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Partage de la valeur : Chez Lucca, 20 % des collaborateurs sont actionnaires

Le pont sur | publié le : 15.11.2021 | Lucie Tanneau

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Partage de la valeur : Chez Lucca, 20 % des collaborateurs sont actionnaires

Crédit photo Lucie Tanneau

Quelque 48 salariés de l’éditeur de solutions RH détiennent 45 % des actions de la société. Un atout financier mais aussi humain.

Chez Lucca, éditeur de solutions RH, l’entrée des salariés au capital s’est faite progressivement et de manière pragmatique. Lors de la création de la société, en 2012, Gilles Satgé, cofondateur et PDG, investit. Quelques années plus tard, l’entreprise recrute trois collaborateurs et leur propose des stock-options. « Mais ils avaient du mal à en percevoir l’intérêt et à se sentir propriétaires », relève le PDG.

Le tournant de l’actionnariat salarié est pris à ce moment-là. Les salariés investissent pour acheter chacun 10 % de la société. « J’avais 70 % et eux se partageaient 30 % à trois », précise-t-il. Puis la société grossit et Gilles Satgé décide de refaire un plan de stock-options. « Mais cela demande du travail et crée de la frustration : ceux qui en reçoivent n’y accordent pas beaucoup d’importance et ceux qui n’en ont pas sont mécontents. L’effet est négatif », juge-t-il. À partir de 2019, il change de logique. Et permet à tous les salariés d’entrer au capital.

« Nous sommes dans un métier où le capital intellectuel est rare et précieux. Il faut que les collaborateurs restent dans l’entreprise pour permettre au logiciel de continuer à se développer. Un ingénieur, un consultant ou un commercial qui part est une perte de connaissance énorme et il est difficile de retrouver un expert aux compétences équivalentes, indique-t-il. L’actionnariat salarié, ce n’est pas de la grandeur d’âme, cela découle vraiment d’une logique économique ! »

Des salariés rassurés

Aujourd’hui, 48 salariés (sur 300) ont acheté des parts et investi ainsi plus d’un million d’euros dans la société. Ils détiennent 45 % du capital. S’y ajoutent l’épouse du PDG et un business angel. « Le fait qu’un tiers investisse a rassuré les salariés sur le prix de leurs actions », souligne en outre Gilles Satgé. Et chaque année, de nouveaux salariés rejoignent le collège des actionnaires. « Nous proposons une ouverture par cooptation : les salariés déjà actionnaires proposent les noms de leurs collègues avec une règle : “si tu veux être associé, agis comme un associé”. Un vote a lieu ensuite pour intégrer une dizaine de nouveaux », détaille le dirigeant. Pour les entrants, cela représente certes un investissement – entre 10 000 et 40 000 euros – mais avec un avantage à la clé : pour une action achetée, une action est offerte. Quelque 14 nouveaux actionnaires ont ainsi rejoint l’aventure cette année, dont un jeune informaticien brillant qui n’a qu’un an d’ancienneté. « Normalement, nous proposons plutôt des actions à ceux qui sont en poste depuis au moins trois ans », indique le PDG. Ne serait-ce que parce que ces derniers ont davantage d’épargne à investir. L’actionnariat reste pour les salariés un risque financier, même s’ils investissent dans une société qu’ils connaissent, puisqu’ils y travaillent, et que Lucca a une politique de transparence sur les résultats. La croissance de l’activité est ainsi de 40 % cette année.

Triple avantage

« Nos salariés ne sont pas dans une logique boursière ou de plus-value à court terme, poursuit Gilles Satgé. D’ailleurs, ils ne peuvent pas revendre leurs actions les premières années, c’est l’une des clauses, et, dans un deuxième temps, le taux de revente est proportionnel à la croissance du chiffre d’affaires depuis l’acquisition. Je crois que la plupart n’avaient auparavant jamais acheté d’actions… » Selon leur patron, ces salariés actionnaires sont plutôt dans une logique patrimoniale. À leur âge (30 ans en moyenne), la retraite est loin, mais Lucca devient « leur boîte et ils remarquent que c’est un investissement intéressant, dit-il. Prendre des parts dans la société, autofinancée, leur paraît rassurant. »

Rassurant aussi pour l’entreprise, puisque les concurrents auront plus de mal à débaucher ses talents, attachés à leur société pour au moins dix ans (de façon à être en pleine propriété de leurs actions). L’entreprise ne propose pas de formation spécifique à l’actionnariat, mais une agence bancaire nantaise accompagne régulièrement les salariés sur les aspects fiscaux notamment (l’entreprise à une antenne en Loire-Atlantique avec 100 salariés, et une autre à Marseille, avec 20 collaborateurs, NDLR). Pour le PDG, cet actionnariat présente un triple avantage : « Il fidélise, change les comportements et motive. Cela aligne les collaborateurs avec les intérêts de la société, pour le simple prix d’une dilution », résume-t-il. « Souvent, les dirigeants veulent garder le contrôle absolu, au détriment de la croissance », reproche Gilles Satgé. Comme un encouragement aux autres entreprises…

Auteur

  • Lucie Tanneau