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« L’entreprise doit être équitable »

À retenir | publié le : 09.05.2022 | Lys Zohin

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« L’entreprise doit être équitable »

Crédit photo Lys Zohin

Pour le directeur développement de Primeum, un cabinet de conseil en rémunération variable pour les entreprises, l’idée de dividende salarié qui fait actuellement son chemin ne doit pas, pas plus que le variable, se substituer aux augmentations salariales.

Alors que le pouvoir d’achat est une priorité pour nombre de ménages, certains experts promeuvent le dividende salarié. Quelle est votre opinion ?

Difficile d’être contre l’idée de partager la valeur avec les salariés en parallèle des dividendes servis aux actionnaires lorsqu’une entreprise gagne de l’argent ! D’autant que, précisément, si elle gagne de l’argent, les salariés y sont pour quelque chose ! En outre, les avantages fiscaux de cette pratique sont clairs : les dividendes sont moins fiscalisés, en termes de charges sociales, que les salaires, et après cinq ans de détention, il n’y a pas d’impôts du tout. Cela dit, la façon dont les promoteurs actuels présentent le sujet – avec des conditions de versement qui seraient de facto obligatoires – risque de poser des problèmes aux organisations qui sont visées, autrement dit, les PME, les grandes entreprises ayant l’obligation d’adopter un dispositif de partage de la valeur, sous forme, notamment, d’intéressement et de participation. En outre, on peut penser que les organisations patronales vont demander des contreparties, par exemple une baisse du forfait social. Ce qui aura, si elles obtiennent satisfaction, un impact sur les rentrées fiscales de l’État, avec un non-perçu… Par ailleurs, le dispositif promu par Thibault Lanxade dans son ouvrage Participation et intéressement : le dividende salarié, n’est pas très clair. Il veut ainsi convaincre les PME de proposer de l’intéressement et souhaite que la participation soit rendue obligatoire dans les entreprises de 11 à 50 salariés et que le montant à partager soit plus élevé, en changeant la formule, en l’occurrence en supprimant la division par deux des bénéfices dans le calcul. Mais quid des entreprises de moins de 11 salariés ? Doivent-elles se contenter de miser sur la prime Macron ? Cette prime de pouvoir d’achat, dite PEPA, permettant à l’employeur ayant conclu un accord d’intéressement de verser une prime exceptionnelle au salarié dont la rémunération est inférieure à trois fois le montant du Smic, semble en effet être vouée à être pérennisée…

Ces dispositifs se négocient généralement avec les partenaires sociaux…

Et précisément, les petites entreprises n’ont pas de représentants du personnel. Ce qui n’empêcherait pas le calcul d’être effectué par l’agent comptable…

Ces idées, qui promettent le versement de fonds différé, sont-elles de nature à satisfaire les salariés, qui ont du mal à boucler leurs fins de mois ?

Ces versements ne peuvent en effet qu’être en parallèle d’une augmentation des salaires… C’est vrai pour certains secteurs caractérisés par de faibles rémunérations et de mauvaises conditions de travail, et qui en outre, ont peu de tâches télétravaillables, mais aussi pour tous les salariés, du fait d’un taux d’inflation qui ne cesse de grimper. Les entreprises vont devoir trouver les moyens d’augmenter les salaires et d’offrir de meilleures conditions de travail, sous peine, sinon, de connaître de réelles difficultés, que l’on voit déjà, en matière d’attractivité et de rétention des talents.

Votre cabinet est spécialisé dans le conseil en rémunération variable. Quelles sont les tendances qui se dégagent ?

La rémunération variable, commune pour les commerciaux, par exemple, touche de plus en plus de salariés. Selon notre baromètre, publié fin 2021, 39 % des fonctions support et 32 % des administratifs ont déjà une part variable dans leur salaire. Car on peut juger de la quantité, mais aussi de la qualité du travail pour activer une rémunération variable. D’ailleurs, de plus d’entreprises font appel à notre cabinet, car il est dans leur intérêt de reconnaître la performance sous cette forme.

Mais ne craignez-vous pas que cette tendance au variable se fasse au détriment du fixe ?

En effet, il ne faut pas que cela soit le cas, puisqu’il s’agit, comme je l’ai dit, de récompenser les meilleurs éléments dans l’entreprise, ceux qui performent le mieux, avec un variable. Par ailleurs se pose la question des écarts de salaires. Fabriquer des écarts de 10 %, par exemple, avec des variables, est possible, et l’on sait que le monde de l’entreprise n’est pas égalitaire, mais attention à ne pas créer des tensions entre collaborateurs, qui conduiraient à un manque de cohésion des équipes. Si l’entreprise n’est pas égalitaire, elle doit être équitable…

Auteur

  • Lys Zohin