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Inégalités femmes-hommes : le poids des mentalités

Les clés | À lire | publié le : 07.03.2022 | Lydie Colders

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Inégalités femmes-hommes : le poids des mentalités

Crédit photo Lydie Colders

Dans Patriarcapitalisme, Pauline Grosjean, économiste spécialisée dans la question du genre, analyse la domination culturelle qui maintient les femmes sous un plafond de verre. Et donne des pistes pour en sortir. Un manifeste féministe argumenté.

Les années 1980 ont été marquées par une progression fulgurante de la vie professionnelle des femmes, qui ont pu accéder, en montant en diplômes et dans la hiérarchie, à des postes de cadres, aux États-Unis comme en France. L’écart salarial entre femmes et hommes est ainsi passé de 30 % à 14,5 % en France aujourd’hui, rappelle Pauline Grosjean. Mais comment expliquer que ce taux stagne depuis les années 1990 ? Dans son livre militant, cette enseignante spécialisée dans l’inégalité de genre, basée en Australie, plaide pour des mesures afin de s’attaquer à la domination patriarcale et aux stéréotypes sexués. « L’obstacle majeur à l’égalité femmes-hommes dans l’économie tient aujourd’hui à la culture et à l’identité de genre », dit-elle. Citant des études internationales, elle analyse les représentations favorables aux hommes au travail – les qualités « masculines » de force sont ainsi valorisées – et une certaine discrimination féminine, dans l’informatique ou l’industrie. La chercheuse soutient même que « dans le système patriarcapitaliste, le féminin est systématiquement dégradé et dévalué ». En clair, les femmes sont sommées de s’orienter vers des professions considérées comme « simples » (enseignement, services) et donc moins bien payées.

L’injustice d’être mère

Sans surprise, le plafond de verre tient toujours « à la pénalisation » d’être mère, en Allemagne notamment, relève l’enseignante. Si le congé parental pour les hommes fonctionne dans certains pays nordiques, elle y voit dans l’ensemble un échec pour changer les mentalités. Qu’il soit pris ou non, la charge familiale reste toujours dévolue aux femmes… « Il nous faut donc repenser le travail, sans cela, les femmes n’arriveront jamais en haut de la hiérarchie sociale », assure-t-elle. Et ce d’autant que les horaires à rallonge favorisent les carrières masculines les plus rémunérées : « En 2006, 62 % de ceux qui gagnaient les plus hauts revenus travaillaient 50 heures par semaine. » Et « on ne trouve que 20 % de femmes à ces postes », en raison des enfants…

Quotas à tous les étages

Pour Pauline Grosjean, la culture d’entreprise reproduit inconsciemment ce clivage sexué des recrutements et des carrières. Pour en finir, elle approuve l’obligation faite aux entreprises de publier leurs résultats en matière d’égalité salariale et de promotion des femmes et des hommes. Ce dispositif existe en Australie depuis 2001, mais la France n’a fait que très récemment des progrès en ce sens, avec son index d’égalité professionnelle. Et il devrait être « une mesure systématique », plus « détaillée ». Les quotas de femmes dans les conseils d’administration et les instances dirigeantes ? Elle salue une « étape » nécessaire, mais en nuance les effets : parce que ces cadres sacrifient leur vie de famille, leur représentation n’entraîne « pas de politiques plus favorables pour concilier famille et carrière » dans l’entreprise… Garantir la progression des femmes dans l’économie requiert donc une politique plus large. Qui passe, pour l’auteure, par des solutions de garde d’enfants adaptées, et « par une garantie de progression et de représentation féminine à tous les échelons intermédiaires » en entreprise. Pourquoi pas des quotas dans l’ensemble des niveaux hiérarchiques ? Une idée aussi intéressante qu’ambitieuse…

Auteur

  • Lydie Colders