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Comment vraiment œuvrer pour l’insertion des jeunes

Les clés | À lire | publié le : 29.08.2022 | Lydie Colders

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Comment vraiment œuvrer pour l’insertion des jeunes

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Dans Pour une politique de la jeunesse, le sociologue Camille Peugny appelle à se préoccuper des jeunes sur le long terme. Et dresse un portrait éclairant d’une génération confrontée à la précarité du travail.

Certes, les gouvernements successifs n’ont cessé d’agir pour la jeunesse, mais « de manière erratique, relativement inefficace », en empilant des dispositifs devenus illisibles. Si l’on veut en finir avec la reproduction des élites et la dégradation du travail des jeunes, « la jeunesse doit redevenir une question sociale » à part entière, plaide Camille Peugny. à grand renfort d’études, le sociologue dresse en effet dans son livre un tableau sombre d’une génération « fracturée par les inégalités » – la réussite en matière d’études et de carrière restant liée au statut social de la famille, au lieu d’habitation ou à l’origine. Et qui peine davantage à s’insérer face à un chômage endémique : depuis les années 1980 jusqu’à aujourd’hui, quelles que soient la période économique ou les mesures prises, le taux de chômage des jeunes reste « toujours supérieur à 15 %, rarement inférieur à 20 % », rappelle-t-il. Il insiste aussi sur la « marée grandissante de la précarité » qui les frappe : en 2019, un jeune sur deux de moins de 25 ans en emploi était en CDD, en intérim, en contrat aidé ou en apprentissage. Leur précarité a triplé depuis quarante ans, d’autres classes d’âges ayant été « relativement épargnées », selon l’auteur. Un phénomène « inquiétant », touchant surtout les moins qualifiés. Entre 1992 et 2010, le taux de ceux accédant à un emploi stable et à durée indéterminée cinq ans après leurs études « a chuté de 10 points, de 74 % à 63 % ». Preuve, selon lui, que « le millefeuille » des mesures envers ce public est un échec : « C’est bien au détriment des jeunes que le marché de l’emploi se précarise », assure-t-il. Pis, cette « cicatrice » serait durable : ces jeunes précaires peineraient à rattraper ensuite une personne en CDI au fil de l’âge et des années…

« Le temps de l’expérimentation »

Pour Camille Peugny, l’objectif n’est donc pas « de colmater les brèches » en urgence, mais de penser la jeunesse comme une période « fragile », qui nécessite un temps long « d’exploration et d’expérimentation » pour trouver sa place. Des inégalités scolaires à l’emploi, l’auteur émet des pistes ambitieuses : introduire des bons mensuels de formation pour favoriser la reprise d’études (à l’instar du Danemark) ou créer un revenu pour chaque étudiant, non conditionné aux ressources parentales pour limiter les inégalités. Côté insertion, il faudrait, dit-il, généraliser des outils comme la garantie jeunes pour développer leurs compétences, « plus efficace pour un retour durable à l’emploi que les politiques visant à agir sur le coût du travail ». A la marge, le sociologue interpelle aussi les branches, afin de revaloriser « les conditions d’exercice » et les perspectives d’avenir pour les jeunes, dans la logistique, notamment. Vaste chantier, jugé nécessaire pour la cohésion sociale entre générations…

Auteur

  • Lydie Colders