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Les PME se convertissent à l’actionnariat salarié

Tendances | publié le : 23.05.2022 | Lys Zohin

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Partage de la valeur : Les PME se convertissent à l’actionnariat salarié

Crédit photo Lys Zohin

 

Selon les résultats de la 2e édition du « Panorama de l’actionnariat salarié dans les PME » Eres-OpinionWay, en six ans, l’actionnariat salarié a doublé dans les petites structures. Mais il reste encore à totalement démocratiser ces dispositifs.

Pas de quoi alléger les craintes vis-à-vis de la perte du pouvoir d’achat liée à l’inflation galopante, certes, mais de quoi – à terme – réconcilier les salariés français avec l’économie… Une évolution culturelle qui serait de taille si elle se confirmait ! Toujours est-il que le souhait, exprimé en 2017 par Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, de voir 10 % du capital des entreprises entre les mains des salariés – à un horizon indéterminé, cela dit – pourrait prendre forme.

Depuis le 22 mai 2019, en effet, la loi Pacte a notamment institué la baisse du forfait social de 20 % à 10 % sur l’abondement unilatéral de l’employeur versé aux salariés pour acquérir des actions de l’entreprise, la suppression du forfait social sur les sommes versées au titre de l’intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés et l’ensemble des versements d’épargne salariale pour les entreprises de moins de 50 salariés. Autant de mesures qui ont renforcé l’attrait de l’actionnariat salarié, en particulier auprès des petites et moyennes structures, principalement visées, les grandes l’ayant déjà largement adopté. Et la dernière enquête (2e édition du Panorama de l’actionnariat salarié dans les PME) de la société Eres, spécialiste de la distribution de solutions d’épargne, dans l’entreprise (PEE, PEI, PER d’entreprise) ou à titre individuel (PER individuel), avec OpinionWay, montre que les mesures portent leurs fruits, puisque sur une période plus longue, entre 2015 et 2021, l’actionnariat salarié a doublé dans les PME. Menée auprès de 418 entreprises non cotées du secteur privé de 20 salariés et plus, entre septembre 2021 et février 2022, l’étude fait ressortir que l’actionnariat salarié est passé, entre 2015 et 2021, de 4 % à 9 % d’équipement. Et sur ces 9 %, 36 % de ces entreprises dotées d’un dispositif affichent un taux de détention du capital par les salariés de plus de 10 %.

Des bénéfices économiques et RH

« Les bénéfices de l’actionnariat salarié sont perçus très positivement par les entreprises et cela se traduit dans les faits, indépendamment de la taille de l’entreprise ou de son chiffre d’affaires, relève Marie-Noëlle Auclair, directrice du Cube, le centre de recherche d’Eres. Mais seulement une entreprise sur trois connaît précisément les mesures de la loi Pacte en sa faveur. Un effort de pédagogie reste donc à déployer pour accélérer l’adoption de ce dispositif vertueux. » Un dispositif qui a en outre résisté à la crise induite par la pandémie, puisque 43 % des plans ont moins d’un an.

Mieux, dans les PME équipées de dispositifs en faveur de l’actionnariat salarié, ce système est d’abord considéré comme un bon outil pour accompagner la croissance. De fait, dans six cas sur dix, selon l’étude, le dispositif a été mis en place après trois ans d’existence seulement de l’entreprise. Et les trois quarts des organisations adoptantes soulignent également son efficacité pour motiver, impliquer et fidéliser les salariés. Les experts évoquent ainsi aussi bien une amélioration du dialogue social qu’une politique de rémunération plus juste et une meilleure responsabilité sociale et environnementale… Bref, que des avantages, pour l’entreprise, les salariés et la société civile dans son ensemble. D’ailleurs, selon les résultats de l’étude, non seulement plus de huit PME interrogées sur dix considèrent qu’associer des salariés au capital de l’entreprise est une bonne chose, mais neuf entreprises sur dix veulent renouveler l’opération, tandis que 56 % veulent l’amplifier.

