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Inclusion : Les missions locales signent une charte anti-discrimination dans l’emploi

À retenir | publié le : 06.06.2022 | Lucie Tanneau

Depuis quatre ans, ces spécialistes de l’accompagnement des jeunes sur le marché du travail ont déployé de nouvelles approches auprès des entreprises comme des candidats à l’embauche.

Les 436 missions locales de France étaient réunies en séminaire national, les 12 et 13 mai derniers, à Marseille. L’occasion, pour ces professionnels de l’accompagnement des jeunes vers l’emploi, de tirer les enseignements de quatre années d’expérimentation contre les discriminations.

Depuis 2018, les missions locales se sont en effet engagées pour lutter de façon systémique contre les discriminations dans le cadre d’une action financée par le Fonds d’expérimentation pour la jeunesse (FEJ). Initié au sein de l’Association régionale des missions locales Provence-Alpes-Côte d’Azur, ce nouvel accompagnement s’est déjà étendu à neuf régions.

« La nouvelle approche est fondée sur trois actions, détaille Nathalie Robert, directrice de la mission locale de La Ciotat, en charge du déploiement. Il s’agit de former les salariés à comprendre les enjeux de la lutte contre les discriminations et d’accompagner les entreprises pour objectiver leurs critères de recrutement, de mettre en place des modules d’une journée à destination des entreprises pour les accompagner d’une façon non culpabilisante et de permettre à chaque mission locale d’internaliser les compétences sur ces sujets pour la mettre en capacité d’organiser des ateliers à destination des jeunes, sans dépendre d’experts extérieurs. »

Quelque 309 professionnels du réseau ont été formés et 120 entreprises partenaires se sont engagées à objectiver leurs critères de recrutement.

Claire Hédon, la Défenseure des droits, est venue saluer ce travail lors du séminaire de l’Union nationale des missions locales. Et en sa présence, ces dernières ont signé une charte d’engagement afin que ces travaux puissent profiter durablement aux 1,1 million de jeunes accompagnés chaque année par le réseau. « Un jeune qui a été victime de discrimination dans son parcours professionnel connaîtra du stress et une perte de confiance en lui, souligne Nathalie Robert. La lutte contre les discriminations doit devenir notre cœur de métier, comme l’insertion est notre cœur de métier. »

Il y a urgence. Dans la 14e édition du baromètre sur la perception des discriminations dans l’emploi paru en décembre 2021, la Défenseure des droits alertait sur « une surexposition de la jeunesse aux discriminations dans l’emploi ». Quelque 37 % des jeunes interrogés rapportent ainsi avoir déjà vécu une situation de discrimination ou de harcèlement discriminatoire dans le cadre d’une recherche d’emploi ou durant leur carrière et près de 90 % d’entre eux déclarent avoir connu une situation de dévalorisation au cours de leur vie professionnelle, selon le baromètre. Trois situations à risque ont été identifiées : la sous-estimation de leurs compétences, la mise sous pression pour en faire toujours plus et la réalisation de tâches inutiles et ingrates…

Écouter et redonner confiance

Pour Nathalie Robert, « il faut donc accompagner les missions locales pour travailler avec les entreprises sur leurs critères de recherche lors des recrutements, de même qu’il faut former des référents internes dans chacune des 436 missions locales de France, pour qu’il n’y ait plus de postures incorrectes. » Un conseiller de Marseille a déjà formé une trentaine de ses collègues en France sur ces sujets et d’autres se sont portés volontaires lors du séminaire national. « Il y a 22 ans, quand je me suis intéressée à ces sujets, je pensais que nous avions un ou deux ans de travail… Hélas, 22 ans plus tard, nous y sommes encore ! », regrette Nathalie Robert, pour ajouter qu’avec la présence de la Défenseure des droits aux côtés des missions locales, « la lutte contre les discriminations est placée au centre ». La directrice de la mission locale de La Ciotat n’a qu’un souhait : « Que plus aucun jeune n’intériorise que tel poste n’est pas pour lui, car il vient de tel quartier ou est de tel sexe ou de telle origine, s’exclame-t-elle. Et n’oublions pas que la discrimination est un délit. »

Les conseillers des missions locales vont donc également être formés à écouter ces jeunes qui ont été victimes de discriminations, afin qu’eux-mêmes soient en mesure de définir ce qu’ils ont subi. « Cette question ne doit plus être taboue : il faut créer les conditions pour que les jeunes sachent que les missions locales, qui sont le service public d’accès à l’emploi, ne sont pas discriminantes », conclut Nathalie Robert. Avec cette charte d’engagement, la philosophie des missions devrait circuler – et atteindre ces cibles.

Auteur

  • Lucie Tanneau