Avant mars 2020, « cette année s’annonçait comme la meilleure pour le recrutement des cadres, avec 300 000 offres d’emploi… Nous étions sur des rails, dans une dynamique extrêmement positive. En un an, tout a changé », rappelle Laurent Da Silva (Medef), vice-président de l’Apec. Aujourd’hui, loin de la perspective d’un plein emploi des cadres imaginable avant la crise, l’Apec doit clairement se repositionner à la fois auprès des candidats et des entreprises pour répondre à des évolutions profondes du marché. Réaffirmer des valeurs et questionner sa raison d’être en associant les parties prenantes, tel a été le premier acte. En septembre 2020, « nous avons lancé une démarche participative en interne avec les membres du conseil d’administration et l’ensemble des collaborateurs, et en externe avec les clients et partenaires, pour comprendre la réalité des faits et identifier les nouveaux besoins du marché de l’emploi, que nous avons ainsi pu conceptualiser », explique Christine Lê (CFE-CGC), présidente. Concrètement, l’association a dû faire face à l’urgence, en prenant en compte la situation particulière de jeunes diplômés particulièrement affectés. « Nous avons fixé, dès l’été 2020, notre priorité sur l’action en direction des jeunes diplômés, poursuit Gilles Gateau, directeur général de l’Apec, avec l’objectif, que nous sommes en train d’atteindre, d’accompagner 50 000 jeunes d’ici à l’été 2021, soit en multipliant par 2,5 le volume habituel. Nous avons proposé avec nos moyens propres une nouvelle prestation d’atelier premier emploi, comprenant des groupes de six à huit jeunes diplômés qui ont bénéficié d’un “kit de survie dans la crise”. Et, avec le soutien de l’État, ce qui était nouveau pour nous, nous avons pu recruter quelques dizaines de consultants en contrat à durée déterminée, pour toutes nos délégations régionales. » À l’autre bout de la chaîne générationnelle, l’Apec a également lancé le 23 mars 2021 dans sept régions une opération « Talents seniors », déjà testée dans deux régions pilotes en 2019. Objectif : aider le retour à l’emploi de cadres seniors, épaulés par un.e consultant.e de l’Apec et mentorés par des chefs d’entreprise, cadres dirigeants, décideurs institutionnels ou élus pendant un an.

Au-delà de ces actions, le travail engagé par l’Apec veut refléter et accompagner les transitions en cours, pour préparer ses orientations stratégiques. « L’affirmation de notre raison d’être ne concrétise pas une nouvelle stratégie, précise Gilles Gateau. C’est beaucoup plus que ça. Elle va inspirer les orientations stratégiques et le nouveau mandat de service public. Par exemple, l’Apec n’a pas vocation à travailler seule, nous avons une expertise reconnue sur l’emploi cadres et nous allons aller plus loin dans la construction des partenariats. » Se voulant « inclusive », cette démarche s’est notamment concrétisée par la signature d’une convention de partenariat avec l’Agefiph (Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées) pour accompagner l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. La prise en compte des nouvelles manières de vivre le travail est également au cœur des réflexions. Des évolutions qui se ressentent dans les attentes des candidats à l’emploi, plus exigeants vis-à-vis des employeurs. « Le premier bouleversement est la généralisation du télétravail, précise Gilles Gateau. Il impacte les cadres, en tant que salariés et aussi en tant que managers. Nous constatons que la façon dont les recruteurs prennent en compte cette donnée dans le processus de recrutement, en étant au clair sur le cadre du travail à distance, devient un élément de choix pour les candidats, au même titre que le salaire auparavant. » Autres critères de choix, « l’attention portée aux collaborateurs, l’utilité sociale des entreprises… Le rôle de l’Apec est d’aider les entreprises, y compris dans la rédaction des offres pour mettre en avant de bons arguments », poursuit-il. Amplifier son rôle de conseil et son rôle social, avec un travail de proximité et d’observation fine du marché de l’emploi par l’intermédiaire de son observatoire… autant de missions à réaffirmer à la veille de son troisième mandat de service public.