La pandémie a été une bénédiction pour le géant américain du transport, XPO Logistics, dont le chiffre d’affaires a atteint des records. Mais pour profiter encore plus de cette vague porteuse, la multinationale, qui travaille pour des clients comme Nestlé, Nike, Ikea, Home Depot et de nombreuses chaînes de supermarchés, a décidé de séparer ses activités, et de réunir dans une nouvelle entité, GXO Logistics, les opérations de commerce en ligne et d’entreposage. Cette nouvelle société comprendra quelque 94 000 salariés, sur 869 sites à l’échelle de la planète.

De quoi inquiéter les syndicats, qui considèrent déjà que les conditions de travail et de salaire sont largement déficientes. Le mois dernier, la division transport a ainsi évité de justesse la grève au Royaume-Uni, l’augmentation de salaire proposée ne couvrant même pas la progression du taux d’inflation. XPO a dû améliorer son offre, d’autant qu’elle a profité du dispositif de chômage partiel mis en place par les autorités britanniques pendant la pandémie. En outre, la direction a assuré, alors que les actionnaires s’y opposaient, un généreux bonus au fondateur, qui pourrait s’élever jusqu’à 80 millions de dollars. De quoi, cette fois-ci, mettre en colère les syndicats américains, qui notent en outre que les top managers ont reçu au total 6,3 millions de dollars de bonus en 2020, tandis que les salariés, en particulier dans les entrepôts, devaient faire face à des conditions de sécurité inadéquates, aussi bien aux États-Unis qu’outre-Manche.

Des deux côtés de l’Atlantique, les syndicats de salariés se sont donc réunis il y a peu par visioconférence pour coordonner leurs actions. « XPO Logistics a une histoire pour le moins sombre en ce qui concerne les conditions offertes aux salariés, a ainsi déclaré Louis Malizia, des Teamsters. Et j’ai bien peur que cette philosophie soit appliquée dans la nouvelle entité. » Au point, d’ailleurs, qu’aux États-Unis, la société a dû payer plusieurs amendes, s’élevant à un total de 47 millions de dollars, pour des entorses au Code du travail depuis 2000. « XPO Logistics, en particulier au Royaume-Uni, a une tradition de moins-disant social pour gagner des contrats », pointe de son côté Matt Draper, représentant des chauffeurs et des salariés des entrepôts au sein du syndicat britannique Unite. Les tensions entre syndicats et direction pourraient s’accroître tandis que les dirigeants mettent en avant l’automatisation des activités dans les entrepôts pour séduire les investisseurs, alors que les syndicats insistent pour que l’introduction de ces outils se fasse en concertation avec eux.