logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les clés

Netflix : un management impitoyable

Les clés | À lire | publié le : 25.10.2021 | Lydie Colders

Image

Netflix : un management impitoyable

Crédit photo Lydie Colders

 

Dans cet ouvrage, Reed Hastings, le président de Netflix, explique son mode de management et d’innovation : peu de règles pour les employés, mais aussi un culte de la performance inquiétant. Le succès du géant ne rime pas avec sécurité de l’emploi…

À première vue, la réussite de Netflix fait rêver. Tout comme la vision managériale de son cofondateur, Reed Hastings. Le titre de son livre « La règle ? Pas de règles ! », coécrit avec Erin Meyer, enseignante à l’Insead, résume assez bien sa philosophie : franchise, liberté et exigence. Comment a-t-il bâti sa politique RH et s’est-il diversifié aussi vite, des débuts dans la location de DVD en 1998 à la plateforme de films devenue mondialement célèbre ? Après avoir dû licencier un tiers des salariés lors de l’explosion de la bulle Internet en 2001, Reed Hastings a rebondi. Et ce patron ambitieux en a tiré les leçons : recruter les meilleurs « sans limite de salaires » et laisser beaucoup de liberté à ses collaborateurs. A priori, le scénario très Silicon Valley séduit. Chez Netflix, aucun contrôle « sur les horaires, les vacances ou les frais » : les cadres sont incités « à prendre un maximum de congés » pour donner l’exemple. La créativité ? Reed Hastings affirme la nourrir au quotidien. Et soutenir les idées de ses collaborateurs « même lorsqu’il ne les partage pas. » Les managers sont invités à faire de même. Il ne s’agit pas de « plaire à son chef ». « Si vos employés sont excellents, si vous leur donnez la liberté de mettre en place les brillantes idées auxquels ils croient, alors l’innovation arrivera », explique le patron rock star. Le livre est très concret sur cette culture du test (via un « capitaine informé »), dans l’esprit start-up.

Problème : on comprend très vite que cette autonomie et cette responsabilisation sont anxiogènes. Certains témoignages du livre en attestent, comme celui de ce directeur des programmes internationaux. Il n’a certes plus besoin de l’aval de « 30 personnes » pour signer lui-même un contrat de plusieurs millions de dollars.

Siège éjectable

Mais « si ça tourne mal », il peut aussi perdre son poste… Reed Hastings ne cache d’ailleurs pas son exigence, brutale. Le slogan de la firme ? « Netflix n’est pas une famille, mais des amis. » La transparence affichée (sur les finances, les projets) est peut-être louable. Mais en matière de GRH, Erin Meyer décrit une entreprise impitoyable, avec plan d’amélioration des performances et dernière chance… avant la porte. La presse américaine accuse la société de « management par la peur ». En cause : un outil au titre évocateur, « keeper test » (rester ou partir), longuement décrypté. Hastings l’assume : cette méthode, où les cadres sont amenés « à se prononcer régulièrement » sur un éventuel licenciement, permet « de maximiser les talents. » Au fil des pages, ce culte malsain de la performance glace le sang. Qui reste chez Netflix ? C’est plutôt la question qui se pose…

Auteur

  • Lydie Colders