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Une génération à engager

Chroniques | publié le : 21.02.2022 |

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Une génération à engager

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Benoît Serre vice-président délégué de l’ANDRH

Depuis des années et encore plus aujourd’hui, la question de l’engagement de la génération montante se pose. On entend beaucoup de propos caricaturaux sur cette jeunesse qui ne s’engagerait plus autant que la précédente – mais cela se dit à chaque génération… En fait, chaque nouvelle génération s’engage autant que la précédente, mais, historiquement, elle change la forme de son engagement comme une partie du fond. C’est cette évolution des critères qui perturbe et crée le doute ou l’inquiétude.

L’impact de la crise Covid est cependant venu donner une nouvelle intensité à ce débat récurrent. Il apparaît en effet que l’évolution actuelle se révèle particulièrement forte, sous le double effet de la révélation des faiblesses structurelles de nos modèles de management et de l’accès permanent à toutes les informations générales. Les causes d’engagement sont autant dans l’entreprise qu’en dehors et si cette dernière n’adopte pas celles que le salarié estime nécessaires ou cohérentes par rapport à ses valeurs ou ses croyances, il va parfois reprocher à son employeur de manquer à des combats, voire aller chercher ailleurs… Cette distorsion entre ce que je crois et ce que je fais peut-être une source de désengagement comme une source de déception. En effet, tant la crise Covid que les évolutions liées à des sujets comme l’éducation, le débat politique, l’ouverture aux enjeux du monde, la conscience environnementale, l’envie de solidarité, la passion de l’équité, sont venues cristalliser des attentes pourtant déjà présentes, mais sans doute trop dispersées. La nouvelle génération croit dans l’entreprise, qui est devenue plus que jamais un lieu de confiance ces deux dernières années. Les entreprises ont su prouver de manière incontestable qu’elles savaient prendre soin de leurs collaborateurs et les protéger sans pour autant négliger leurs activités. Elles ont prouvé cette nouvelle capacité de traiter à égalité l’humain et l’économique, le social et la performance. Il est donc normal qu’après avoir apporté ces preuves de leur aptitude à se transformer et à s’engager pour leurs équipes, elles soient désormais confrontées à une exigence d’autant plus forte qu’on les sait capables de relever ces défis – mais le feront-elles en dehors de la crise, mues par la volonté stratégique et non sous l’effet de l’urgence ?

La génération montante s’engage en ayant conscience de tout cela et exige donc un engagement protéiforme de leur employeur dans lequel elle pourra se reconnaître et… s’engager à son tour. En revanche, si elle ne le constate pas, sa capacité à se désengager est aussi forte que celle qui lui permet de s’enthousiasmer ou de prendre toute sa part dans les combats humains que lui offre son employeur. D’une certaine manière, cette nouvelle génération ne conçoit plus le monde du travail sans cette alliance indispensable entre le social et l’économique qui pourtant existe déjà et est revendiquée depuis longtemps par certaines grandes organisations.

Cette génération est sans doute capable de s’engager plus qu’aucune autre quand elle y croit, mais surtout quand elle peut s’y associer. C’est cela qui change. Elle entend être active et reconnaît à l’entreprise un rôle central pour participer à relever les défis du monde tout en exigeant d’y jouer sa propre partition. Elle le fera de toutes les manières. Et tout l’enjeu des dirigeants est de lui permettre de le faire dans l’entreprise, sinon, elle réalisera cet engagement ailleurs et autrement. C’est donc l’ensemble de la « chaîne de valeur » qui est ainsi interrogée. Des choix de l’entreprise à son modèle de management, qui doit évidemment s’adapter à ces nouvelles aspirations, c’est tout notre fonctionnement qui est questionné – perturbé parfois – par cette génération qui entend assumer sa responsabilité dès lors qu’on lui en donne la liberté, les moyens et l’exemple. Sous ces trois conditions, sa capacité d’engagement dans l’entreprise dans sa dimension économique sera aussi performante que sa volonté d’action sociale et sociétale. Cette génération veut incarner le fait que l’un ne va pas sans l’autre… comme une évidence et une obligation à l’égard de tous. Elle y arrivera sûrement, car la génération qui vient gagne toujours à la fin, malgré les freins et les craintes !