Présentation d’un produit, d’un service ou d’une formation en ligne, la vidéo a toujours été l’alliée de la communication d’entreprise. Lorsque sa réalisation devient un facteur de cohésion d’équipe, cela s’appelle du film building.
C’est l’expérience originale qu’ont choisie le cabinet SubstanCiel et l’École nationale des services vétérinaires (ENSV). Acteurs et techniciens sont en place. Il ne manque plus qu’à regrouper derrière eux les moutons, décor simulé d’une exploitation agricole. Ils sont plutôt indisciplinés et échappent au champ de la caméra. Nathalie Guerson, un parapluie à la main, essaye de les guider tant bien que mal, sans apparaître à l’écran. Les fous rires sont nombreux avant d’arriver au résultat voulu. Dans la vraie vie, Nathalie Guerson est directrice de l’ENSV. Vétérinaire de formation, elle sait poser un diagnostic, administrer des traitements et faire passer des messages clés, mais elle n’avait encore jamais participé à un film, encore moins fait l’actrice. Tout a commencé lorsque l’Organisation mondiale de la santé animale l’a mandatée pour mettre en place un programme e-learning portant sur le leadership dans les services vétérinaires, qui sera diffusé dans 185 pays.
« Apprendre en étant assise pendant six heures dans une salle avec pour seuls outils des documents écrits, très peu pour moi !, s’exclame la directrice de l’ENSV. Nous avons décidé de réaliser un film dans lequel on crée des situations de leadership : comment un délégué national réagit-il à la suite d’une erreur de la part d’un collègue, par exemple. »
L’ENSV a fait appel à la société Judolo, qui propose des films building, c’est-à-dire des expériences immersives dans le monde du cinéma pour participer au projet d’un film. « Nous proposons la réalisation de vidéos avec une énorme différence par rapport aux autres sociétés : les collaborateurs participent en tant qu’acteurs ou techniciens. Pour nos clients, le bénéfice est double : ils repartent avec un film digne d’une superproduction et ils vivent un team building plus qu’original avec, à la clé, cohésion et motivation des équipes », explique Laurent Pandin, dirigeant de Judolo. Exit le film corporate à la musique lancinante. Dans le film building, il y a un vrai scénario, travaillé en amont avec le client, un ingénieur du son, une maquilleuse, un cadreur, un chef opérateur, une réalisatrice qui dirige les « acteurs »… Les collaborateurs les moins timides jouent un rôle. Une assistante de l’ENSV joue le préfet, un directeur se retrouve dans la peau d’un chef de projet, la directrice adjointe se glisse dans les habits d’une représentante des éleveurs, etc. Les autres secondent les vrais techniciens en actionnant le clap, en tenant la perche ou en étant derrière la caméra. « Nous avons appris à jouer. Les collaborateurs se sont fédérés autour de missions radicalement différentes. Entre les fous rires, le téléphone qui sonne quand il ne faut pas… Nous nous sommes bien amusés », déclare Nathalie Guerson.
La direction du cabinet SubstanCiel a, elle aussi, cédé aux sirènes des plateaux de cinéma. « Pour présenter le cabinet, nous voulions un film d’entreprise un peu décalé, raconte Bénédicte Sekroun, associée. Notre métier est loin d’être sexy, il est très administratif : nous montons des projets pour demander des subventions. Avec l’aide de l’équipe Judolo, nous avons écrit le scénario “Faut trouver une subvention” sur le même modèle que le film Mission impossible. » Chemise blanche et lunettes noires, les associés du cabinet se sont transformés en agent secret le temps d’un tournage. « On se prenait vraiment pour des acteurs. Son, lumière, maquillage… J’arrive dans un monde qui n’est pas le mien. Je suis une star », sourit Bénédicte Sekroun. Dans le film, les personnages mettent tout en œuvre pour trouver la solution. « À la fin, la mission est accomplie. On se tape dans les mains. On repart à bord d’une Tesla en disant qu’une nouvelle mission nous attend », poursuit l’associée. Le tournage a duré une journée, de 7 heures à 23 heures. Il a été éreintant pour les équipes, mais elles en gardent un souvenir impérissable. Le film, d’une qualité cinématographique, est livré avec un bêtisier (réservé à la communication interne) où sont répertoriés tous les gags et autres scènes coupées au montage. « Le budget est élevé, mais très proche d’un séminaire que nous avions suivi dans un château. Entre être hébergée dans un tel monument ou faire un film et dormir dans des chambres moins chouettes, mon choix est vite fait », conclut Bénédicte Sekroun.