« Il fallait tirer les enseignements de la crise sanitaire qui nous a offert l’occasion d’accélérer la transformation de l’entreprise », résume Christophe Carval, directeur des ressources humaines du groupe EDF, en évoquant la récente signature d’un accord collectif sur les nouvelles modalités de travail et de management. D’une durée de quatre ans et applicable à tous les salariés d’EDF SA, il est issu de la démarche TAMA (Travailler autrement, manager autrement). Elle responsabilise les équipes sur leur mode de fonctionnement en cherchant à concilier performance et bien-être. Selon le DRH, l’accord a aussi le mérite « de renforcer notre attractivité auprès des jeunes candidats », sensibles à la qualité de vie au travail. D’autant qu’il promeut également un usage équilibré et maîtrisé du numérique, la pérennisation de modalités innovantes de dialogue social (en distanciel) et le développement de solutions de mobilité moins carbonées.

Concernant le télétravail, il est spécifié que chaque collectif de travail doit produire une analyse partagée entre salariés et manager de proximité pour décider de ce qu’il est possible de mettre en place, pour faciliter la journée de travail, améliorer le confort et/ou la performance. Ainsi, un conseiller clientèle pourra arriver plus tard et finir plus tard ou l’inverse. Dans certains métiers, les collaborateurs pourront télétravailler jusqu’à 50 % de leur temps. Des agents de terrain auront le droit de prendre leur poste le matin directement sur le chantier qui leur est assigné sans avoir à pointer au préalable dans le centre EDF auquel ils sont rattachés. Et éventuellement, ils conserveront le soir le véhicule de service si cela les rapproche le lendemain du site où ils doivent intervenir. Le syndicat Alliance CFE UNSA Énergies tenait à pérenniser les nouveaux modes de travail et de management développés pendant la crise sanitaire, convaincu « qu’un retour au monde d’avant était impensable pour les salariés », indique Amélie Henri, déléguée syndicale centrale EDF SA. Et Christophe Carval estime que tout le monde y gagne. « Le salarié gagne en confort de vie en réduisant ses déplacements, ce qui a aussi des répercussions positives sur notre bilan environnemental, on perd moins de temps et on améliore la performance », dit-il.

Cet accord est une première chez l’électricien en ce sens qu’il s’applique de manière décentralisée. « Il s’adaptera aux aspirations et possibilités des quelque 6 000 collectifs de travail que compte EDF SA », poursuit le DRH. Chaque collectif, qui emploie entre 20 et 50 salariés sous la tutelle d’un manager de première ligne, pourra donc construire un projet d’équipe adapté à son activité. Autre spécificité, TAMA amène chaque manager de proximité à construire avec ses collaborateurs de nouvelles manières de travailler. Ce qui va encourager l’autonomie à laquelle de nombreux salariés n’entendent pas renoncer après y avoir goûté pendant la crise sanitaire.

Quant au « manager autrement », il s’attaque à la réunionite. Avant la pandémie, « les réunions étaient souvent trop longues, trop nombreuses et pas toujours bien préparées », pointe Christophe Carval. L’hybridation a changé la donne en poussant à la rigueur et à l’efficacité et en réduisant le temps perdu lié aux déplacements. Dans le département RH, 30 % des réunions se font en pur distanciel. Et tous les CSE centraux se font en mode mixte. « Le pli est pris, c’est quelque chose de durable. La pandémie nous a montré que c’était possible », conclut-il.

Du côté des partenaires sociaux, trois syndicats – la CFDT, CFE-CGC et FO – ont signé l’accord après de longues négociations et parfois quelques réserves. Pour la CFE-CGC, la démarche TAMA est un réel changement de paradigme, mais elle regrette que la négociation ne soit pas allée plus loin sur le rôle des observateurs devant s’assurer du bon déploiement de TAMA, la place de la médecine du travail dans sa mise en œuvre et le dialogue manager-managé en cas de suspension individuelle ou collective d’une des mesures prises. Et espère une « bonification avec le temps » sur ces sujets.

En attendant, il reste à faire entrer ce « manager et travailler autrement » dans les mœurs. Chaque collectif de travail devrait parvenir à une déclinaison de l’accord d’ici six mois. Pour encourager le mouvement, EDF a lancé sur son intranet un site qui va accompagner les managers dans l’établissement du diagnostic et la déclinaison de l’accord TAMA sur le terrain.