logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Le fait de la semaine

La Qualité de Vie au Travail, une arme anti-crise

Le fait de la semaine | publié le : 14.06.2021 | Lys Zohin

Image

Conditions de travail : La Qualité de Vie au Travail, une arme anti-crise

Crédit photo Lys Zohin

Avec le thème « travailler ensemble », l’édition 2021 de la Semaine pour la qualité de vie au travail, organisée par le réseau Anact-Aract du 14 au 18 juin, met l’accent sur le collectif et les nouveaux modes de travail, bousculés par la pandémie. Une thématique à spectre large, à réinventer par les DRH.

Le paradoxe est de taille. Mis brutalement, pour nombre d’entre eux, en télétravail du fait de la pandémie, les salariés ont, selon les enquêtes, souffert de l’isolement, d’une surcharge de travail, d’une porosité trop grande entre vie professionnelle et vie personnelle. Et alors que la rentrée se profile, voilà qu’ils ne veulent pas retourner sur site ! Ou en tout cas, pas dans les mêmes conditions… À leurs yeux, un retour réussi passera par la mise en place de modes de travail hybrides, mi-présentiel, mi-distanciel. « La manière dont le management va prendre en compte les besoins exprimés par les collaborateurs va être clé, relève Pascal Airey, chargé de mission au département Élaboration de solutions de transfert de l’Anact. Les entreprises qui valorisaient déjà la parole des salariés et le dialogue social pour améliorer la qualité de vie au travail ont souvent mieux traversé les confinements en adaptant les façons de travailler, notamment grâce à l’engagement des collaborateurs, et pourront s’appuyer sur ces acquis pour mieux s’adapter à la nouvelle donne socio-économique. »

Dans nombre d’organisations, il va falloir interroger le business model dans son ensemble – des produits et services à offrir à la chaîne d’approvisionnement et de production à mettre en place. Ce qui induira des bouleversements dans les modes de fonctionnement au quotidien. Dans ce contexte, le thème choisi par le réseau Anact-Aract pour l’édition 2021 de la Semaine de la QVT (14 au 18 juin), « travailler ensemble », prend tout son sens. La pandémie a créé bien des fractures entre les membres d’une même équipe, isolés les uns des autres, et entre ceux qui pouvaient télétravailler et ceux contraints d’aller sur site. « Le retour au travail doit se comprendre comme une opportunité de faire émerger une nouvelle organisation de travail, une nouvelle cohésion d’équipe et une nouvelle QVT », résume Agathe Vernerey, coach spécialisée en QVT et conciliation vie professionnelle-vie personnelle.

Retour réussi

Mais avant de contribuer à une refonte complète de l’organisation du travail, les DRH ont une première responsabilité, « celle de s’appuyer sur plusieurs piliers essentiels pour un retour au travail réussi », souligne Bruno Mettling, président fondateur du cabinet de conseil en stratégie de transformation sociale et digitale Topics. Selon lui, il faudra, si nécessaire, réactiver des dispositifs d’accompagnement pour les salariés comme pour les managers, s’assurer que la communication sur l’état de l’entreprise soit claire, afin de dissiper autant que faire se peut les inquiétudes des collaborateurs, plancher sur une nouvelle organisation du travail afin de redynamiser l’engagement des salariés et mettre en chantier une transformation managériale, compte tenu de l’autonomie que les équipes ont expérimentée ou conquise durant les confinements. Bref, mettre au centre du jeu la qualité de vie au travail, au sens large du terme.

« Il faut avoir une réflexion à 360 degrés et revenir aux fondamentaux, souligne Karim Chérif, expert RH et associé au cabinet Magellan, spécialisé en conseil en stratégie, management et systèmes d’information. D’ailleurs, je préfère le terme d’engagement collaborateur à celui de QVT. » Pour ce spécialiste, la qualité de vie au travail englobe tout : le mode de travail, la charge de travail et les conditions de travail, ainsi que le relationnel dans les équipes et le management, sans oublier les perspectives d’évolution et de carrière pour les collaborateurs… « Et le garant de l’équilibre, c’est le DRH, sinon, le manager s’orientera vers ses besoins et ses objectifs avant tout. Et c’est également vrai de la direction ou du collectif de salariés », précise-t-il. Il est probable que les DRH privilégient, dans un premier temps, certaines populations de salariés, les jeunes notamment, puisque ce sont eux qui ont le plus souffert du télétravail, en raison du manque de contact avec leurs pairs ou de supervision de la part de professionnels plus aguerris. Ou des managers qui ont été mis sous pression par leurs équipes comme par leur management, voire pris en tenaille entre des collaborateurs qui avaient changé et les directions qui n’avaient pas forcément suivi le même chemin…

Risques latents

Les risques, si ces présupposés ne sont pas pris en compte, sont élevés : « absentéisme, accidents pendant et après le travail, risques psychosociaux, turnover… », énumère Denys Brunel, président du Service aux entreprises pour la santé au travail (SEST). Son propre cabinet de conseil, Eleas, spécialiste du management de la QVT et de la prévention des risques psychosociaux (RPS), propose d’ailleurs aux entreprises de mettre en place de véritables objectifs chiffrés. Les bonnes pratiques en matière de QVT ne sont pas l’apanage des grands groupes. Les PME peuvent prendre des initiatives originales, à l’instar de la société d’assurance en ligne Easyblue. « Nous avons lancé, pour nos 18 salariés, un système d’ange gardien anonyme, chacun tirant au sort une personne à protéger pendant plusieurs semaines », explique François-Xavier Combe, fondateur et PDG de l’entreprise. Il a, par exemple, veillé sur un alternant stagiaire et il a lui aussi eu un ange gardien… Alors que le moral des collaborateurs, suivi à l’aide d’un questionnaire mensuel, était descendu à 3,9 sur une échelle de 5 dans les équipes, il est remonté à 4,4, à la suite de cette initiative, mise en place à deux reprises, et associée à d’autres comme des pauses formelles pour parler d’autre chose que du travail.

Moral en hausse et risques psychosociaux en baisse, tel est donc le double objectif à atteindre pour les équipes RH. Même si, comme le souligne Bruno Mettling, « les entreprises ne peuvent pas être mises en cause juridiquement pour manquement à la QVT, mais elles sont pénalement responsables pour les RPS ». Si le « potentiel RPS » était déjà présent dans l’entreprise, « la période de retour au travail risque de l’exacerber », prévient la coach Agathe Vernerey. Gare aux dégâts collatéraux ! « Encore faut-il, pour agir dans ces domaines, que les directions soient convaincues du vrai plus des actions QVT : elles sont une composante de la performance », complète Denys Brunel, du SEST. C’est ce qu’entend démontrer, aussi, la Semaine de la qualité de vie au travail. Car pour certains observateurs, la QVT serait, dans le contexte actuel, l’arme anti-crise par excellence !

Auteur

  • Lys Zohin