Plans collectifs ou ciblés

Reste que si 8 % des entreprises déclarent vouloir ouvrir les plans à tous les salariés, pour l’instant, seuls 18 % sont totalement collectifs et 28 % des opérations ont été proposées à plus de 50 % des salariés. Les autres sont généralement réservées aux top managers, dans le cadre d’une philosophie ciblée, à l’anglo-saxonne. Si les membres de la direction sont effectivement censés avoir des intérêts à la hauteur de leurs responsabilités dans les organisations, pourquoi, cependant, une telle difficulté à associer l’ensemble des salariés ? Après tout, le travail de chacun des collaborateurs concourt à la création de valeur, et pourrait être reconnu de cette façon…

Parmi les freins mis en avant par les PME, les enjeux de confidentialité (44 %) viennent en premier, suivis de problèmes anticipés en matière de transmission de l’entreprise (41 %), en particulier dans les sociétés détenues par des familles. « Les craintes concernant la confidentialité des chiffres de l’entreprise peuvent et doivent être dépassées, a toutefois précisé Mathieu Chauvin, président d’Eres, lors de la conférence de présentation des résultats de la 2e édition du Panorama de l’actionnariat salarié dans les PME. D’autant que la transparence a de nombreuses vertus, ne serait-ce que pour informer les salariés de la situation financière réelle de l’entreprise. » Une meilleure information qui améliorerait la compréhension des enjeux – et des éventuels efforts demandés aux collaborateurs… Cela n’effacerait pas forcément les divergences d’intérêt qui peuvent exister entre direction et salariés, mais offrirait en tout cas une vision plus claire à ces derniers.

D’ailleurs, les experts sont confiants. Selon eux, l’actionnariat salarié devrait encore progresser dans les années qui viennent. « Compte tenu des intentions exprimées par les entreprises [lors de l’enquête], ce taux devrait passer à 12 % en 2025 », estime ainsi Mirela Stoeva, directrice des études au sein du Cube.

Un bon investissement pour les salariés

Enfin, alors que la progression des plans d’actionnariat salarié se poursuit dans le SBF 120 (voir encadré), Eres a également cherché à savoir si ces investissements, de la part des salariés, étaient une bonne affaire. Et la réponse est oui ! En étudiant la performance sur cinq ans des 249 opérations collectives réalisées entre 2006 et 2015 par 54 entreprises du SBF120, et en comparant le prix de souscription au prix de l’action cinq ans plus tard (et en intégrant les dividendes versés aux actionnaires au cours de la période des cinq ans), les gains (et pertes) ont été simulés en appliquant des taux d’abondement de 0 % ou de 100 %, et le résultat est positif. Les salariés ont été gagnants dans 81 % des cas avec décote, mais sans l’abondement, et dans 93 % des cas avec décote et un abondement de 100 %… Pas de quoi boucler les fins de mois, évidemment, mais de quoi, avec ces sommes, payer les études des enfants ou s’offrir de belles vacances à l’avenir…

Record historique pour les sociétés du SBF120

En 2021, 42 opérations collectives ont été menées par 37 entreprises (contre 40 en 2019, dernier record avant la crise de 2020) et trois entreprises ont réalisé leur toute première opération. « L’actionnariat salarié s’impose comme un pilier de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) et entre désormais dans les critères d’analyse environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Cette nouvelle donne incite les entreprises à proposer plus d’opérations d’actionnariat salarié, pour partager les fruits de la croissance », résume Mirela Stoeva, directrice des études au sein du Cube, le centre de recherche d’Eres. En outre, près de 65 % des opérations collectives réalisées en 2021 ont été abondées. Quant au taux de décote moyen, il est passé de 20 % en 2020 à 21,6 % en 2021. « Les premiers effets de la loi Pacte commencent à être visibles avec une hausse du taux de décote pratiqué. Treize entreprises sur les 37 ayant réalisé une opération en 2021 ont même proposé un taux de décote de 30 %, le nouveau plafond instauré en 2019 », ajoute Marie-Noëlle Auclair, directrice du Cube. Par ailleurs, le montant total souscrit a augmenté de 50 % sur l’année, passant de 2,5 milliards d’euros en 2020 à 3,7 milliards en 2021, un record historique. Et le montant moyen par salarié souscripteur a augmenté de plus de 1 000 euros de 2020 à 2021, passant de 4 540 à 5 600 euros. « La baisse du forfait social sur l’abondement destiné à acheter des actions de l’entreprise a largement profité aux salariés et permis aux sociétés de renforcer l’attractivité des plans d’actionnariat salarié proposés. En 2021, les entreprises du SBF120 ont proposé des enveloppes d’actions plus larges à moindre coût, assorties de conditions de souscription plus avantageuses pour leurs employés. Attention, toutefois, car ces allègements de charges devraient prendre fin en 2022… », précise Marie-Noëlle Auclair.

Auteur

  • Lys Zohin