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Allemagne : Des lanceurs d’alerte encore mal protégés

À retenir | publié le : 06.06.2022 | Lys Zohin

Trois ans après une directive européenne, les lanceurs d’alerte ont encore du mal à obtenir la protection nécessaire en Allemagne. Toutefois, alors que le pays fait aujourd’hui face à une procédure de relance de l’Union pour non-conformité, le ministre de la Justice, Marco Buschmann, a présenté il y a peu un premier texte législatif sur le sujet. Il espère que le projet de loi sera débattu puis adopté avant la fin de l’année. Selon le texte, toutes les entreprises de 50 salariés et plus devraient se doter d’un point de contact interne pour les lanceurs d’alerte, tandis que l’État ferait de même. Les lanceurs d’alerte pourraient ainsi choisir ce qu’ils préfèrent, de même qu’ils pourraient, dans certains cas, se voir octroyer une immunité s’ils divulguent des informations aux médias. Mais surtout, la pénalisation des lanceurs d’alerte serait rendue illégale. Et enfin, la charge de la preuve serait renversée. Ainsi, les employeurs devraient prouver que les actions prises contre les lanceurs d’alerte ne constituent pas une forme de représailles. Et les entreprises qui les pénaliseraient pourraient devoir payer des amendes allant jusqu’à un million d’euros.

La réforme, qui a le soutien de la coalition au pouvoir, marquerait un tournant radical dans la traditionnelle culture allemande, fondée sur une approche que certains qualifient de paternaliste et collectiviste, dans laquelle employeurs et employés sont considérés comme faisant partie de la même « communauté ». À ce titre, toute tentative de dénoncer l’employeur pour certaines de ses actions est considérée comme une « trahison »… Ainsi, dans un cas qui a fait référence, une lanceuse d’alerte licenciée s’est vue déboutée au fil de plusieurs procès et appels, les juges allemands ayant déclaré qu’elle avait violé le « devoir d’allégeance » vis-à-vis de son employeur. Une décision cependant rejetée par la Cour européenne des droits de l’Homme, en 2011, qui a considéré que le verdict allemand était au contraire une violation de la liberté d’expression de la lanceuse d’alerte. Mais depuis cette décision clé, rien n’avait vraiment avancé dans la loi allemande sur ce sujet.

Auteur

  • Lys Zohin