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Sur le terrain

Temps de travail : LDLC surfe sur la vague de la semaine de quatre jours

Sur le terrain | publié le : 14.02.2022 | Frédéric Brillet

Un an après la mise en œuvre de cette nouvelle organisation du travail, le PDG de cette société spécialisée dans la vente à distance de matériel informatique dresse un premier bilan très positif de la conversion. Et 97 % des salariés apprécient le système.

« Et si, dans le groupe, on travaillait tout le temps quatre jours par semaine, qu’est-ce que cela changerait ? » C’est la question que se pose Laurent de la Clergerie, fondateur et PDG de LDLC, en apprenant fin 2019 que Microsoft, qui a testé la semaine de quatre jours au Japon durant un mois, a enregistré un fort gain d’efficacité. Lui qui s’intéressait déjà à ce système en vogue en Suède et en Nouvelle-Zélande décide de sauter le pas.

Dans la foulée des NAO de 2020, la direction commence donc à discuter avec les syndicats. Les négociations avancent vite : la CFE-CGC, la CFDT et la CGT signent un accord qui prévoit d’instaurer la semaine de quatre jours dès le 25 janvier 2021, jour anniversaire des 25 ans de LDLC. Quelque 800 des 1 000 salariés que compte ce groupe composé de plusieurs filiales passent alors aux 32 heures – sans baisse de salaire. La mise en œuvre mobilise en amont tous les métiers de l’entreprise qui ont travaillé sur l’organisation de leurs plannings respectifs. Ceci afin que les clients internes ou externes au groupe ne voient pas de différence sur le service rendu. Chaque équipe définit en toute autonomie son organisation en tenant compte de cette contrainte. Autre contrainte, le troisième jour de congé doit être fixé une fois pour toutes sur l’année pour chaque collaborateur. Le vendredi et le lundi étant très demandés, des rotations sont souvent organisées au sein d’un même service. In fine, les règles d’organisation diffèrent d’un service à l’autre : certains imposent un jour fermé au congé (souvent le mardi) pour se donner la possibilité de se réunir sans « absents », d’autres non. Ces discussions ont aussi amené les salariés à s’interroger sur la pertinence de certaines exigences et à introduire davantage de souplesse dans les délais de réponse. « Nous avons pris conscience que pour beaucoup de choses qui n’affectent pas la qualité de service, nous pouvions attendre 24 heures », précise ainsi Laurent de la Clergerie.

Dans le nouveau système, les cadres au forfait jours ont perdu leurs RTT et la possibilité de les poser quand cela les arrangeait, mais ont gagné bien plus de jours en échange.

Heures supplémentaires

Par ailleurs, LDLC compte et paie désormais les heures supplémentaires à partir de la 32e heure. Cette particularité améliore l’équité entre salariés : en effet, dans l’ancien système, sur les périodes chargées, LDLC mobilisait régulièrement des volontaires pour renforcer des équipes le samedi et finir le travail de la semaine. Mais les salariés ayant des enfants ou des obligations familiales pouvaient difficilement en profiter. « Le fait d’avoir des jours off en semaine leur permet de faire des heures supplémentaires et nous évite de recourir à l’intérim », souligne le dirigeant.

Un an plus tard, la direction de LDLC ne regrette en rien sa décision. D’abord, parce que dans un sondage interne, 97 % des salariés se disent satisfaits du nouveau système. Même la section CGT de LDLC se félicite des mesures prises par le président… Ensuite, parce que les résultats du premier semestre 2021 attestent que cette nouvelle organisation du travail n’a pas empêché la société de prospérer, le chiffre d’affaires consolidé se hissant à 333,5 millions d’euros. Constatant que le passage aux 32 heures n’avait rien coûté à l’entreprise, LDLC a pu réévaluer les bas salaires de 10 % en moyenne à l’issue des NAO de 2021 (le plus bas étant désormais à 1 940 euros brut) et de 3,5 % pour les autres. Cette politique sociale n’a pas non plus nui aux bénéfices, puisque LDLC demeure l’une des sociétés les plus rentables de son secteur en 2021.

Des salariés plus reposés

Le premier à s’en étonner est le PDG. En se fondant sur un simple calcul économique, le passage aux 32 heures à salaire égal aurait dû affecter négativement les coûts et la production, puisque les collaborateurs travaillent moins longtemps tout en étant mieux payés à l’heure. « Mais ce type de calcul n’intègre pas le paramètre de la fatigue. Nous nous sommes aperçus que les salariés mieux reposés devenaient très vite plus productifs. Avec la semaine de quatre jours, ils ont le temps de récupérer, pas avec celle de cinq jours », dit-il. Ainsi, LDLC pensait devoir renforcer ses équipes logistiques pour compenser les heures de production perdues. Cela n’a pas été nécessaire. « Les équipes fatiguant moins, elles n’ont plus de coups de mou et la production n’a pas baissé », conclut Laurent de la Clergerie.

Auteur

  • Frédéric Brillet