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La solidarité, vecteur d’engagement pour les salariés

Le point sur | publié le : 18.07.2022 | Nathalie Tissot

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Développement : La solidarité, vecteur d’engagement pour les salariés

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Alors que les vacances d’été approchent, Entreprise & Carrières s’est penché sur ces salariés qui donnent de leur temps pour de bonnes causes. Pour les employeurs, congés solidaires ou mécénat de compétences apparaissent comme de nouveaux moyens de s’assurer de leur fidélité.

Planète Urgence n’a jamais eu autant besoin de volontaires que cette année. La crise sanitaire a en effet largement freiné les congés solidaires, créés par l’association il y a 22 ans. Le principe ? Les salariés partent deux semaines sur leurs congés payés pour une mission de solidarité internationale. Leur employeur, public ou privé, verse 2 500 euros minimum – éligibles à la déduction fiscale de 60 % – à Planète Urgence, ce qui permet de couvrir, en partie au moins, les coûts de préparation et de logistique. Chaque volontaire suit une formation obligatoire de deux jours avant son départ. « Un salarié connaît le monde de l’entreprise, mais pas forcément les enjeux de la solidarité internationale ou d’une ONG très locale. Il y a besoin de déconstruire la vision du héros qu’il peut avoir pour reconstruire une position de volontaire », indique Amandine Hersant, la directrice générale de Planète Urgence.

Cette année, entre 100 et 150 salariés partiront, mais 110 missions restent encore à pourvoir à travers le monde, au Bénin, au Cambodge, en Équateur, à Madagascar… Les besoins sont très variables et peuvent aller de l’aide pour la gestion de projets à la levée de fonds ou la formation sur des logiciels en passant par des besoins plus spécifiques, en apiculture, par exemple. Venant d’entreprises de toute taille, les participants ont des profils très divers. « Cela permet de regagner du sens, de pouvoir se ré-ancrer dans la réalité par rapport à ce qu’on vaut. Il y a aussi des impacts très concrets sur l’acquisition de nouvelles compétences », poursuit Amandine Hersant.

Connaissance de soi et agilité

Dans une étude menée auprès des volontaires de 2019, 65 % d’entre eux affirment avoir une meilleure connaissance d’eux-mêmes et de leurs capacités personnelles, 60 % avoir gagné en agilité et 41 % des compétences de transmission et d’animation de formation. C’est le cas d’Achille Lele, qui a formé le personnel d’une association camerounaise aux techniques de cartographie en février 2022. « Le projet consistait à cartographier une zone dans l’ouest du Cameroun pour protéger les hippopotames et les cultures. Cela m’a permis de monter en compétences de façon personnelle, mais aussi professionnelle en apprenant à former des gens », témoigne le consultant IT pour Davidson, une société spécialisée dans l’expertise et la gestion de projets technologiques.

« Les collaborateurs me rapportent à chaque fois qu’ils prennent une grosse claque, mais beaucoup ont envie d’y retourner », renchérit Yves Le Gohébel, directeur général de Connexing, spécialisée en téléphonie d’entreprise économique et écologique. Durant les restrictions liées à la crise sanitaire, la PME a même expérimenté le e-congé solidaire à travers une formation à distance. « Tous les salariés ne sont pas intéressés, tempère cependant le chef d’entreprise. Il faut se sentir à l’aise, avoir envie de partager et une certaine pédagogie. » Au retour, les volontaires partagent souvent leur expérience avec leurs collègues et managers. C’est ainsi le cas au conseil départemental de Loire-Atlantique. Au sein de la collectivité, qui finance dix congés solidaires par an, 70 % des agents partis déclarent vouloir poursuivre le bénévolat.

Attirer les jeunes

Pour beaucoup d’entreprises, l’engagement au service de l’intérêt général est également devenu un levier pour attirer les jeunes. « C’est très important pour les générations que nous embauchons, car elles considèrent que l’entreprise doit les aider sur ce sujet », racontait récemment dans un webinaire Sophie Lilas, directrice adjointe des RH chez Mazars, où la moyenne d’âge est inférieure à 30 ans. Même constat au sein du groupe pharmaceutique Servier. Le congé solidaire, lancé en 2018, rencontre un succès « incroyable », selon Corinne Massin, directrice du mécénat. Quarante départs sont déjà prévus pour 2023 et autant de salariés figurent sur une liste d’attente.

Effectué, au contraire, sur le temps de travail, le mécénat de compétences possède les mêmes vertus. Dans une étude réalisée par l’Ifop fin 2020 auprès d’un millier d’actifs ayant participé à ce type d’action, 71 % indiquent que l’expérience « les a fait évoluer » et 57 % qu’ils ont acquis de nouvelles compétences professionnelles. Par ailleurs, 80 % des moins de 35 ans perçoivent ces détachements auprès d’organismes d’intérêt général comme un moyen de sortir de la routine et 66 % de renforcer leur motivation au sein de leur entreprise.

Servier, dont les filiales participent à des projets de solidarité internationale avec des associations locales, propose à tous ses salariés en France un jour de mécénat de compétences par an pour un jour de congé posé. « L’engagement des collaborateurs vient toujours compléter le soutien financier que nous octroyons à nos associations partenaires », rappelle Corinne Massin, la déléguée générale du fonds de dotation. Des « séminaires solidaires » ont également été créés à la demande des managers, « avec une journée en immersion au sein d’une ou plusieurs associations, selon la taille de l’équipe, une journée feed-back et un plan d’action pour essayer de remettre en pratique toute l’année ce que les collaborateurs auront pu vivre à travers cette expérience », détaille la responsable.

Cet engouement pour le mécénat de compétences est marqué depuis cinq ans par une extension à tous les profils de salariés. Quitte à parfois oublier l’essentiel : les besoins des associations… « En une journée, on ne fait pas forcément grand-chose, là où en deux semaines, trois mois, un an, on fait plus. Nous avons aujourd’hui des entreprises qui vont plutôt s’attarder sur le nombre de collaborateurs engagés que sur l’impact de ces engagements pour les associations », regrette ainsi Elsa Chaucesse, directrice impact communauté et communication au sein de l’association Pro Bono Lab.

Les seniors à la manœuvre

Sur les trois dernières années qu’il lui reste avant la retraite, Christophe Longepe a décidé de s’engager en mécénat de compétences pour La Croix-Rouge française avec l’aval de son employeur, BNP Paribas. Il est en charge du pilotage du programme « Foncière numérique et verte » au sein de la direction de l’immobilier et du patrimoine (DIP) de l’association. « La DIP a compris que j’avais des compétences transversales, comportementales, complémentaires des compétences purement métier immobilier déjà présentes en interne », constate cet ancien responsable de la gouvernance informatique du groupe BNP Paribas qui n’avait jamais eu le temps de s’investir dans des actions bénévoles. Aujourd’hui, il se dit heureux de contribuer à des activités ayant un grand sens sociétal. « Je suis plus épanoui qu’avant. J’ai un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle avec le mécénat de compétences », assure-t-il.

Auteur

  • Nathalie Tissot