La formation, chez Renault Trucks, est permanente. Si le turn-over n’est pas plus important qu’ailleurs, certains métiers comme celui de technicien garagiste sont en réelle tension. « Nous recrutons tout le temps. Nous avons besoin d’aller chercher de nouvelles compétences de techniciens en atelier. Même avec les CFA partenaires, le vivier n’est pas suffisant », confirme Nathalie Fontaine, DRH de Renault Trucks France. Jeunes ou plus âgés, tous les profils intéressent la DRH, y compris les personnes en reconversion. C’est le cas, par exemple, d’un ancien cuisinier de 35 ans. L’envie de s’investir et l’habitude de faire de la mécanique dans son garage ont fait de son profil une recrue intéressante, qui pourra décrocher un certificat de qualification professionnelle « mécanicien spécialisé véhicules utilitaires et industriels ». Au terme d’une formation professionnalisante qui s’étalera sur dix à quinze mois selon les régions, un contrat à durée indéterminée lui sera proposé. En 2020, ce sont 1 785 apprenants (chiffres peu représentatifs du fait de la crise sanitaire) qui ont été formés contre 3 459 en 2019.

Outre ces formations en présentiel, l’équipe du service des ressources humaines a développé des classes virtuelles destinées aux commerciaux qui travaillent dans les concessions. Sur la forme, la crise sanitaire est passée par là. Et le format digital s’est imposé. « C’est différent d’une formation en présentiel dans la mesure où les classes virtuelles sont limitées à huit personnes. En outre, le contenu a été revu pour rendre l’apprentissage le plus interactif possible », explique Nathalie Fontaine. Pour éviter que les apprenants restent passifs derrière leur écran, voire ne fassent autre chose, la formation ne dépasse pas deux heures et multiplie quiz, exercices et autres sollicitations.

Sur le fond, les contenus évoluent pour s’adapter à une industrie en pleine transformation, car d’une entreprise qui vend des camions, Renault Trucks est devenue aussi une société qui vend des services. Ainsi, les derniers modules développés concernent la garantie, la réception du véhicule ou l’utilisation d’un nouvel outil informatique pour les commerciaux. Démarrées au mois de juin 2020, les classes virtuelles sont jugées plus efficaces que les formations classiques par les personnes qui ont été formées. « Lors d’une journée de formation en présentiel, on peut papillonner et être moins attentif. Être seul et concentré pendant deux heures face à son écran est plus productif. » À tel point que les équipes en charge de la formation vont développer en interne des supports digitaux encore plus courts de type tutoriels et capsules vidéos.

À l’issue d’une formation commerciale sur la pièce de rechange ou le métier de réceptionnaire, par exemple, un « ancrage mémoriel » est envisagé à travers de très courtes séquences utilisant des environnements multimédias. Plus simplement, il s’agit de réviser et de vérifier si les connaissances ont bien été acquises. L’application Games of trucks, clin d’œil à la série télévisée, permet à l’apprenant de réactiver ses connaissances à travers les questions d’un jeu. Au final, un classement vient hiérarchiser les résultats des participants. Il n’y a rien à gagner si ce n’est l’estime de ses collègues. Ce format d’apprentissage court s’insère facilement dans l’emploi du temps de l’apprenant : dans les transports en commun, lors d’une quelconque pause. Cette répétition sous forme ludique permet aux connaissances de s’ancrer durablement dans sa mémoire.

Former à distance évite les déplacements des collaborateurs partout dans l’hexagone. Mais, contrairement à l’idée reçue, ces formations coûtent plus cher. « D’une part, il y a moins de personnes formées puisque nous limitons l’accès à de petits groupes. D’autre part, la présence du formateur n’est pas rentabilisée : avant il enseignait pendant une journée, il n’intervient désormais que lors de deux modules de deux heures », indique la DRH. Mais si Renault Trucks France s’investit autant dans la formation, c’est parce qu’elle dépasse le cadre des compétences. L’enjeu est aussi d’attirer et de retenir les talents.