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Réglementation : L’excès de zèle de Bluelinea sur le passe sanitaire sanctionné

L’actualité | publié le : 13.09.2021 | Lucie Tanneau, Olivier Hielle, Benjamin d’Alguerre

En voulant imposer le passe sanitaire à sa centaine de salariés, le PDG de cette entreprise francilienne spécialisée dans le téléservice pour personnes âgées s’est attiré les foudres des réseaux sociaux… et du ministère du Travail.

Croyant bien faire, Bluelinea, une entreprise francilienne de téléassistance pour personnes âgées, fait connaître, le 6 septembre, sa politique en matière de passe sanitaire, par un communiqué de presse. Le précieux sésame « sera obligatoire à partir du 30 septembre pour pouvoir entrer dans les bureaux de l’entreprise. Aucun test PCR ni antigénique ne sera pris en charge par l’entreprise. Le contrat de travail des salariés sans passe sanitaire sera suspendu », indique le document. Bluelinea s’y félicite d’être « l’une des premières entreprises à afficher une politique si stricte envers les salariés non vaccinés, alors qu’il ne s’agit pas de personnel soignant ni des personnes en contact avec des patients. »

Mal lui en a pris. Contactée par Entreprise & Carrières, Bluelinea rétropédale d’ailleurs quelques heures plus tard : « Bluelinea ne voulait pas imposer le passe sanitaire pour tout le monde, mais uniquement pour ceux qui sont amenés à se déplacer chez les clients », précise-t-elle. Bluelinea, avec ses 35 000 clients, doit en effet se rendre régulièrement dans quelque 1 200 établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Des établissements qui sont concernés par l’obligation vaccinale pour leur personnel, d’une part, et par le passe sanitaire pour les visiteurs, d’autre part.

Un cadre fixé par la loi

Néanmoins, la loi est claire : le passe sanitaire ne peut être exigé en dehors du cadre fixé par les textes (voir encadré). « Nos techniciens sont en contact avec des personnes fragiles et je veux que nous soyons irréprochables pour préserver nos salariés et ne pas contaminer d’autres personnes, déclarait pourtant Laurent Levasseur, PDG de Bluelinea, à Entreprise &Carrières. Je pense que notre catégorie d’intervenants a été oubliée dans la réglementation et je ne peux pas imaginer qu’un technicien puisse contaminer un client », argumentait-il. Pour lui, il s’agit avant tout de répondre « à une obligation de l’employeur, qui est de prendre soin de la santé et de la sécurité de ses salariés ». Car c’est une partie de l’activité de la PME qui en dépend : « Des directeurs d’établissements de santé peuvent refuser l’accès à des techniciens qui n’auraient pas le passe », avançait-il.

En tout cas, les salariés semblent avoir pris la mesure avec philosophie. « J’ai été le premier surpris de la manière dont mes salariés ont réagi : je n’ai pas ressenti d’animosité mais, au contraire, une prise de conscience, assurait le PDG. Il y a quelques personnes qui ont un avis ferme, mais la plupart d’entre elles comprennent qu’il s’agit de protéger leurs collègues et de faire en sorte que l’activité perdure. »

Emballement

Reprise par l’Agence France-Presse puis par les médias et les réseaux sociaux, l’affaire s’emballe. Le standard et les boîtes mail de Bluelinea sont, selon l’entourage de son dirigeant, pris d’assaut par des militants antivax et/ou anti-passe, tandis que sur les réseaux sociaux, les messages indignés et, parfois, carrément menaçants, fleurissent.

Au point que le ministère du Travail intervient. « Bluelinea est dans l’illégalité. La loi du 5 août est très claire sur le périmètre d’application du passe sanitaire. Elle ne peut en aucun cas suspendre ses salariés pour ce motif », indique-t-il, en précisant avoir pris contact avec l’entreprise pour l’avertir de l’illégalité de sa démarche.

Reste que, selon nos informations, Bluelinea est loin d’être la seule société à avoir envisagé d’exiger le passe sanitaire pour ses salariés. Autant dire que la notion de vaccination pour tous commence à s’installer chez les employeurs.

Ce que dit la loi

Un an de prison et 45 000 euros d’amende : c’est la sanction encourue par toutes les personnes qui exigent un passe sanitaire hors des cas prévus par la loi (cf. art. 1, II, F, alinéa 2 de la loi relative à la gestion de la crise sanitaire actuellement en vigueur). Par conséquent, les employeurs qui imposent un passe sanitaire alors qu’ils ne sont pas visés par les textes, par exemple pour accéder à des bureaux, risquent cette sanction.

Auteur

  • Lucie Tanneau, Olivier Hielle, Benjamin d’Alguerre