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« Chaque entreprise doit déterminer les indicateurs sociaux les plus adaptés »

À retenir | publié le : 30.01.2023 | Lys Zohin

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« Chaque entreprise doit déterminer les indicateurs sociaux les plus adaptés »

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Président de Conciliances, une agence de conseil RSE, et expert auprès du cabinet-conseil Topics, cet ancien directeur de la RSE du groupe Orange s’inquiète du fait que le « S », dans les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), soit souvent occulté par la nécessité de lutter contre le dérèglement climatique. Or la transition écologique ne peut avoir lieu qu’accompagnée d’une transition sociale.

Pourquoi dites-vous que les entreprises ne s’occupent pas assez du « S » dans les critères ESG ?

Les critères ESG servent à mesurer l’efficacité de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises. Au fil des rapports du Giec, notamment, les enjeux environnementaux ont logiquement capté l’attention et du grand public et des entreprises. En conséquence, les aspects sociaux – qui semblent avancer par à-coups, lorsqu’ils sont liés aux enjeux environnementaux, comme cela a été le cas lors de la crise des gilets jaunes, ou pendant la pandémie de Covid-19, puisqu’à cette occasion, chacun s’est rendu compte que la contribution des salariés à l’entreprise était incontournable – souffrent d’un manque de visibilité. Pourtant, le mouvement de fond en ce qui concerne le questionnement sur le sens du travail, sous la forme de grande démission ou de quiet quitting, notamment, mais aussi de demande, de la part des salariés, de partage de la valeur créée, est bien là. Et il faut le prendre en compte, en particulier grâce à des initiatives pour accélérer le progrès social.

Mais le social est-il aussi facile à mesurer que la baisse des émissions de gaz à effet de serre, par exemple ?

Non, en effet. Une tonne de CO2 est une tonne de CO2, tandis que les critères sociaux sont plus compliqués à appréhender. Et il n’y a pas d’équivalent, sur le social, aux scopes 1, 2 et 3, autrement dit, aux périmètres au sein desquels les émissions de gaz à effet de serre d’une organisation sont prises en compte. Pas plus qu’il n’existe encore, contrairement aux investissements, désormais qualifiés en Europe par une taxonomie verte, de taxonomie sociale à l’échelle européenne. En outre, il n’y a pas forcément d’universalisme dans la notion de progrès social. Ce qui est valable en France, en matière de congés payés ou parentaux, par exemple, n’a pas forcément cours ailleurs de la même façon. Cela dit, les entreprises doivent se préparer, puisque la directive européenne de reporting des entreprises en matière de développement durable – la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) – entrera en application en 2024, et elle révolutionne le reporting ESG, puisqu’il est élargi aux ETI, avec, notamment, la publication d’informations ESG qui éclaireront les investisseurs, les clients, et toutes les parties prenantes sur les pratiques de l’entreprise et notamment ses relations avec sa chaîne de valeur. De même, la CSRD regroupe les informations financières et extra-financières dans un seul rapport de gestion, en incluant des thèmes obligatoires. Finie, donc, la notion d’informations extra-financières. Ce sont des rapports complets de développement durable que les organisations devront produire et qui seront audités.

Dans ces conditions, que préconisez-vous ?

Chaque entreprise doit définir le cadre de ses actions en ce qui concerne le social et le sociétal avec ses parties prenantes, puis déterminer les indicateurs les plus adaptés. Cela va du choix de ses approvisionnements – viennent-ils de pays où le moins-disant social règne ? –, à sa philosophie de management – est-il bienveillant ou crée-t-il du stress ? –, au dialogue social et au recrutement en passant par la transformation en vue de davantage d’agilité. Et attention au social washing, comme on a connu du green washing ! La sincérité dans le discours social est impérative. Et si les fonds d’investissement se sont largement positionnés sur l’environnement, ils commencent à s’intéresser de près au social, de même que des agences de notation spécialisées dans le social apparaissent. Certes, certains fonds agissent par simple recherche de diversification de leur portefeuille, mais je suis optimiste : les entreprises ont besoin, aux yeux des actionnaires mais aussi des candidats à l’embauche, de prendre de plus en plus en compte le social dans leur culture ESG – question de cohérence et de cohésion sociale en leur sein. C’est la cohérence qui crée la confiance.

Auteur

  • Lys Zohin