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« La certification Qualiopi n’est pas une preuve de la capacité à accompagner ! »

Le point sur | publié le : 06.02.2023 | D. P.

Défendant la spécificité du bilan de compétences, Brigitte Billaud, présidente de l’Association syndicale des centres de bilan de compétences (ASCBC) et directrice du cabinet Catalyse, lance un cri d’alarme. Certains centres spécialisés pourraient en effet disparaître.

Vous avez alerté régulièrement, notamment sur les réseaux sociaux, sur les dérives menaçant le bilan de compétences. Pouvez-vous préciser ?

La réforme Pénicaud de la formation professionnelle de janvier 2019 a supprimé l’obligation d’habilitation, imposée jusqu’alors, des centres de bilan de compétences. Avec, de plus, la monétisation du compte personnel de formation, on est entré dans une dérégulation à outrance du marché, de la formation professionnelle en général et du bilan en particulier. Sur le fond, et dans la loi, il doit toujours correspondre à certains critères comme le libre consentement, la confidentialité, la durée (24 heures), les étapes (trois), une éthique et un positionnement par rapport aux personnes que nous recevons et la capacité des consultants à accompagner ces personnes afin d’accompagner les bénéficiaires dans la construction de leur nouveau projet professionnel. Mais aucun contrôle ne permettait plus de vérifier le respect de ces règles…

Quelles en sont les conséquences ?

Le lancement de la plateforme Moncompteformation.fr n’avait pas prévu à l’origine de régulation pour le référencement. Il suffisait d’être reconnu comme organisme de formation pour en proposer, ce qui n’est pas très difficile en France et la certification Qualiopi n’est pas non plus une preuve de la capacité à accompagner les personnes ! Quand vous cherchez à faire un bilan, vous vous retrouvez face à une offre pléthorique, et parfois fantaisiste. Certains centres, par exemple, apparaissent comme présents sur toute la France, l’un d’eux affiche une seule et même adresse dans toutes les régions, un autre comprend plusieurs sites dans un seul arrondissement de Paris ! C’est la folie de l’algorithme, les organismes sont dans la course au référencement. Bref, c’est du grand n’importe quoi. Comment peut-on laisser ainsi de fausses adresses sur la plateforme ? Autre problème : les centres de bilan de compétences doivent proposer « un » bilan, pas plusieurs en fonction des domaines d’activité ou des métiers. Or certains, sur la plateforme, prennent des intitulés précis, comme « bilan pour devenir boulanger », « bilan de transition retraite », « bilan professionnel », qui ne correspondent à rien.

Vous avez alerté le ministère du Travail sur cette question, avez-vous été entendus ?

Nous avons rencontré Laurent Durain, directeur de la formation professionnelle et des compétences, en charge de la mise en œuvre de la réforme de la formation professionnelle à la Caisse des dépôts, et interlocuteur très à l’écoute. Certaines modifications ont eu lieu. La volonté de réguler le marché est là, mais cela fait trois ans que ces dérives existent. Nous avons demandé notamment le déférencement des fausses adresses, pour qu’un centre de bilan n’ait qu’une seule offre de bilan qui ne soit pas dupliquée sur la plateforme, ce qui est d’ailleurs stipulé dans les conditions générales… Nous voudrions aussi obtenir des chiffres, connaître le nombre de centres de bilan présents sur la plateforme, celui des bilans réalisés par ce biais, par quels organismes… Certains organismes affichaient un prix à l’heure et non à la prestation, ce qui était trompeur… C’est d’autant plus important en cette période où la demande de bilan est forte, les personnes ont besoin d’être accompagnées pour mettre en œuvre des projets professionnels réalistes et réalisables. Nous travaillons de moins en moins aujourd’hui, et nombre de centres sérieux sont menacés de ce fait de disparition.

En chiffres

70 % des personnes réalisant un bilan sont des femmes ;

70 % ont entre 35 et 45 ans ;

20 % des salariés réalisant un bilan sont en situation de handicap.

Source : CIBC

Auteur

  • D. P.