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Politique salariale : La « révolution rémunération » est en marche

Tendances | publié le : 09.05.2022 | Gilmar Sequeira Martins

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Politique salariale : La « révolution rémunération » est en marche

Crédit photo Gilmar Sequeira Martins

Alors que les négociations annuelles obligatoires sont quasiment bouclées, l’inflation repart de plus belle… Les équipes RH risquent d’avoir autant de mal à recruter qu’à retenir les collaborateurs. À moins de trouver d’autres solutions que le salaire mensuel…

Désormais quasiment bouclées, les négociations annuelles obligatoires (NAO) risquent de faire grincer des dents les salariés. Et pour cause. Les prix à la consommation ne cessent de grimper. Le taux d’inflation atteint même des niveaux inédits depuis des années. Selon l’estimation provisoire réalisée à la fin mars par l’Insee, les prix à la consommation, sur un an, auraient ainsi augmenté de 4,5 % en mars, après une hausse de 3,6 % en février. Des données claires… Pourtant, souligne Cyril Brégou, associé du cabinet People Base CBM, spécialisé en rémunération et politique salariale, « il y a toujours des entreprises qui ne les prennent pas en compte pour les NAO, tandis que d’autres ne choisissent pas le bon taux. Elles appliquent leur taux à elles et l’on ne sait pas d’où il vient. D’autres ont un schéma qui inclut des niveaux d’inflation assez bas, autour de 1 % ».

Si l’on ajoute à cela la pénurie de main-d’œuvre, certains secteurs sont déjà clairement à la peine, poursuit ce spécialiste : « Les tensions structurelles montent en puissance, notamment dans les secteurs de l’hôtellerie-cafés-restauration (HCR) et de la construction. La branche HCR a bien conclu un accord de revalorisation salariale, mais il faut du temps pour que la nouvelle grille se diffuse et l’effet sera différent selon la taille des entreprises. Dans les TPE, les augmentations se feront au cas par cas et dans les plus grandes, l’effet de l’accord sera étalé dans le temps pour diluer l’impact du choc sur la trésorerie », explique-t-il.

Aggiornamento à faire

C’est sans délai que les dirigeants doivent procéder à un aggiornamento de leur vision, renchérit Coralie Rachet, directrice générale Walters People France : « Les entreprises doivent être conscientes que plus de la moitié des collaborateurs sont déçus par les augmentations salariales. Dès lors que les augmentations sont inférieures à 5 %, elles sont perçues comme insatisfaisantes puisqu’elles induisent pour les salariés le sentiment d’une perte de pouvoir d’achat. » Quant aux candidats à un poste, les études de Walters People indiquent qu’en l’absence de communication sur des augmentations à venir de la part des entreprises, plus d’un tiers (35 %) d’entre eux ne se présenteraient pas le premier jour à un poste, tandis que 31 % des salariés en période d’essai se disent prêts à accepter un autre poste s’il se présente… Autant dire que « la fidélité des salariés est un facteur de moins en moins présent. Le marché de l’emploi devient plus fluide et les salariés sont en position de force pour négocier. Et la majorité des augmentations passe par un changement de poste en interne ou par une mobilité externe », constate Coralie Rachet.

Le variable se diffuse

Si le phénomène est vrai pour tous les salariés, sur le marché des cadres, « la bataille s’annonce particulièrement rude et les entreprises trop soucieuses de leur seule masse salariale mettent en danger leur développement », relève de son côté Oualid Hathroubi, directeur du cabinet Hays Paris, pour ajouter : « Il faut s’attendre à une progression des rémunérations, car les candidats reçoivent désormais plusieurs offres et ont l’embarras du choix. » Signe des temps, le spécialiste note une évolution du variable, autrefois réservé aux métiers commerciaux. Ce paramètre de rémunération commence à se diffuser dans d’autres métiers dont la performance peut être individualisée. « C’est par exemple le cas dans les métiers de la finance, note ainsi Oualid Hathroubi. La part variable peut devenir un élément de recrutement, selon le niveau fixe de rémunération. Pour une personne à qui l’on offre un fixe annuel de 70 000 euros, un variable de 5 % ne sera pas décisif, mais ajouté à un fixe de 35 000 euros, cela le sera. En outre, le variable permet d’amener les salariés à une posture plus engagée. » Mais si la rémunération variable se développe et que des compléments de rémunération ne sont pas à exclure au fil de l’année, ces derniers restent, malgré tout, peu probables… « Toute augmentation, sous quelque forme que ce soit, est irréversible et les entreprises voient bien que l’inflation va réduire leurs marges », rappelle Cyril Brégou. De leur côté, les pouvoirs publics rechigneraient à favoriser l’augmentation des salaires de peur de créer un effet en chaîne sur l’inflation, qui ne ferait qu’aggraver en conséquence la situation des entreprises.

Une année difficile pour les RH

Pour Cyril Brégou, l’une des conséquences possibles à cette situation pourrait bien être… une augmentation du turn-over dans les entreprises. « Ce sera une année difficile pour les RH, estime-t-il, car à la question de la rémunération s’ajoutent tous les éléments liés aux nouvelles manières de travailler. » Autant dire que les services RH ont intérêt à réfléchir, au-delà de la simple rémunération, sur l’amélioration des conditions de travail s’ils veulent fidéliser les collaborateurs et ne pas passer leur temps à recruter, toujours et encore, pour remplacer ceux qui partent…

Auteur

  • Gilmar Sequeira Martins