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« Pour les métiers non télétravaillables, la semaine de quatre jours est un bon compromis »

À retenir | publié le : 12.09.2022 | Lys Zohin

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« Pour les métiers non télétravaillables, la semaine de quatre jours est un bon compromis »

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Responsable marketing produit des solutions Human Capital Management de Cegid en France, Jérôme Ricard estime que la semaine de quatre jours présente de nombreux avantages, en matière de qualité de vie au travail, de pouvoir d’achat pour les salariés, d’attractivité, de performance et de RSE pour les entreprises.

Alors qu’il y a des expérimentations à grande échelle un peu partout dans le monde sur la semaine de quatre jours, la France semble à l’écart du mouvement. Pourquoi ?

La semaine de quatre jours est en fait une vieille histoire en France. Elle a été incluse dans la loi Robien de 1996. L’idée était à l’époque de permettre aux entreprises de réduire le temps de travail en contrepartie d’une embauche d’au moins 10 % de salariés en CDI. En échange, elles bénéficiaient d’un allègement des cotisations patronales de Sécurité sociale. Puis sont venues les lois Aubry, dont la loi de 2000, dite « Aubry II », qui ont confirmé l’abaissement de la durée légale du travail à 35 heures hebdomadaires ou à 1 600 heures annuelles pour les entreprises de plus de 20 salariés. Elles ont eu du mal à se mettre en place, dans le privé puis le public, via des accords de branches. Mais elles ont consacré en quelque sorte la semaine de 35 heures sur cinq jours et fait oublier la semaine de quatre jours. Le dispositif des 35 heures est donc sans doute un frein à la semaine de quatre jours. En outre, l’avènement du télétravail, sur fond de pandémie, a exigé l’adaptation de l’organisation du travail, la transformation des process, l’optimisation de la performance. Un dossier lourd, qui fait aussi que nombre d’entreprises ne sont pas prêtes, dès maintenant, à se lancer dans autre chose, comme la semaine de quatre jours…

La voyez-vous cependant arriver en France ?

Oui. Les DRH n’y sont pas hostiles. Elles y voient un vrai moyen d’attirer des talents, y compris dans les entreprises qui ne peuvent pas, compte tenu de leurs activités, offrir la possibilité de télétravailler à leurs équipes. Trois jours de repos d’affilée est un vrai levier. N’oublions pas que 70 % des salariés ne travaillent pas à distance, parce que, des pilotes de ligne aux policiers, des conducteurs de tramway aux collaborateurs dans les entreprises de nettoyage ou de gestion des déchets, nombre de métiers sont non télétravaillables. Pour ces profils, la semaine de quatre jours est un bon compromis et une forme d’équité par rapport à ceux qui peuvent bénéficier du télétravail. Enfin, dans certains secteurs, grande distribution ou restauration, qui ont de plus en plus de mal à trouver des salariés acceptant de travailler le samedi et le dimanche, offrir en contrepartie trois jours de repos dans la semaine est un argument intéressant. Cela implique davantage de complexité certes, mais la qualité de vie au travail et le pouvoir d’achat faisant de plus en plus partie de la réflexion des DRH, la semaine de quatre jours est envisagée. Elle permet de mieux se reposer, mais aussi d’économiser en jours de garde d’enfants et en essence sur les trajets maison-travail faits en voiture. Et participe aussi à la réduction du bilan carbone.

Faudra-t-il une loi sur le sujet ?

L’ancien député Matthieu Orphelin a associé, dans une proposition de loi d’avril 2022, la semaine de quatre jours à un dispositif plus général de réduction du temps de travail, assorti d’une exonération d’une partie des cotisations patronales pour toutes les entreprises qui feraient passer le temps de travail de leurs salariés à une moyenne annuelle de 1 460 heures travaillées (équivalant à 32 heures hebdomadaires) et qui, pour compenser la diminution d’heures travaillées dans l’entreprise, devraient embaucher de nouveaux salariés. Cela dit, je ne suis pas sûr que l’État ait besoin d’accompagner le mouvement par une loi. Le Code du travail permet déjà l’aménagement du temps de travail. Les entreprises doivent avoir la liberté d’offrir la flexibilité souhaitée, et qui peut être le fruit de discussions entre salariés, managers et direction pour transformer les organisations. D’ailleurs, certaines, je pense à Accenture ou à Welcome to the Jungle, ont déjà expérimenté ou adopté cette nouvelle flexibilité et la restauration s’y met aussi. Les entreprises y voient clairement un avantage en matière de qualité de vie au travail et de performance accrue, de même qu’en termes d’attractivité et de rétention des collaborateurs.

Auteur

  • Lys Zohin