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« Le centre de gravité du travail a changé »

L’actualité | publié le : 29.11.2021 | Lys Zohin

Business partner au sein du cabinet de conseil One Man Support, Pierre-Yves Martin décrypte l’état d’esprit des nouvelles générations face au travail – que les employeurs doivent prendre en compte…

Avez-vous, dans votre pratique, noté de nouvelles tendances chez les jeunes face à l’emploi ?

Au-delà du fait que nombre de jeunes ont été victimes de la crise sanitaire, que ce soit dans la poursuite de leurs études, l’obtention d’un stage, la recherche d’un poste ou leurs premiers pas en télétravail, je constate qu’ils perçoivent le travail différemment. Non seulement veulent-ils du sens et un alignement avec leurs désirs, dont un meilleur équilibre vie professionnelle/vie personnelle, mais en plus, ils ont une démarche plus réfléchie. Autrement dit, ils se posent d’emblée la question : « Que va m’apporter ce poste pour la suite de mon parcours ? ». Il ne s’agit donc pas de salaire, ni même de possibilité d’évoluer dans l’entreprise, mais d’une vision à long terme, qui s’inscrit en outre dans l’idée qu’une carrière sera forcément variée. Ce qui implique qu’ils ne font rien s’ils ne comprennent pas le « pourquoi », premièrement, et deuxièmement, que si le poste ne leur convient pas, ils s’en vont au bout de quelques mois. Cet état d’esprit, associé au fait qu’ils ne sont pas « carriéristes », leur donne donc un levier de liberté impressionnant ! En somme, le centre de gravité du travail a changé.

Qu’est-ce que cela implique pour l’employeur ?

Pour l’employeur et le manager, cela signifie qu’il faut travailler la confiance, en laissant de l’autonomie aux jeunes, mais tout en les pilotant, puisqu’ils manquent d’expérience et sont conscients qu’ils doivent encore apprendre. Toute la question est d’atteindre cet équilibre. Mais il est clair que le manager devient presque un mentor pour ces jeunes, auxquels il faut prodiguer conseils et recommandations de façon formelle, et donc créer les conditions pour que cela ait lieu. Les échanges formels, qui valorisent la collaboration et l’intelligence, sont clés. Les jeunes sont très friands de feedback constructif et rapide. Autre élément qui entre en jeu, la manière dont l’entreprise est organisée pour partager l’information. Rompus aux médias sociaux, les jeunes veulent immédiatement avoir accès aux données. Ce qui signifie par exemple que les employeurs devront utiliser les outils les plus agiles possible en ce qui concerne le recrutement, mais aussi à l’intérieur de l’organisation, dans la vie de tous les jours. De quoi créer de nouvelles règles de communication, moins fondées sur la hiérarchie… Enfin, ce phénomène de l’immédiateté se repère aussi dans la volonté des jeunes de voir des décisions prises rapidement. Et c’est là encore la hiérarchie qu’il faudra revoir, en faisant en sorte que les prises de décision soient plus proches de ceux qui expriment les besoins.

Tout cela implique une nouvelle « discipline » pour l’employeur, n’est-ce pas ?

Absolument ! C’est particulièrement vrai en matière de rétention des talents. Les entreprises qui ne feraient pas, au quotidien, vivre les valeurs qu’elles mettent en avant dans leur communication et leurs annonces de poste risquent de perdre rapidement les jeunes recrues, pour qui, de toute façon, la question de la période d’essai n’est plus un sujet. Et c’est particulièrement vrai pour les jeunes diplômés. Comme je le disais, s’ils ne sont pas satisfaits, ils quittent rapidement l’entreprise… C’est ce nouveau rapport au temps que les employeurs doivent comprendre. Les jeunes ne veulent pas en perdre et sont capables, plus que les précédentes générations, de se fixer des limites concernant ce qu’ils acceptent ou non.

Auteur

  • Lys Zohin