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Sur le terrain

États-Unis : Automattic, pionnier du travail à distance

Sur le terrain | publié le : 04.07.2022 | Caroline Crosdale

L’éditeur de logiciels pratique ce mode de travail depuis plus de quinze ans, ce qui lui a permis de développer une bonne pratique de la communication.

Les 2 000 salariés du groupe californien Automattic (dont 20 en France) n’ont pas attendu la pandémie pour se mettre au travail à distance, dans les 96 pays où l’éditeur de logiciels est présent. Célèbre pour le développement de la plateforme Wordpress, il n’a en fait jamais eu une autre forme d’organisation du travail.

Son fondateur, Matt Mullenweg, a 21 ans en 2005 lorsqu’il crée sa start-up. Étudiant en sciences politiques, joueur de saxophone et photographe, il évolue dans un milieu de jeunes développeurs free-lance. Il commence à San Francisco, embauche un premier collaborateur aux Pays-Bas et un autre au Texas. « Leur travail est naturellement asynchrone, explique Anand Quinn, la responsable des ressources humaines. C’est comme une course de relais, Matt démarre un projet en Californie et pendant la nuit, son collègue néerlandais le poursuit. »

Bien sûr, ce mode de travail très souple fonctionne bien avec une équipe de quelques personnes seulement. Mais lorsque l’effectif atteint plus de mille collaborateurs, le passage de relais est plus ardu. C’est pourquoi Automattic s’appuie sur deux principes : la communication et la confiance. Les salariés, qui parlent un total de 119 langues, échangent en anglais. « Il faut pouvoir lire beaucoup et être capable de l’écrire », souligne Anand Quinn. Pour ce faire, ceux qui ne sont pas totalement à l’aise peuvent se perfectionner en suivant une formation en ligne, corriger leurs fautes de grammaire et consulter un glossaire interne des sigles les plus utilisés.

Plateforme d’échanges internes

En outre, Automattic dispose de son propre système de communication, le P2. C’est sur cette plateforme que chaque projet démarre, avec une première publication. Un salarié, dans une autre zone géographique, propose ses commentaires et d’éventuelles modifications. Un troisième membre de l’équipe enchaîne et ainsi de suite. Et si l’échange sur P2 n’est pas assez rapide, on bascule sur l’application Slack.

« La confiance dans la capacité des autres à faire leur travail est essentielle », souligne Anand Quinn. Mais pour faciliter ce travail planétaire, l’entreprise a mis en place quelques repères. Tout nouveau projet a ainsi doté d’un « responsable direct », en charge du suivi. Chaque membre de l’équipe organise ses horaires à domicile. « Nous travaillons 40 heures par semaine, indique Anand Quinn. Mais si je veux être derrière mon ordinateur de 7 heures du matin à 15 heures, puis recommencer plus tard dans la soirée, c’est moi qui décide. » Cette liberté permet de prendre rendez-vous chez un médecin ou d’aller chercher les enfants à l’école, sans demander la permission. Pas question pour autant de négliger les tâches. Les membres des différentes équipes documentent régulièrement l’avancement de leurs projets : telle tâche a été accomplie, telle autre a pris du retard, et tout est transparent et inscrit dans P2.

Recrutement sur Slack

C’est donc avec cette philosophie de liberté et d’autonomie qu’Automattic s’est développé. Une culture d’entreprise qui ne convient pas à tous. C’est pourquoi la direction et les ressources humaines font très attention aux recrutements, l’objectif étant d’accueillir de nouveaux talents qui partagent les mêmes valeurs. Le processus d’embauche commence toujours par une discussion sur Slack. « Cela enlève les biais inconscients, assure Anand Quinn. On ne sait rien de l’habillement, du son de la voix ou de l’allure. On ne s’intéresse qu’au savoir-faire. » Ensuite, le candidat retenu fait un test de deux à quatre semaines sur de vrais projets. Ce qui permet d’évaluer le travail et de mesurer ses compétences relationnelles. « Comment communique-t-il ? Accepte-t-il les critiques ? Sait-il résoudre les problèmes ? », détaille la responsable des ressources humaines. Et de conclure : « C’est une évaluation dans les deux sens. Le candidat retenu peut très bien décider que ce genre d’entreprise ne lui convient pas. »

Une fois admis dans le cercle d’Automattic, les collaborateurs apprennent à réduire les distances. L’application Donut permet de célébrer des anniversaires, des naissances… Les emojis adoucissent la froideur de l’écriture. « On se dit ainsi merci ou pas de problème », explique Anand Quinn. Certains canaux de Slack laissent les salariés se retrouver par affinité : femmes, LGBT+, hackers… Enfin, une fois par an, les équipes se réunissent pour mettre un visage sur le collègue de Slack au bout du monde et approfondir les liens. Des équipes plus réduites se rencontrent en outre au complet une à deux fois par an.

Auteur

  • Caroline Crosdale