logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

L’actualité

« Il faut créer un environnement bienveillant où la prise de risque est considérée comme une valeur »

L’actualité | publié le : 27.12.2021 | Lys Zohin

Image

« Il faut créer un environnement bienveillant où la prise de risque est considérée comme une valeur »

Crédit photo Lys Zohin

Ce chercheur à l’université de Valence et à Rennes School of Business appelle à chouchouter les salariés les plus créatifs, tout particulièrement « volatils ». Ils apportent à l’entreprise dynamisme et idées nouvelles, mais si on les prend à rebours, ils sont les premiers à quitter le navire, alors que certains secteurs font face à un fort turnover…

À quoi reconnaît-on un salarié curieux, créatif, ouvert aux expériences nouvelles ?

On le reconnaît assez facilement. Une personne qui aime prendre des risques et en même temps supporte mal l’autorité de son supérieur est souvent une personne créative. Typiquement, au restaurant, c’est quelqu’un qui prendra le plat le plus exotique. Au bureau, il choisira de travailler sur les projets innovants, risqués. Il s’adaptera à des tâches variées, fera preuve d’autonomie. Revers de la médaille, il aura souvent du mal à respecter les règles et ne travaillera pas facilement en équipe. Les psychologues ont créé des échelles de mesure qui permettent de mettre en évidence les traits de caractère des salariés et qui aident à repérer ces personnes créatives de manière systématique.

L’organisation des entreprises et leur culture les empêchent-elles de donner toute leur place à ces collaborateurs – en limitant les prises d’initiatives, en n’écoutant pas leurs suggestions, bref, en ne leur laissant pas assez d’autonomie ? Quels sont les risques ?

Le risque le plus important est qu’ils quittent l’entreprise s’ils en ont la possibilité, ce qui oblige à identifier de possibles remplaçants, à les recruter, à les former, à améliorer l’environnement pour éviter que ces derniers ne partent à leur tour. C’est un processus très coûteux pour l’entreprise. Si, alors que leurs spécificités ne sont pas prises en compte, ces salariés créatifs restent cependant en poste, la situation est aussi problématique. Ce sont des personnes particulièrement attentives à leurs sentiments intérieurs. Ils ont besoin de s’engager affectivement, de prendre plaisir à leur activité, d’y trouver du sens. Pour eux, la question de la rétribution financière ou des honneurs est moins centrale que pour d’autres. Lorsqu’ils perdent leur motivation intrinsèque pour leurs tâches, ils vont devenir impatients, irritables. Certains peuvent aller malheureusement jusqu’à saboter leur travail.

Quels sont vos conseils pour que l’entreprise profite pleinement de ces talents, précieux en cette période de reprise mais de concurrence accrue ?

La recherche que nous avons menée1 met en évidence plusieurs éléments. Il faut d’abord créer un environnement bienveillant où la prise de risque est considérée comme une valeur, où les audacieux ne sont pas pénalisés en cas d’échec. C’est fondamental pour « activer » la créativité des employés les plus ouverts. Il faut par ailleurs veiller à leur rappeler régulièrement le sens de leur activité, en leur offrant notamment la possibilité de rencontrer les destinataires finaux de leur travail. Leurs besoins d’autonomie et de variété doivent également être pris en compte. Il s’agit de les laisser s’organiser de la manière la plus flexible possible, en autorisant le travail à distance, en leur donnant du temps pour leurs projets personnels. Leur permettre de participer simultanément à différents projets, d’occuper successivement des postes diversifiés dans l’entreprise est aussi une bonne idée. Enfin, la constitution des équipes doit être l’objet d’une attention particulière. Les personnes les plus créatives aiment travailler avec des personnes qui leur ressemblent, mais de telles équipes, qui peuvent avoir une multitude d’idées nouvelles, auront ensuite le plus grand mal à les mettre en œuvre. Il faut arriver à coupler des personnes créatives avec des personnes au profil plus classique, par exemple des chefs de projets, habiles à serrer les boulons.

(1) Enhancing organisational commitment through task significance : the moderating role of openness to experience, de Fernández-Mesa, Llopis, García-Granero, Olmos-Peñuela, European Management Journal, 2020.

Auteur

  • Lys Zohin