Pour compléter le dispositif 1 jeune 1 solution, le gouvernement lance une nouvelle mesure : 1 jeune 1 mentor, dans le but d’accompagner davantage les jeunes vers l’emploi. Un budget de 30 millions d’euros y est alloué pour cette année, afin de soutenir les associations et les entreprises qui pratiquent le mentorat.
Alors que certains quartiers sensibles ont connu dernièrement des accès de violence entre jeunes, le gouvernement, conscient des problèmes liés à la pandémie et aux difficultés d’entrer dans le monde du travail, surtout sans diplôme ni formation, a lancé une nouvelle initiative, fondée sur le mentorat des jeunes. Elle vient compléter le dispositif 1 jeune 1 solution, mis en place à l’été 2020, en vue d’accompagner les jeunes vers l’emploi. D’un montant de 7 milliards d’euros, le dispositif 1 jeune 1 solution vise à proposer une solution adaptée aux besoins de chaque jeune – emploi, formation ou accompagnement vers l’emploi pour ceux qui sont le plus en difficulté. En 2021, plus de 2 millions de ces « solutions » devraient ainsi être proposées aux jeunes. C’est à l’occasion d’un déplacement à Stains, en Seine-Saint-Denis, le 1er mars dernier, sur le Campus Industreet, en présence d’Élisabeth Borne, ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, de Sarah El Haïry, secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et de l’Engagement et de Thibaut Guilluy, haut-commissaire à l’Emploi et à l’Engagement des entreprises, que le président de la République a officiellement lancé l’opération 1 jeune 1 mentor, assortie d’un budget de 30 millions d’euros pour 2021, afin de soutenir les associations et les entreprises en matière de mentorat. Concrètement, il s’agit de faire bénéficier les jeunes de conseils professionnels d’un mentor – un actif ou un retraité. Ce dernier va les accompagner, parfois dès le début du collège, sur le moyen-long terme, en leur consacrant une à deux heures par mois. Le service devrait être opérationnel prochainement. Quelque 100 000 jeunes seront suivis en 2021 par des adultes volontaires pour les aider dans leurs parcours, selon Emmanuel Macron. De fait, l’ambition du gouvernement est d’augmenter le nombre de « mentorés » de 25 000 à 100 000 fin 2021, puis à 200 000 en 2022. Dans quelques jours, il sera possible de signaler son intérêt en ligne sur le site 1jeune1solution.fr pour avoir accès à un mentor ou devenir mentor soi-même. Plusieurs associations, comme Chemin d’avenir, Article 1, Télémaque ou WeTechCare, des start-up, comme My Job Glasses, et de grandes entreprises, dont AXA, Accenture, BNP Paribas, General Electric, Total… sont déjà impliquées dans des actions de mentorat.
Le plan 1 jeune 1 solution porte déjà ses fruits : selon l’exécutif, 1,3 million de jeunes de moins de 26 ans ont été embauchés en CDI ou CDD de plus de trois mois ces six derniers mois, soit quasiment autant qu’en 2018 et 2019 à la même période, et plus de 500 000 contrats d’apprentissage ont été signés en 2020. Enfin, 600 000 jeunes en difficulté ont été accompagnés vers l’emploi. Pourquoi, alors, développer le mentorat ? « Parce que c’est très utile lorsqu’on n’a pas de réseau », répond Hélène Ettoumi, une jeune étudiante en troisième année de licence à l’Institut d’administration des entreprises de l’université Jean Moulin Lyon3. Sa mère, carreleuse, qui élève seule ses trois enfants, n’en avait pas, pas plus que les moyens de financer des études dans une grande école de commerce pour sa fille. La conseiller sur son avenir professionnel lui était difficile. « J’ai entendu parler d’Article 1, une association qui œuvre pour l’égalité des chances, et de son programme de mentorat. J’ai pensé que cela me serait utile pour trouver des réponses à mon questionnement sur mon avenir », poursuit la jeune étudiante.
C’est Valérie Langlois, chargée du sourcing international chez General Electric, et volontaire pour être mentor, qui a été fléchée, en fonction de son propre parcours. Elle a fait une classe préparatoire comme Hélène, puis intégré une école d’ingénieur. Une première rencontre a eu lieu en 2019 et depuis, mentor et mentorée se retrouvent régulièrement – avant la pandémie autour d’un café, et désormais par visioconférence. « C’est un mentorat à durée indéterminée », explique Hélène Ettoumi, ravie d’avoir trouvé, surtout ces derniers temps, quelqu’un pour lui redonner du tonus et l’envie d’étudier. « Valérie est à l’écoute et elle a confiance en moi », ajoute l’étudiante. Autant d’éléments qui manquent souvent aux jeunes, en particulier « ceux qui sont déboussolés, ou sortis du système scolaire, dit-elle. Le mentorat, pour ces jeunes-là, est encore plus utile, afin d’avoir un modèle sur lequel s’appuyer. »
Non seulement les jeunes mentorés semblent satisfaits, mais les mentors aussi ! Dans le cadre de leur démarche RSE, nombre d’entreprises lancent des initiatives en ce sens. Et les salariés volontaires répondent à l’appel, soucieux, encore plus aujourd’hui qu’hier, de se montrer solidaires. Cette volonté de se rendre utiles semble apporter un sens supplémentaire à leur vie professionnelle. « Nos collaborateurs nous le demandent, confirme Emmanuelle Lacroix, responsable partenariats pour la fondation du groupe Cornerstone. C’est pour eux une façon de redonner à la société. Et s’ils pratiquent parfois le mentorat à titre individuel, ils souhaitent que cela fasse partie des valeurs de l’entreprise. Chez nous, c’est le cas, ce n’est pas une simple façade. ». Ainsi, en 2018, le groupe spécialisé dans les solutions RH a noué un accord avec Nos quartiers ont du talent pour du mentorat de jeunes. Si le nombre de mentorés est encore restreint – une quinzaine environ pour autant de mentors – la volonté des salariés du groupe n’a fait qu’augmenter avec la crise. « Nos collaborateurs sont nombreux à nous demander de nouer de nouveaux partenariats avec des associations », poursuit-elle.
Les signaux semblent au vert pour que la nouvelle initiative gouvernementale monte en puissance. Bien sûr, cela ne suffira pas. Au-delà du mentorat, encore faut-il qu’il y ait des emplois à prendre… En outre, « je pense qu’un revenu universel, sous certaines conditions d’éligibilité, serait une bonne chose, relève Hélène Ettoumi. Sinon, les soucis d’argent prennent toute la place et empêchent de se concentrer sur les études, et même d’avoir de l’ambition. »