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Le fait de la semaine

PSE : la machine accélère

Le fait de la semaine | publié le : 30.08.2021 | Benjamin d’Alguerre, Gilmar Sequeira Martins

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Emploi : PSE : la machine accélère

Crédit photo Benjamin d’Alguerre, Gilmar Sequeira Martins

Alors que la crise sanitaire s’éternise, la digue érigée par les pouvoirs publics peine à contenir la montée inexorable des PSE. Déjà, ces derniers mois ont été meurtriers…

Malgré les mesures de protection mises en place par les pouvoirs publics pour préserver l’emploi et dont Bruno Le Maire a annoncé à la fin le 25 août pour privilégier du « sur-mesure » branche par branche (voir p. 7), la crise sanitaire va prélever un lourd tribut. Selon une étude publiée le 1er juillet par la Dares, plus de 1 000 plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) ont été initiés depuis le déclenchement de la pandémie, entraînant 106 500 ruptures de contrat. Les auteurs rappellent que la crise de 2008 avait provoqué 2 647 PSE. Les données recueillies montrent que quatre branches sont plus particulièrement touchées, puisqu’elles regroupent plus de la moitié des ruptures de contrat : il s’agit de la métallurgie (21 %), des bureaux d’études et prestations de services aux entreprises (13 %), des transports et de l’hôtellerie-restauration (11 % chacune).

S’agissant des PSE, les secteurs les plus touchés sont la métallurgie et la sidérurgie (23 % des PSE initiés). Ils sont suivis par les bureaux d’études et de prestations de services aux entreprises (13 %). Viennent ensuite cinq autres branches, représentant chacune entre 6 % et 7 % des procédures lancées : l’hôtellerie, la restauration et le tourisme ; les transports ; la chimie et la pharmacie ; l’habillement, le cuir et le textile ; la culture et la communication. Fin mai 2021, les trois quarts (74 %) des procédures avaient été validées et/ou homologuées, correspondant à 75 800 cessations de contrat de travail.

Concentration en Île-de-France

L’Île-de-France est proportionnellement la région la plus touchée, puisqu’elle concentre 43 % des ruptures, alors qu’elle ne représente que 28 % de l’emploi des entreprises de 50 salariés ou plus. Les ruptures de contrat y sont particulièrement élevées dans l’hôtellerie-restauration (19 % du total), les transports (16 %), les bureaux d’études (13 %), l’habillement (11 %) et la métallurgie (10 %). En un an, entre mars 2020 et mai 2021, 146 500 personnes se sont inscrites à Pôle emploi du fait d’un licenciement économique stricto sensu. Cela représente une hausse de 7 % par rapport à la période équivalente, il y a deux ans.

Nombre de PSE doivent beaucoup aux conditions économiques dégradées en raison de la crise sanitaire. Celui lancé chez Flunch tient également à une situation délicate, que la crise a transformée en impasse. Propriété du groupe Mulliez, la chaîne de restauration en libre service compte 160 établissements en propre et 60 franchisés. Faute de renouvellement de sa gamme de produits – alors que ses concurrents se démarquaient par des prix plus bas, mais aussi, selon les représentants du personnel, faute de recapitalisation –, la perspective d’un PSE pouvant toucher 15 à 20 établissements a vite pris forme. Avec la fermeture administrative imposée par la crise sanitaire, tout s’est accéléré, se souvient Philippe Delahaye, délégué syndical central CFE-CGC : « Dès le 27 janvier, la direction des ressources humaines a annoncé un plan de restructuration portant sur 57 établissements, auquel s’ajoute la suppression d’environ un tiers des effectifs du siège, soit 43 personnes sur 140. » Si le premier projet prévoyait 1 260 suppressions de postes, les négociations ont abouti à un chiffre inférieur, situé entre 800 et 900.

« La négociation a été très dure et le périmètre porte sur 92 établissements, note Philippe Delahaye. Nous avons obtenu une indemnité doublée par rapport au minimum légal, un dispositif d’indemnité particulier pour les plus de 58 ans et une « prime de départ de substitution » pour les personnes ayant un projet professionnel. » Le PSE prévoit la fermeture de 39 établissements et la reprise de cinq autres par des franchisés. Signé le 15 juin, il a été validé le 16 juillet par la DREETS (ancienne Direccte). « Les premiers licenciements démarreront le 16 août, puis les départs seront échelonnés jusqu’au 31 décembre », précise le délégué syndical central CFE-CGC.

Certains plans sociaux ne sont pas motivés par la crise actuelle, mais par l’anticipation de la situation à venir. C’est le cas chez Imaweb. Cette structure créée en septembre 2020 regroupe plusieurs entités (DataFirst, I’CAR Systems, TMS Soft et Tempyt) qui éditent un logiciel (Dealer Management System) assurant la gestion de l’activité des concessionnaires automobiles.

Pour justifier son PSE, la direction met en avant l’évolution des modes d’achat. « Les constructeurs prennent une part de plus en plus large dans la vente à travers les plateformes en ligne, qui est renforcée par l’augmentation des achats de véhicules électriques, explique la DRH Gabriela Petitcollot. Il en résulte une concentration du marché par le regroupement des concessionnaires qui réduit le nombre d’utilisateurs de nos produits. Cela induit une baisse projective très forte et nous commençons à nous préparer à cet impact. »

Le PSE prévoit la suppression de 27 postes sur les 274 personnes employées actuellement. « Soit plus de 10 % des effectifs, alors que l’entreprise ne connaît pas de souci économique, puisque le chiffre d’affaires a continué d’augmenter en 2020, que les salariés ont beaucoup de travail et font des heures supplémentaires, y compris les personnes touchées par le PSE », déplore Christophe Suraud, délégué syndical CFE-CGC.

Annulation du PSE de TUI France

Le PSE du tour-opérateur allemand TUI France, qui prévoyait la suppression de 600 postes sur 900, constitue une exception, puisqu’il a été annulé début juillet par la cour administrative d’appel du tribunal de Versailles. Un dénouement plutôt inattendu, car la première demande d’annulation, déposée en référé en janvier, avait été déboutée. Les motifs d’annulation ne manquaient pourtant pas, selon le secrétaire CGT du CSE Lazare Razkallah, qui cite « le non-respect des procédures de consultation du CSE », mais aussi une définition des « catégories professionnelles », si précise que cela « revenait à cibler des salariés dans le PSE », sans oublier « la définition des zones d’emploi, selon laquelle chaque agence était une zone d’emploi, ce qui rendait impossible le reclassement de salariés dans une autre agence… » « L’annulation est exécutoire, de sorte que les salariés peuvent demander leur réintégration – mais il faut l’accord de l’entreprise – ou des dommages et intérêts », mentionne Lazare Razkallah. Les demandes de réintégration sont très improbables. Les salariés sont, dans leur grande majorité, encore en congé de reclassement, d’autres ont opté pour la formation et certains sont devenus auto-entrepreneurs.

Auteur

  • Benjamin d’Alguerre, Gilmar Sequeira Martins