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Dialogue social : la valeur de l’équilibre

Chroniques | publié le : 24.01.2022 | Benoît Serre

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Dialogue social : la valeur de l’équilibre

Crédit photo Benoît Serre

 

Par Benoît Serre vice-président délégué de l’ANDRH

Depuis quelques jours, les déclarations se succèdent sur les avancées ou les reculs posés par les ordonnances travail de 2017. Certaines organisations syndicales ont pris des positions plutôt cohérentes entre elles et qui visent surtout à en identifier les défauts et faiblesses. Il est déjà intéressant de constater qu’au moins la rénovation du dialogue social voulue par ces ordonnances est en débat. C’est assez nouveau de pouvoir ouvertement discuter non seulement du fond mais aussi des formes de ce dialogue ancré historiquement et source de tensions immédiates à la seule idée d’y toucher.

Reconnaissons que la première vertu de ces ordonnances est sans doute d’avoir osé remettre en cause une structure de dialogue que chacun croyait immuable tant ce sujet est source de polémiques.

Mais au-delà de la forme, c’est évidemment sur le fond qu’il faut tenter de tirer des enseignements de cette réforme et notamment en raison de la crise sanitaire que nous vivons. En effet, le modèle posé par les ordonnances visait notamment à fluidifier le dialogue, à en responsabiliser plus fortement les acteurs et à lui donner une dimension réelle au plus près de l’entreprise. Ces trois objectifs restent cohérents et souhaitables, car nous avons pu constater quasiment au quotidien durant ces derniers mois combien la capacité à passer des accords de terrain, ancrés dans la réalité de l’entreprise face à la crise, était essentielle et crédible. D’une certaine manière, ce test grandeur nature d’un dialogue social impérativement opérationnel a démontré sa valeur. Nombreux sont les DRH qui estiment que leur dialogue social a été particulièrement positif et constructif pour faire face tous ensemble aux conséquences de la crise sanitaire. Il suffit pour cela de se souvenir du premier confinement où nous avions vu fleurir les droits de retrait puis le second où ils avaient quasiment disparu. Cette évolution montrait que recentrer le dialogue social sur l’entreprise elle-même et ses salariés en l’éloignant de sa « politisation » lui redonnait son sens et son rôle premier : représenter les salariés auprès de la direction pour trouver conjointement des solutions d’équilibre entre les intérêts parfois divergents des uns et des autres. Certes, l’urgence commandait alors, mais justement, c’est ce qui fait sans doute la seconde valeur de ses ordonnances : elles permettent de gérer au rythme dicté par les circonstances les décisions à prendre dans le respect et l’écoute des intérêts communs.

Fort de ces constats, la question est donc de savoir si, in fine, ces nouvelles dispositions permettent d’instaurer durablement un dialogue social adapté à notre temps, à sa transformation comme à ses perturbations. Nous serions tentés de répondre par l’affirmative, car en plus de concentrer le dialogue sur le terrain, ces ordonnances font la part belle et principale au principe de l’accord majoritaire dans chaque entreprise. C’est là sans doute la meilleure des avancées, car elle définit clairement la démocratie sociale d’entreprise avec une répartition des rôles adaptée entre direction et représentants du personnel. C’est une lourde responsabilité conjointe de trouver le juste équilibre qui permet d’agir et non de s’opposer ou de se ralentir mutuellement. Il faut noter que les critiques syndicales des ordonnances mettent aussi l’accent sur la nécessaire formation des élus. C’est logique, puisque pour exercer pleinement cette responsabilité du juste équilibre, il faut évidemment développer connaissances et compétences des représentants.

Pour que ces ordonnances consacrant le principe majoritaire de terrain puissent donner la pleine puissance des évolutions qu’elles permettent, il faut sans doute aller encore plus loin en donnant à celles et ceux (entreprises et représentants du personnel) qui font l’effort d’aller chercher un accord majoritaire un avantage, comme la validation de principe de l’Administration ou une fiscalité plus avantageuse dans l’application des accords. Il est en effet temps d’être ambitieux et novateur jusqu’au bout, en reconnaissant concrètement que l’équilibre partagé et acté des relations sociales constitue la meilleure garantie de leur qualité comme de leur efficacité !

Auteur

  • Benoît Serre