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Les clés

Un autre regard sur les inégalités

Les clés | À lire | publié le : 12.04.2021 | Lydie Colders

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Un autre regard sur les inégalités

Crédit photo Lydie Colders

Dans Encore plus !, Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités, fustige « l’hypocrisie française » en matière d’égalité des chances, de l’école au travail. Il n’y a pas que les 1 % de « super riches » et, pour lui, il faudrait s’occuper du fossé qui se creuse entre les cadres « aisés » et les travailleurs modestes. Un éclairage intéressant.

Dans ce livre engagé, très politique, Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités, qui publie chaque année son baromètre, rebat les cartes des inégalités. Il fustige le « mépris » et la « démagogie » de la classe politique de tous bords qui ne cesse d’invoquer « les fractures sociales » mais continue malgré tout de « célébrer les premiers de cordée ». Il faut dire que le parti-pris de l’association ne fait pas l’unanimité. Loin des grandes fortunes, l’auteur fixe le seuil de richesse, en termes de salaire, « à 3 500 euros pour une personne seule ». Trop bas ? « C’est oublier que 92 % de la population vit avec moins », défend-il. Pour lui, le fossé se creuse donc entre les cadres supérieurs aisés, soit « un cinquième des emplois », les classes moyennes et surtout « les plus populaires ». En particulier les « 30 % aux revenus les plus faibles », qui gagnent 1 400 euros net par mois et par personne, après aides sociales. Pour cette catégorie hétéroclite (salariés en CDD, intérimaires mais aussi indépendants modestes) « qui n’avait pas de quoi voir venir », le choc du premier confinement a été « particulièrement violent » rappelle-t-il, alors que les plus aisés ont vu leur « épargne progresser ». La frustration gronde, et l’auteur dit craindre « des tensions sociales » à l’avenir.

« Insécurité grandissante »

Sans excès, il analyse la « flexibilité » qui augmente : entre chômeurs, précaires et salariés à temps partiel, « le mal emploi » concernait environ 8 millions de personnes en 2019, selon ses calculs. Et c’est sur ce « déclassement social », abandonné à gauche comme à droite, qu’il faudrait agir en priorité. Louis Maurin milite pour un revenu de base de 900 euros, détaillé dans son livre. S’il plaide pour augmenter « le coût de la flexibilité » des contrats courts ou les droits au chômage, il note aussi des points positifs : un état social fort en France, la lutte contre les discriminations ou la bataille pour le salariat des « ubérisés » qu’il faudrait élargir. Idem, malgré les lois travail qui réduisent « les droits des salariés par petites touches », le législateur « n’a pas massivement dérégulé le marché du travail » comme outre-Manche, tempère-t-il. Il y aurait donc matière à « espérer », et l’auteur jette quelques idées pour « combattre » ces injustices sociales : réguler les marchés, sortir de la course à la compétition à l’école et dans les entreprises. Le travail doit changer, et Louis Maurin invite les grands groupes à « réduire la hauteur des pyramides » qui empêchent « ceux du bas de progresser » ou à s’inspirer de la cogestion à l’allemande pour démocratiser le travail. Des idées classiques. Mais cette autre vision des inégalités, bien documentée, interpelle.

Auteur

  • Lydie Colders