Le clivage autour de la réduction du temps de travail revient régulièrement dans le débat politique français. Cette fois à la faveur de la crise sanitaire, observe Philippe Askenazy dans un rapport de l’IWEPS, institut statistique officiel en Belgique, d’août 2021. Le chercheur, membre des Économistes atterrés, rappelle que le 10 avril 2020, en plein confinement, le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, déclarait au Figaro : « Il faudra se poser la question des RTT et des congés payés » pour relancer la machine économique française, une proposition relayée par le parti Les Républicains. L’auteur estime que « le sujet épineux des congés payés », accumulés par les salariés pendant les confinements, « pourrait servir de prétexte ». Ils seraient susceptibles d’être réduits par décision étatique, au nom « de l’effort national de reconstruction ». Ces remises en cause laissent cependant de côté les évaluations scientifiques de la réduction du temps de travail par les économistes de l’Insee et de la Dares, qui ne sont pas accablantes. Le constat est d’abord la « très grande hétérogénéité » de l’application des réformes Aubry, entre les différentes fonctions publiques, entre les petites et grandes entreprises et entre les lieux de travail. Ensuite, la RTT s’est globalement accompagnée dans le privé de gains de productivité associés à une intensification du travail. Enfin, 300 000 à 400 000 emplois auraient été créés ou sauvegardés, mais les chercheurs « ne peuvent séparer dans les effets des lois de Robien et Aubry, ce qui relève d’un effet coût du travail via les aides et d’un partage du temps du travail ».