Par Gilles Gateau, directeur général de l'Apec

Les rentrées ont toutes un goût particulier : il faut renoncer au rythme plus léger des vacances et des joies familiales ou amicales, retrouver aussi les habitudes que l’on avait mises entre parenthèses – parfois avec soulagement… Cette rentrée 2021 a quant à elle un goût singulier. Plus que toute autre, elle marque en quelque sorte un « vrai retour au travail ». Un vrai retour au travail présentiel s’entend, du fait de l’assouplissement espéré des mesures sanitaires dans les entreprises (toujours d’actualité à l’heure d’écrire ces lignes, même si la situation sanitaire reste incertaine).

Pendant de longs mois, nous avons appris à ne plus nous côtoyer physiquement, à mettre de la distance, et même pour certains à ne plus nous voir du tout. Avec cette vraie rentrée, il va falloir réapprendre à travailler ensemble.

Défi de taille : la création d’un collectif est une science éminemment complexe. Ce qui a été obtenu au prix de longs efforts, généralement grâce à l’œuvre du temps, peut s’évaporer à grande vitesse, nous venons d’en vivre l’expérience. Chacune de nos organisations, petites ou grandes, est face à la nécessité de recréer du lien, de retrouver des moments de partage. Et aussi des moments – indispensables ! – de convivialité. Le management a évidemment un rôle déterminant à jouer. Le management qui, après avoir inventé dans l’urgence de nouvelles pratiques pour faire face à une situation imprévue, doit reconstruire ses fondamentaux afin de réengager, de remobiliser, de remotiver les équipes.

Un management doit évoluer, en tirant les leçons des derniers mois qui ont mis en lumière des aspirations exprimées depuis longtemps bassa voce. La clef de la remobilisation est sûrement là : dans le fait qu’il n’y a pas un retour au statu quo ex ante, mais que le choc de l’année écoulée aura été salvateur, car il aura servi d’accélérateur. On attend en effet des managers qu’ils soient davantage des facilitateurs, également des moteurs en matière de responsabilisation de leurs équipes. En d’autres termes, le manager ne doit plus être celle ou celui qui ordonne et contrôle, mais celle ou celui qui met en ordre et fait confiance, qui organise et planifie, qui est le garant de la dynamique collaborative. Si je me risquais à une métaphore footballistique, malgré nos déceptions tricolores de l’été, je dirais que le manager devient coach et entraîneur autant que capitaine sur le terrain. Ce qui nécessite un travail sur les compétences relationnelles et comportementales, en particulier les capacités d’écoute et de communication. Les managers le sentent d’ailleurs très bien : sept sur dix se disent ainsi intéressés, dans la dernière étude Apec sur le sujet, par une formation sur les bonnes pratiques vis-à-vis du télétravail.

Cette rentrée, même si le contexte reste incertain, affiche aussi – youpi ! – des signes d’embellie : 12 % des entreprises ont l’intention de recruter au moins un cadre dans les trois prochains mois, et pour la première fois depuis 18 mois, le niveau des offres d’emploi cadres a rattrapé cet été celui d’avant-crise. Une situation qui confronte à nouveau les entreprises aux difficultés de recrutement. Et rien de mieux pour y faire face que de profiter de la rentrée pour travailler son attractivité, sa « marque employeur ». Pour faire venir à elles des talents et les fidéliser, les entreprises vont devoir plus que jamais montrer qu’elles savent intégrer les attentes des candidats en matière de qualité de vie au travail et d’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.

Alors bonne rentrée à toutes et à tous, en espérant bien fort que ce soit enfin la vraie !