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Insertion : Changer le regard sur les personnes éloignées de l’emploi

Le pont sur | publié le : 27.12.2021 | Nathalie Tissot

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Insertion : Changer le regard sur les personnes éloignées de l’emploi

Crédit photo Nathalie Tissot

La crise sanitaire a davantage isolé les publics écartés du marché du travail. Mais, outre une réflexion sur l’accès, une autre, plus large, s’impose sur l’environnement économique et les conditions de travail offertes. Quoi qu’il en soit, les acteurs de l’insertion se mobilisent.

À la Croix-Rouge Insertion, de nombreuses places restent désespérément vides. « Aucune de nos structures à l’heure actuelle n’atteint son objectif en nombre de personnes accompagnées, c’est un enjeu considérable », constate avec dépit Chloé Simeha, la directrice générale de cette entité créée au sein de l’association il y a dix ans. Et ce, alors que la stratégie d’action contre la pauvreté du gouvernement prévoit le financement de 100 000 salariés supplémentaires dans le secteur de l’insertion par l’activité économique (IAE)… « C’est terrible, le nombre de bénéficiaires des minima sociaux augmente, mais on a du mal à faire correspondre l’offre d’insertion et les besoins », ajoute la directrice.

Au troisième trimestre 2021, le taux de chômage de longue durée atteignait 2,4 % de la population active (hors Mayotte), selon l’Insee. Plus qu’en 2020. Et le nombre de bénéficiaires du RSA, qui ne comptabilise pas les moins de 25 ans, avoisine toujours les deux millions. Pour améliorer sa visibilité auprès des plus démunis, La Croix Rouge Insertion a lancé un projet en Île-de-France, de même qu’en Bretagne, en Nouvelle-Aquitaine, en Occitanie et à La Réunion. Il vise à former des bénévoles participant par exemple aux aides alimentaires, vestimentaires, etc., afin qu’ils puissent identifier des bénéficiaires éloignés de l’emploi et les orienter vers des dispositifs d’insertion professionnelle. Un rôle de mentor qui permet « une approche de soutien inconditionnel et de suivi au long cours du parcours de la personne », souligne Chloé Simeha.

Maladie, séparation, déboires judiciaires, addiction, garde d’enfants… au cours d’une vie, les raisons de se retrouver sans activité pendant de nombreux mois, voire des années, sont multiples. Le chemin du retour au travail est parfois long et semé d’embûches. L’Association pour la réinsertion économique et sociale (Ares) accompagne chaque année près d’un millier de personnes en situation d’exclusion, orientées par Pôle emploi, les missions locales ou des associations. Dans les secteurs de la logistique, de l’économie circulaire ou des services numériques, elles suivent un parcours de 15 mois en moyenne. Leur point commun, selon Fabien de Castilla, le codirecteur de l’Ares : « La motivation à s’en sortir, à retrouver un équilibre. » Comme Mariama, agente de sécurité pour Vinci sur le chantier de la ligne 18 du métro du Grand Paris… Le leader français du BTP figure parmi les 250 clients de l’Ares, aux côtés d’autres grandes entreprises telles que la SNCF, La Poste, Axa, et de PME comme la marque de baskets Veja ou Gobilab, qui produit des gourdes made in France. En 2018, Vinci a monté avec le groupe d’entreprises tremplins une joint-venture sociale, Liva, spécialisée dans la logistique de chantiers, qui emploie 150 salariés en insertion par an. « Je considère qu’une entreprise, quelle que soit son activité, est d’abord un corps social qui est là pour intégrer et faire grandir, soutenait Xavier Huillard, PDG de Vinci, lors des 30 ans de l’Ares, fêtés début novembre. Certains de nos collaborateurs ont besoin d’un accompagnement probablement plus fort que d’autres, mais il ne faut pas faire trop de distinctions », poursuivait-il, en vantant, entre autres, l’efficacité de Vinci insertion pour l’emploi (ViE), une société qui met en lien les filiales du groupe et le monde de l’insertion. « L’important est de faire en sorte que l’action sociale et sociétale soit perçue au niveau local comme étant véritablement un levier de performance économique », précisait-il.

Lutter contre les préjugés

« Aujourd’hui, nous avons un fort engagement des dirigeants qui ont compris l’intérêt sociétal de s’engager dans des démarches d’inclusion », confirme d’ailleurs Fabien de Castilla, qui relève cependant davantage de difficulté à convaincre les opérationnels chargés du recrutement. Les stéréotypes sur les fragilités de ce public et la qualité de leur travail perdurent… « Nous leur montrons que ces personnes peuvent apporter de la richesse, de la diversité dans les équipes, et qu’elles sont extrêmement motivées », défend le codirecteur de l’Ares. À la sortie de leur parcours, deux tiers des salariés en insertion décrochent un contrat ou une formation. Cette dernière est souvent indispensable pour se réinsérer en entreprise, tant le diplôme importe. La Croix-Rouge Insertion, qui compte dans certains de ses établissements plus de la moitié de personnes n’ayant pas travaillé depuis plus de sept ans, a ainsi récemment créé un parcours pour intégrer un institut de formation d’aides-soignants.

Auteur

  • Nathalie Tissot