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Thierry Teboul, directeur général de l’Afdas : « La bascule entre pro et apprentissage est complexe et multifactorielle »

Le point sur | publié le : 07.06.2021 |

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Thierry Teboul, directeur général de l’Afdas1 : « La bascule entre pro et apprentissage est complexe et multifactorielle »

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Pour l’Afdas(1), les nouveaux modes de financement de l’alternance n’expliquent pas à eux seuls le transfert de la professionnalisation vers l’apprentissage. L’Opco vient de lancer une enquête pour tenter d’en déterminer les causes.

Pourquoi la mise en œuvre d’une telle enquête ?

Fin 2020, l’Afdas recensait une hausse de 15 % des contrats d’apprentissage (23 500) en même temps qu’une baisse de 20 % des contrats de professionnalisation (6 780). Nous avons l’intuition que la bascule automatique des contrats de pro vers l’apprentissage, consécutive aux nouveaux modes de financement, n’explique pas ce différentiel à elle seule. Les raisons en sont certainement plus complexes et multifactorielles. Par exemple, en 2019, 40 % des contrats de professionnalisation du périmètre de l’Afdas étaient qualifiants, reconnus par une convention collective de branche. En 2020, ce ratio n’était plus que d’un sur six. Pourquoi ? On peut imaginer que cette baisse de la pro s’explique en partie parce que plusieurs de ces contrats s’inscrivaient dans un processus de prérecrutement qui n’a pas eu lieu ou qu’ils sont entrés en concurrence avec certains dispositifs du plan « 1 jeune, 1 solution » et les aides au recrutement. Par ailleurs, n’oublions pas que beaucoup de contrats d’apprentissage dans le périmètre de l’Afdas sont réalisés dans le cadre de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur. On ne peut pas écarter la possibilité qu’un certain nombre de cursus hier réalisés sous statut étudiant le sont désormais sous celui d’apprenti – qui permet au jeune d’être salarié le temps de son parcours. Notre étude permettra sans doute d’y voir plus clair.

Certaines branches de l’Afdas étaient historiquement attachées au contrat de pro. Y constatez-vous la même bascule ?

Plusieurs de nos secteurs, comme l’audiovisuel ou le spectacle vivant, demeurent des utilisateurs de contrats de pro et de CQP. Dans le cadre de l’enquête, nous verrons si de nouvelles entreprises consommatrices d’alternance sont allées vers l’apprentissage suite aux campagnes de promotion du gouvernement ou aux aides financières de l’État. Pour l’instant, la tendance qui se dessine, c’est que les entreprises « primo accédantes » à l’alternance choisissent plutôt le contrat d’apprentissage. Il faudra affiner cette perspective en regardant leurs comportements les années suivantes.

Comment voyez-vous l’avenir du contrat de professionnalisation ?

Ironie de l’histoire, on pourrait assister à une forme de « retour vers le futur », c’est-à-dire un retour à ce qui était la vocation du contrat de qualification (1982-2006) : qualifier et professionnaliser ! Il avait fini par évoluer vers du diplômant alors qu’il n’avait pas été créé pour cela. Régulièrement, à chaque réforme ou presque, on repose la question de la fusion entre contrat d’apprentissage et contrat de pro. Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. À l’Afdas, les entreprises font un usage différent des deux. Les deux contrats n’ont ni le même rapport formation-emploi, ni la même vocation. L’apprentissage reste avant tout un mode pédagogique de formation initiale qui permet, par exemple, la poursuite d’études après l’obtention de la qualification. La professionnalisation s’inscrit davantage dans une logique d’expertise métier, plus « adéquationniste » entre ce à quoi on se forme et le métier qu’on va exercer. Ce que souhaitent en revanche les entreprises et sans doute les bénéficiaires, c’est une harmonisation des conditions d’emploi – charges, rémunération. Il est probable que, le cas échéant, on entendra moins parler de fusion inéluctable !

(1) Opco de la culture, des industries créatives et récréatives (dont le sport), et des télécommunications.