« Je me suis mise à marcher en téléphonant. Et à la pause déjeuner, nous faisions une longue promenade qui nous donnait un vrai regain d’énergie pour le reste de la journée », déclare Laetitia Forlini, responsable projets développement RH de Groupe Action Logement. Même constat pour des collaborateurs chez Heineken. Les uns notent que « le fait de marcher tous les jours avant, pendant ou après le travail est devenu un réflexe partagé en interne. Les réunions en marchant font désormais partie de nos nouvelles habitudes », d’autres que « le simple fait d’échanger au téléphone en marchant permet de se dégager de son écran et de mieux se concentrer sur son interlocuteur ».

Ce qui a provoqué ces changements ? Un challenge de deux semaines pour se bouger dans le cas de Groupe Action Logement et un programme d’un an d’incitation à la marche pour le brasseur international. Les deux entreprises ont fait appel à Kiplin, un développeur de jeux numériques permettant aux participants de pratiquer une activité physique régulière, en équipes virtuelles. Ces jeux fonctionnent sur un principe identique : les participants doivent bouger (marcher, courir…) munis d’un objet connecté (leur smartphone…). Ce sont leurs mouvements qui les font progresser dans le jeu. Plusieurs modèles sont proposés. Celui du « Challenge » est simple : plus les salariés marchent à un rythme régulier, plus ils cumulent des points pour faire monter leur équipe au classement général. Autre formule, un jeu de l’oie interactif remplace les dés par des pas quotidiens. Dans tous les cas, communication d’équipe et coopération sont indispensables pour élaborer la stratégie la plus efficace afin d’arriver en haut du classement.

« Les entreprises adoptent désormais une approche de prévention au quotidien, que la loi* ne fait que renforcer, explique Vincent Tharreau, fondateur de Kiplin. Dans le même temps, il s’agit de resserrer durablement les liens, non seulement entre salariés et employeurs, mais aussi entre les collaborateurs, qui ne travaillent plus tous au même endroit, au même moment. Enfin, la prise en compte de la santé des salariés est devenue un axe essentiel des politiques RH, notamment dans cette période de tension sur l’emploi. Montrer que l’on agit concrètement pour la santé de ses collaborateurs constitue un argument majeur pour retenir des talents ou recruter. » Ces programmes s’inscrivent aussi dans un contexte de télétravail quasi généralisé. Pour les entreprises qui ont signé des chartes de télétravail, il s’agit maintenant d’accompagner dans la durée, et non plus dans l’urgence, les collaborateurs.

Kiplin compte, parmi ses clients, des entreprises aussi diverses que Sodexo, BNP, Orange, Harmonie Mutuelle, Texas Instruments, H & M, Generali, EDF, But, la SNCF, GRDF… L’offre de l’éditeur rencontre d’autant plus de succès que désormais, les investissements de l’entreprise pour permettre à ses salariés de faire du sport ouvrent droit à une exonération de cotisations sociales. En guise de repère, l’Urssaf donne un exemple précis. « Une entreprise qui emploie 15 salariés et finance, en 2022, à hauteur de 3 500 euros, des cours collectifs de gym et de yoga, accessibles à l’ensemble du personnel, pourra bénéficier d’une exonération de cotisations et de contributions sociales d’un montant total pour l’année de 2 571 euros (soit 171,40 euros pour 15 salariés). Le montant supérieur au plafond d’exonération de 929 euros (soit 3 500 – 2 571) sera assujetti à cotisations et contributions sociales. » Seule condition : les avantages doivent être proposés à l’ensemble des salariés.

Pour mesurer l’effet des séances d’activité sportive et leurs bienfaits sur leur condition physique, les participants réalisent, après la fin du coaching digital, un bilan, proposé en auto-évaluation dans l’application. Ce test a récemment été certifié dispositif médical. Le niveau d’activité physique des participants augmente en moyenne de plus de 50 %. Et 70 % des participants sédentaires sortent du seuil de sédentarité, six mois à un an après avoir participé à de tels programmes. « Ce n’est pas la course à l’échalote, commente Clémentine Slembrouck, responsable commerciale chez Kiplin. Loin de viser la performance, l’idée est d’amener les publics les plus éloignés de la pratique sportive à se remettre en mouvement. Pas à pas. »