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Les trois sens du sens au travail

Chroniques | publié le : 27.06.2022 | Martin Richer

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Les trois sens du sens au travail

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Par Martin Richer management & RSE

« Enquête de sens au travail » : c’était le thème de la 19e Semaine pour la qualité de vie au travail qui s’est terminée vendredi dernier. C’est l’occasion de suggérer une approche large de la question du sens, qu’il faut embrasser… dans ses trois sens.

Le sens comme direction

Ce que je recherche dans l’exercice de mon activité professionnelle, sa finalité, sa valeur, les buts et desseins qui guident mes actions et mes choix. Comment je perçois les objectifs qui me sont assignés pour mon travail et leur contribution à la stratégie et à l’avenir de mon entreprise.

Pour être performants, les collaborateurs ont besoin de comprendre cette direction et si possible d’y adhérer : où va l’entreprise et quelle est leur contribution personnelle à ce cheminement. C’est la force et l’importance du projet commun : « Donnez-leur des cathédrales à construire et ils s’aimeront », disait Saint-Exupéry.

Cette compréhension du sens comme direction est loin d’être acquise. Ainsi, 41 % des salariés pensent que l’adhésion des salariés aux grandes orientations de leur entreprise est mauvaise ou très mauvaise, mais seuls 13 % des chefs d’entreprise le pensent (Observatoire social de l’entreprise Ipsos, juin 2020). Il y a là un écart très problématique, qui pérennise l’inaction.

Le sens comme signification

La valeur de mon travail à mes yeux (accomplissement) et aux yeux de mon management, de mon entreprise (reconnaissance). Congruence entre les valeurs que mon travail met en jeu, mes valeurs personnelles et les éléments de motivation qu’il me procure. Comment je comprends la finalité de mon travail, comment il contribue à ma qualité de vie, à celle de mes collègues, aux enjeux sociétaux et environnementaux.

« Le sens du travail se présente, pour chaque salarié, sous la forme d’une auto-interrogation : mon emploi est-il un travail digne de ce nom ? », interroge Olivier Favereau, professeur émérite de sciences économiques de l’université Paris-Nanterre (« Une crise du consentement au travail », Le Monde du 12 juin 2022). La réponse est trop souvent cruelle.

Là encore, la route est longue : 69 % des managers disent prendre le temps d’expliquer aux collaborateurs de leur équipe à quoi va servir leur travail, mais seuls 37 % des collaborateurs le perçoivent (Laurent Falque, « Transformation du travail après le confinement », présentation de la chaire Sens et travail de l’Icam avec HEC Montréal et Synopia, juillet 2020).

Le sens comme sensation

Un travail qui procure une sensation de bien-être (absence de stress et soutien social), de sécurité (relations avec les collègues et la hiérarchie), d’estime de soi (acquisition de compétences), voire d’accomplissement. Le management doit s’emparer des émotions. Sans sensibilité, le management dérive vers le rationalisme pur. Sans management, la sensibilité tourne à l’émotivité stérile. C’est la combinaison des deux qui apporte la sensation dans l’expérience de travail.

Le manager a à cœur de partager le sens (et non « donner » du sens, expression aussi souvent utilisée qu’inappropriée), car le sens est une notion qui ne se révèle que par confrontation avec le vécu professionnel de chacun. Le sens ne se donne pas, il ne tombe pas du dirigeant vers l’organisation, il se dévoile progressivement dans les interactions du travail.

Conclusion

C’est en travaillant ensemble sur les trois acceptations du sens que l’on peut améliorer significativement la QVT. On en est encore loin en France. Seuls 12 % des chefs d’entreprise ont lancé une démarche pour permettre aux salariés de donner un sens à leur travail auxquels s’ajoutent un petit 2 % qui prévoient de le faire. Et seuls 10 % ont lancé une initiative pour permettre à leurs salariés de se sentir utiles aux autres, avec là encore, 2 % supplémentaires qui le prévoient (« Observatoire social de l’entreprise », juin 2020).

Auteur

  • Martin Richer