortir des clichés sur les femmes, et surtout de ce qui s’apparente au “care” », tranche-t-il.

Raphaël Meyer se prend donc à rêver. Et si, parmi les installateurs de panneaux photovoltaïques, il y avait davantage de femmes que l’infime pourcentage actuel ? Et si c’était aussi le cas chez les techniciens, spécialistes des radiateurs ? Bref, si les métiers genrés disparaissaient ? Alors que la transition écologique offre déjà des milliers de métiers nouveaux, bien rémunérés et qui font sens pour ceux qui les exercent, l’arrivée des femmes dans ces green jobs serait « une belle émancipation, d’un point de vue professionnel », avance-t-il.

Auteur

  • Lys Zohin