Alors que le ministère du Travail a autorisé le retour progressif des salariés dans leur entreprise en respectant les consignes sanitaires, les employeurs doivent réfléchir aux modes de management et d’organisation du travail pour tenir compte de la nouvelle situation dans laquelle le télétravail ne va pas disparaître mais va devoir être encadré. Un défi qui nécessite de mettre en place de nouveaux process. Explication avec Dominique Brard, directrice générale Talent Solutions ManpowerGroup.
Le retour au travail n’est pas simple… S’il n’y aura pas un basculement à 100 % en télétravail, c’est tout aussi illusoire de croire que l’on va revenir à la situation d’avant la crise de la Covid-19. Les entreprises et notamment les managers vont devoir réfléchir à de nouveaux modes d’organisation comme à de nouvelles façons de gérer leurs équipes. Depuis un an, tout le monde a beaucoup appris, mais en expérimentant des solutions dans un contexte exceptionnel. Face à la pandémie, les collaborateurs ont su faire face, car il n’y avait pas d’autres possibilités. Et la productivité d’ailleurs n’a pas fléchi. Si nous ne partons pas de zéro, il va falloir réfléchir à la manière de travailler en partie à distance dans la durée et non pas sous la contrainte comme cela a été le cas.
Première question à se poser : s’interroger sur les raisons qui inciteraient les salariés à revenir au bureau. Une fois le plaisir de retrouver les collègues passé, il faut que les espaces de travail évoluent : ils doivent devenir des lieux de rencontres, d’apprentissage et de débats. Pour qu’ils répondent à ces critères, ils ont besoin d’être repensés. Si le flex office est adapté au télétravail, sa mise en place ne doit plus être, comme cela a trop souvent été le cas dans le passé, un moyen pour les employeurs de diminuer le nombre de mètres carrés.
Car pour que les bureaux deviennent des lieux dédiés au lien social, il faut créer de la convivialité, multiplier les petites salles pour que les salariés puissent travailler à plusieurs. En réalité, il ne faut pas moins mais plus de mètres carrés.
Mais ces aménagements ne suffiront pas si parallèlement les méthodes de management ne sont pas elles aussi repensées. Nous avons appris de l’année écoulée que faire confiance aux membres de ses équipes en les responsabilisant correspond aux aspirations des collaborateurs. Ces modes de relation sont par ailleurs en phase avec la nécessaire flexibilité qu’il va falloir trouver pour gérer des équipes dont les membres seront parfois présents, d’autres fois à distance. À charge pour les managers d’instituer des plages horaires communes pour maintenir le lien. La tâche ne devrait pas être trop compliquée, car les entreprises savent depuis la mise en place des 35 heures et des jours de RTT gérer la diversité des agendas.
L’autre sujet plus épineux concerne les solutions à inventer pour que le télétravail n’accroisse pas le fossé entre les cols blancs, qui ont la possibilité de le pratiquer, et les cols bleus, qui, eux, majoritairement doivent se rendre tous les jours dans leur entreprise. C’est vrai dans l’industrie, mais aussi pour l’artisanat, le commerce… La réponse dépend notamment du nombre de jours de télétravail par semaine que les employeurs vont devoir négocier ou renégocier avec les partenaires sociaux. Trouver le bon équilibre va être un exercice délicat, car la mise en place de dispositif de télétravail va devenir un élément différenciant pour attirer les talents et risque donc de renforcer la concurrence entre les employeurs. D’où la nécessité de se démarquer via sa marque employeur. Un élément à ne pas perdre de vue au moment où la situation sur le marché du travail se tend et notamment pour les profils clés…
