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Emploi : Le nouveau recrutement entre en action

Le point sur | publié le : 30.01.2023 | Gilmar Sequera Martins

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Emploi : Le nouveau recrutement entre en action

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S’adjoindre de nouveaux talents est devenu l’une des obsessions des entreprises. Faute de candidats, elles sortent de leur zone de confort et innovent. Tour d’horizon des nouvelles pratiques.

Impensable il y a encore trois ans, un palier vient d’être franchi. Désormais, une offre d’emploi attire en moyenne moins d’une candidature : 0,88, plus précisément, selon les données du baromètre annuel de Golden Bees portant sur les offres d’emploi en ligne. Il y a deux ans à peine, en 2021, une offre attirait en moyenne 2,63 candidatures. Cette moyenne dissimule malgré tout quelques disparités. Menés par bassin d’emploi, les calculs font apparaître l’attractivité relative des régions. Ainsi, l’Île-de-France est en tête du classement, avec en moyenne 1,5 candidature par offre. En revanche, toutes les autres régions pâtissent d’un ratio inférieur à une candidature par offre. Les mieux loties s’en approchent, comme les Hauts-de-France (0,9) ou la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (0,8), mais d’autres se trouvent aux prises avec une pénurie critique. C’est le cas de la Nouvelle-Aquitaine (0,6 candidat par offre), de la Bourgogne et de la Bretagne (0,5).

Certains secteurs sont-ils condamnés à une longue période de pénurie ? « Dans la santé et les services à la personne, les difficultés de recrutement augmentent, du fait des besoins croissants liés à l’évolution démographique », constate Sandrine Masson, directrice de l’agence Pôle emploi de Caudry (Hauts de France). « Ailleurs, le nombre insuffisant de candidats tient surtout à une inadéquation du profil des candidats », ajoute-t-elle. Cette situation peut provenir d’un écart entre le type ou le niveau de qualification et les besoins exprimés par les entreprises ou au faible intérêt des demandeurs d’emploi vis-à-vis de certains secteurs. Un état de fait corroboré par les chiffres de Golden Bees. Il apparaît en effet que l’attractivité des différents secteurs économiques peut varier du simple au triple. Alors que la branche communication-média-multimédia s’en sort plutôt bien, avec en moyenne 1,5 candidat par offre d’emploi, de même que celle du transport et de la logistique (1,3), le commerce, la vente et la grande distribution se trouvent en difficulté, en atteignant à peine un candidat par offre. Et en queue de peloton figurent l’industrie, la banque-assurance et l’immobilier, qui stagnent à 0,7 candidat par offre. La branche de la santé continue de s’enfoncer dans le marasme avec une moyenne d’à peine 0,4 candidat par offre, soit trois fois moins que la branche la mieux lotie.

L’enjeu des conditions de travail

Plus généralement, les tensions de recrutement tiennent aussi à une reprise économique qui a conduit à une forte progression des recrutements sur une courte période. Il en découle une concurrence entre secteurs qui offre mécaniquement plus de choix aux candidats. D’autant qu’en outre, l’évolution de la valeur travail a été accélérée par la crise sanitaire. Elle se manifeste avec l’évocation des conditions de travail dans les entretiens, de plus en plus fréquente. Un nombre croissant de candidats souhaitent en effet conjuguer de façon plus harmonieuse vie professionnelle et vie personnelle. Ils développent donc une attitude nouvelle vis-à-vis des horaires de travail mais aussi du contexte de travail. « Cette tendance se manifeste de plus en plus et vient renforcer les tensions de recrutement sur certains secteurs, dont le HCR (hôtels-cafés-restaurants) », résume Sandrine Masson.

Pour les employeurs, 2023 risque d’être compliquée, souligne de son côté Nolwenn Pigault, Chief Marketing Officer de Golden Bees. « Les entreprises recrutent, mais les candidats ne se bousculent plus au portillon », dit-elle. Elle en conclut qu’elles doivent changer de méthode. Publier une offre n’est plus suffisant pour recruter, et surtout, bien recruter. L’experte les appelle donc à « libérer le potentiel de rencontre entre les entreprises qui recrutent et la main-d’oeuvre ». Pour y parvenir, elle préconise de réinventer l’approche de recrutement pour mieux tirer son épingle du jeu sur un marché de l’emploi toujours plus dynamique et versatile.

Découvrir l’entreprise et ses métiers

Le service public de l’emploi a pris acte de la situation et développe de nouvelles actions. Avec la démarche « Tous mobilisés », ce sont des événements qui sont organisés avec les entreprises, comprenant des visites de site ou des immersions. Dans le Cambrésis, une PME spécialisée dans la plasturgie a ainsi bénéficié de ce dispositif. « Cette entreprise recherchait 15 extrudeurs, raconte Sandrine Masson. C’est un secteur et un métier peu connus. Nous avons organisé des visites sur site avec des candidats sélectionnés sur leur savoir-être et leurs compétences plutôt que sur leurs qualifications et leur expérience. Cela leur a permis de découvrir cette entreprise et ses métiers. » D’après la spécialiste, si les sociétés filtrent les candidats à partir du diplôme et des qualifications, elles vont restreindre leurs possibilités de trouver des talents. « Beaucoup d’entreprises l’ont déjà compris et sont prêtes à adopter une formule élargie et à former leurs futurs salariés, que ce soit avec des actions de formation préalable au recrutement ou des préparations opérationnelles à l’emploi, en entreprise ou dans un centre de formation, lorsqu’un contrat d’au moins six mois est proposé », ajoute-t-elle. En parallèle, des actions de mobilisation sont également lancées auprès des candidats afin qu’ils découvrent de nouveaux secteurs et s’y engagent éventuellement. Un nombre croissant d’entreprises réalisent donc des films sur leurs activités, qu’elles diffusent sur les réseaux, organisent des visites, voire des séances d’immersion. Une démarche très pédagogique, souligne Sandrine Masson : « Les candidats découvrent un poste de travail avec un tuteur. Cela leur permet de saisir un métier, de confirmer leur projet professionnel ou de sécuriser un recrutement. » L’immersion est d’ailleurs souvent utilisée par les entreprises qui ont vécu des recrutements n’ayant pas abouti pour différents motifs : le candidat n’a pas donné suite, il a abandonné avant la fin de la période d’essai ou il n’est pas resté après la période d’essai. La bonne nouvelle, c’est que le recrutement va devoir innover et sortir des sentiers battus, ouvrant de nouvelles voies aux entreprises mais aussi aux candidats.

Auteur

  • Gilmar Sequera Martins