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Sur le terrain

Compétences : Fabriquer des chaussettes, cela s’apprend !

Sur le terrain | publié le : 31.10.2022 | Lucie Tanneau

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Compétences : Fabriquer des chaussettes, cela s’apprend !

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Bonnetier depuis 1938 dans la région de Limoges, Maison Broussaud vient d’ouvrir une école de formation interne pour répondre à des problèmes de recrutement et permettre aussi la montée en compétences de ses salariés.

Les dernières formations aux métiers de la maille ont disparu dans les années 2000. Pourtant, des entreprises perpétuent la tradition. C’est ainsi le cas de Maison Broussaud, fabricant de chaussettes, bas et collants depuis 1938 à une trentaine de kilomètres de Limoges. La société, certifiée Entreprise du patrimoine vivant (EPV), produit 1,5 million de paires de chaussettes par an, fonctionne 24 heures sur 24 et emploie 70 salariés. Elle en recherche actuellement sept supplémentaires – sans succès. Les compétences font défaut. D’autant que « l’Institut français de la mode, du textile et de l’habillement (IFTH) dispense bien des formations de qualifications, mais il n’y a pas de diplôme dans le secteur de la bonneterie », regrette Aymeric Broussaud, 3e génération de la Maison, qui a repris le flambeau avec son épouse Alexandra, en 2006. « Avant la crise Covid, nous avions un centre de formation en Italie, chez le fabricant de nos machines, mais il a fermé et nous ne savons pas s’il va rouvrir », soupire le gérant, qui a donc décidé de lancer sa propre école de formation, au sein de l’entreprise.

Développer de nouveaux produits

Le directeur technique a, le premier, validé un diplôme de formateur à l’UIMM de Limoges. L’arrivée d’un nouveau directeur industriel, venu des usines Seb d’Orléans, a ensuite permis de formaliser l’idée de créer une école. « Il avait la culture de la formation, de la qualification par modules et de l’évaluation qui existe dans les grands groupes mais que nous n’avons pas en PME familiale », indique le dirigeant. Afin de pouvoir développer de nouveaux produits, sept modules ont été créés pour acquérir et valider des bases du métier, depuis le contrôle qualité jusqu’à la maîtrise des machines, le tout sur une durée totale de quatre semaines à deux ans. « Nous allons dans un premier temps reformer tous nos salariés », précise toutefois Aymeric Broussaud, convaincu que si les collaborateurs en poste voient arriver des nouveaux qui seront formés alors qu’eux-mêmes n’ont pas bénéficié de ces modules, cela pourrait générer de la frustration. « Cela permet aussi à tout le monde de reprendre les bases et de recréer un cadre commun, poursuit-il. Avant d’aller chercher de nouvelles recrues, nous voulions proposer à nos salariés de monter en compétences, en qualification et en salaire. Certains préfèrent rester ouvriers sans prendre de responsabilités, mais d’autres apprécient d’évoluer et de voir leur rémunération augmenter en conséquence. »

Concrètement, les trois premiers modules durent une journée complète, tandis que les quatre suivants demandent de trois jours à une semaine d’apprentissage afin de valider la formation, entièrement dispensée au sein de Maison Broussaud mais dont le contenu a été créé en partenariat avec un opérateur de compétences. La formation doit permettre d’apprendre le métier de base, c’est-à-dire contrôleur qualité, puis de monter en compétences pour accéder au rang de bonnetier (conducteur de machine), puis de technicien et enfin de technicien-régleur. L’organisme de formation doit valider le contenu dans les mois à venir, afin que Maison Broussaud puisse à l’avenir accueillir des élèves extérieurs, même si Aymeric Broussaud remarque que « des confrères ont désormais des projets similaires ».

L’intérêt de la formation interne est aussi de permettre des passerelles entre métiers. « Il y a des évolutions possibles, insiste Aymeric Broussaud. Même si les formations ont surtout lieu au sein de l’atelier de tricotage, pour nous, la polyvalence est le but ! Un salarié qui fait aujourd’hui du repassage peut se former et rejoindre les ateliers en tricotage. » L’initiative devrait coûter 50 000 euros à l’entreprise. « Nous avons les bâtiments, les salles de formation, le formateur, le matériel », enchaîne Aymeric Broussaud. Avec un parc de 140 machines, Maison Broussaud a en effet la capacité d’en consacrer certaines à l’apprentissage.

Outil « marketing »

Et « cela permet aussi de nous faire connaître, c’est un atout indéniable. Aujourd’hui, nous avons besoin de faire la promotion de nos métiers et des possibilités d’évolution au sein de nos industries, sur des postes qui sont à la campagne. C’est à la mode de changer de vie et de se mettre au vert, nous devons en profiter », insiste-t-il. L’entreprise a d’ailleurs eu des candidatures de profils atypiques, de reconversion de la boulangerie, par exemple. « Et je crois que c’est parce que nous proposons un accompagnement », dit-il.

Auteur

  • Lucie Tanneau