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Les clés

Repenser les politiques de mobilité entre territoires

Les clés | À lire | publié le : 12.07.2021 | Lydie Colders

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Repenser les politiques de mobilité entre territoires

Crédit photo Lydie Colders

Dans L’Emploi et le territoire, des économistes analysent l’échec des politiques publiques en matière de mobilité géographique et d’emploi. « Rapprocher travailleurs et entreprises » reste difficile. Pour eux, la solution serait surtout d’agir sur le coût du logement.

Le mouvement des Gilets jaunes l’a montré : l’augmentation des taxes sur l’essence lorsque la voiture est nécessaire pour aller travailler peut vite virer à la colère sociale. Entre moyennes et grandes villes, « la polarisation spatiale grandissante du marché de l’emploi reste un défi pour la puissance publique », préviennent Thomas Delemotte, Francis Kramarz et Benoît Schmutz. Dans ce livre d’économie géographique, les trois auteurs dressent le bilan d’une « fragmentation » qui se creuse entre l’activité économique, toujours plus concentrée dans les grandes métropoles (Paris, Lyon…) et les ménages, attachés à la qualité de vie, pas toujours « attirés par les zones les plus denses ». Si l’on ajoute les entreprises s’installant peu en dehors des grandes villes, si ce n’est les entrepôts ou les usines en milieu rural, sans « répondre aux nouvelles formes d’habitat », « les inégalités spatiales » et sociales augmentent. Ils l’illustrent avec « des situations de chômage chronique » entre régions (11 % en 2019 dans la zone Marseille-Aubagne, contre 8 % à Toulouse), mais aussi entre départements. Ou avec les « stratégies de sélection » des entreprises, concentrant les fonctions supports « les plus productives » dans les grandes villes, celles de la production, employant une main-d’œuvre peu qualifiée étant reléguées en périphérie, où l’espace est moins cher.

Des dispositifs à la peine

Analysant les politiques publiques (logement, aides à la mobilité, transports), les chercheurs montrent leur « faible efficacité » à conjuguer opportunités économiques et emploi. En direction des chômeurs, ils évoquent l’échec des emplois francs ou des zones franches urbaines « qui créent peu d’emplois nouveaux » et locaux. Quant aux aides à la mobilité de Pôle emploi, ils les jugent utiles, mais trop faibles pour une politique de mobilité d’ampleur. Déménager dans une autre ville plus dynamique coûte « en moyenne 15 000 euros » d’après leurs calculs. Face aux risques (carrières de plus en plus fragmentées), ils suggèrent donc d’autres pistes, comme un droit à la mobilité, sorte de compte épargne individuel et transférable, « quel que ce soit le statut ». Mais pas avec une enveloppe au rabais. Plutôt que de « chercher à modifier les comportements des demandeurs d’emploi et des entreprises qui ne s’attaquent pas aux racines du problème », il faudrait selon eux s’attaquer au coût de l’immobilier : « Les régions les plus dynamiques sont devenues inabordables pour nombre d’acteurs ». Un appel à miser sur des politiques publiques d’aides au logement « massives » pour l’emploi. Si des Franciliens ont déménagé en province depuis la pandémie, le télétravail ou les déplacements hebdomadaires pour rejoindre le siège de son employeur dans une grande ville reste « un privilège » cantonné à quelques métiers…

Auteur

  • Lydie Colders