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Spécial diversité

Ailleurs : Aux états-unis, Albemarle fait sa mue étape par étape

Spécial diversité | publié le : 07.11.2022 | Caroline Crosdale

Pas question de révolution au sein de la multinationale chimique américaine, mais des groupes de ressources ciblés – pour les Noirs, les femmes, les LGBT+…, des formations aux biais inconscients et des « conversations courageuses ».

Timitra Hildebrand Jones, vice-présidente de la diversité et de l’inclusion du groupe Albemarle, n’a pas le temps de s’ennuyer. Arrivée à la fin 2020 chez ce producteur de lithium et dérivés pour les batteries de véhicules électriques ou la chimie, elle a été parachutée dans un monde très masculin – et très blanc… « Le travail que nous faisons dans les produits chimiques de spécialité attire peu les femmes », reconnaît-elle. De fait, seuls 23 % des salariés sont des femmes. De même, les minorités ethniques sont peu nombreuses. Seuls 26 % des collaborateurs se déclarent différents du « type caucasien ». Mais Ken Masters, qui a pris en 2020 la tête de ce groupe, dont le siège est en Caroline du Nord, tient à développer la diversité au sein de l’effectif – de 6 000 personnes, basées en Europe, en Chine, au Chili… Et Timitra Hildebrand Jones, l’ancienne responsable de l’inclusion chez Trane Technologies et Ingersoll Rand, veut appliquer une méthode bien à elle.

Pour commencer, elle a fixé des objectifs modestes : 1 % de progression de la diversité, « parce que nous sommes au début de l’aventure », dit-elle. Elle ne veut pas effrayer les troupes, mais plutôt progresser doucement et donner « un sentiment d’appartenance » aux nouvelles recrues. La vice-présidente de la diversité veille ainsi à ce qu’il y ait dans les différents sites d’Albemarle des toilettes et des vestiaires séparés pour les femmes. Les usines et immeubles doivent de même être accessibles à tous, y compris les personnes en fauteuil roulant.

L’atout du travail hybride

En outre, elle a lancé un sondage en avril dernier sur la culture de l’entreprise. Et a pu constater que 76 % des collaborateurs se sentent « très impliqués ». « Notre force, dit-elle, réside dans nos managers, jugés efficaces, justes, responsables, capables de guider leurs équipes vers le changement. » Mais il y a bien sûr toujours des efforts à faire en matière de « communication, de collaboration et de développement d’opportunités », détaille-t-elle. Pour séduire d’éventuels candidats issus de la diversité, Timitra Hildebrand Jones table sur les souplesses du travail hybride. Certes, cela ne peut se faire dans les usines, mais au siège social, pourquoi pas. Pendant la pandémie, les bureaux se sont vidés. Et aujourd’hui encore, les salariés peuvent avoir deux à trois jours par semaine de travail à distance. La gestion des six jours de congé maladie par an s’est aussi assouplie. D’ailleurs, cela s’appelle désormais des jours de bien-être, qui peuvent être pris tout au long de l’année, au gré de ses envies, sans même être malade.

« Peut-on parler ? »

Les conditions de travail sont plus agréables, de même que le cadre. Mais encore faut-il accompagner les nouveaux venus pour qu’ils aient envie de rester et faire carrière chez Albemarle. Pour ce faire, la responsable de la diversité a décidé d’actionner deux leviers : un comité d’organisation et des groupes de ressources. D’abord, le comité de 16 cadres supérieurs représentant les différentes fonctions et régions de la multinationale a élaboré la stratégie diversité. Puis, ses membres sont devenus les champions de la cause. Ils ont commencé par le développement de programmes de leadership pour les femmes et comptent poursuivre avec des formations en direction des groupes minoritaires, des personnes en situation de handicap ou malades, des anciens combattants… Deuxième levier, les groupes de ressources ciblés. Six groupes « Connect » existent pour les Noirs, les Latinos, les croyants, les anciens combattants, les personnes LGBT+ et les femmes. Ces dernières ont d’ailleurs plusieurs clubs en Caroline du Nord, au Chili, en Hollande et en Chine. Connect vise également à renforcer le sentiment d’appartenance. Il permet de se soutenir les uns les autres et de faire le lien avec les communautés extérieures. C’est aussi là que des « conversations courageuses », que Timitra Hildebrand Jones a appelées « Can we talk ? », peuvent être menées. On s’y lâche ou on s’y fâche sur l’intersectionnalité, la santé mentale, les problèmes raciaux… Les biais inconscients, les petites agressions quotidiennes font bien sûr partie des chantiers de la responsable de la diversité. Elle a commencé par former les cadres sur ces sujets et s’apprête, en 2023, à généraliser l’étude des biais inconscients à l’ensemble du personnel.

Le développement de la diversité se fait surtout aux États-Unis. Mais il déborde aussi pour toucher certains sites de production à l’international. Ainsi, au Chili, où est extrait le lithium, Albemarle a noué un accord avec 18 groupes autochtones, dans le désert de l’Atacama, pour leur verser 3,5 % des bénéfices locaux. À eux de décider du bon usage des billets verts : énergie solaire, conservation de l’eau ou autre.

Auteur

  • Caroline Crosdale