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Le fait de la semaine

« Il y a encore clairement des freins à la visibilité »

Le fait de la semaine | publié le : 18.10.2021 | Lys Zohin

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« Il y a encore clairement des freins à la visibilité »

Crédit photo Lys Zohin

Le coresponsable de l’Observatoire de la Fédération de L’Autre Cercle, organisation qui milite pour l’inclusion des personnes LGBT+ au travail, livre un panorama contrasté de la visibilité en entreprise.

Quel état des lieux dressez-vous de l’inclusion des personnes LGBT+ au travail ?

Nous avons eu, cette année, 250 candidatures émanant de salariés d’entreprises privées ou d’organisations publiques. Or en fonction des données à notre disposition, le nombre de personnes LGBT+ dans la population active serait de 2 millions… Autant dire qu’il y a encore clairement des freins à la visibilité. C’est particulièrement vrai dans les PME, les salariés qui travaillent dans des structures de moins de 300 personnes ne constituant que 29 % des candidats. De même, 72 % des candidats proviennent de l’Île-de-France. Par ailleurs, 61 % des candidatures sont le fait de salariés d’entreprises ou d’organisations publiques qui ont signé la Charte d’engagement LGBT+ de L’Autre Cercle, ce qui souligne son impact. Enfin, alors que 20 % de la population active travaille dans le public, la proportion de candidatures émanant de ce secteur n’est que de 10 %. Et les femmes ne représentent que 35 % des candidatures cette année, contre 40 % l’an dernier. Toutes ces indications montrent qu’il reste encore beaucoup à faire…

Vous faites souvent des interventions en entreprise. Quelles sont les préoccupations qui remontent le plus fréquemment ?

Les préoccupations sont de plusieurs ordres. Certaines personnes LGBT+ ont construit, depuis des années, leur vie au travail sur l’esquive, en ne mentionnant jamais leur orientation sexuelle. L’idée de dévoiler ce qu’elles sont leur paraît insurmontable. Et dans un environnement très compétitif, certaines s’inquiètent : « Et si le fait de dire ce que je suis me rendait vulnérable vis-à-vis de mes collègues ? Et si cela me faisait perdre un gros marché ? » peuvent être autant d’interrogations. Il existe aussi, de la part des hétérosexuels comme des personnes LGBT+, d’ailleurs, de fausses croyances. L’orientation sexuelle appartiendrait ainsi à la vie privée – alors que cet argument, qui n’a rien à voir avec la vie sexuelle, ne vaut pas pour les hétérosexuels ! Et un « bon » leader ne pourrait être qu’hétérosexuel, selon les clichés en vigueur, alors qu’un manager qui est lui-même sera sans doute meilleur… Mais les préoccupations des personnes LGBT+ tiennent aussi, et surtout, à l’environnement de travail. S’il n’y a ni position officielle en faveur de cette diversité, ni réseau de collaborateurs LGBT+, ni formation, la visibilité est plus difficile. Enfin, n’oublions pas que selon le Baromètre L’Autre Cercle/Ifop de 2020, 40 % des personnes interrogées avaient entendu des propos LGBTphobes au travail. Il s’agit donc d’opérer un changement culturel. Avec, entre autres, une formation des managers pour recadrer si nécessaire. Il ne s’agit pas de culpabiliser qui que ce soit, mais de travailler ces sujets pour faire avancer la visibilité et la diversité.

Est-ce une problématique RH ou plus large ?

La problématique dépasse évidemment la sphère RH. D’ailleurs, lorsque la Charte d’engagement est signée, nous exigeons qu’elle le soit non seulement par la DRH mais aussi par la direction générale. Enfin, nous avons eu du mal, cette année, à avoir des candidatures « Premier emploi », signe que les entreprises ne communiquent pas assez sur leurs engagements en matière de diversité. Il est temps qu’elles adressent un message aux jeunes et l’intègrent dans leur marque employeur si elles ne veulent pas se priver de ces talents, car s’ils se sentent contraints de ne pas être eux-mêmes, il y a de fortes chances qu’ils performent moins bien…

Auteur

  • Lys Zohin