Quatre branches, 300 organismes, 150 000 collaborateurs : la sécurité sociale est l’un des premiers recruteurs en France. Avec, cette année encore, quelque 10 000 postes à pourvoir, comme l’explique le directeur de l’Union des caisses nationales de sécurité sociale (Ucanss).
La Sécurité sociale est organisée autour de quatre grands réseaux qui composent le régime général : famille (CAF), maladie (CPAM, DRSM, Ugecam, CGSS…), retraite (Carsat, CGSS…) et recouvrement (Urssaf). L’Union des caisses nationales de sécurité sociale (Ucanss) fédère et soutient ces quatre branches nationales et les 300 organismes locaux qui s’y rattachent partout sur le territoire. Elle pilote et anime des démarches mutualisées au service des organismes locaux et nationaux : dialogue social, négociation et conclusion d’une dizaine de conventions et accords collectifs par an, appui au développement RH des organismes et gestion de certains champs communs : politique d’achats, immobilier, formation, communication sur la marque employeur.
Au total, la Sécurité sociale représente un effectif de 150 000 personnes, dont seulement 220 à l’Ucanss. Parce qu’elle remplit une mission de service public, la Sécu est souvent associée dans l’esprit de nos concitoyens et dans les médias à une structure administrative employant des fonctionnaires. Or, tous les salariés, dans toutes les branches et tous les organismes, sont sous contrat de droit privé. Ils sont rattachés à une même convention collective. Plus exactement d’ailleurs à trois conventions, l’une pour les 145 000 employés et cadres, une autre pour les 2 000 praticiens-conseil de la branche maladie et une troisième pour les 2 000 agents de direction.
La Sécu compte parmi les premiers recruteurs de France. Chaque année, elle intègre près de 10 000 nouveaux collaborateurs, dont 6 000 à 7 000 en CDI. Le site Lasecurecrute.fr propose en moyenne 800 postes à pourvoir à des niveaux d’études allant de bac à bac+ 5 et sur plus de 80 métiers : relation client (téléphone, mail, accueil), gestionnaire conseil (traitement des dossiers), managers, fonctions support et expertes (juriste, RH, inspecteur du recouvrement, informatique, etc.). Depuis une vingtaine d’années, nous sommes cependant sur une courbe baissière. Cela s’explique essentiellement par la numérisation de nos processus et les gains de productivité associés. Ce, alors que le système de protection sociale s’est fortement étoffé et que la demande de soins a continué de progresser. Toute l’activité de saisie des justificatifs de ressources ou des feuilles de soins, qui occupait des milliers de personnes, est aujourd’hui digitalisée. Les services en ligne se sont fortement développés (demandes de prestations) et les ressources sont automatiquement puisées dans la déclaration sociale nominative. Les activités sans valeur ajoutée disparaissent à mesure que nos métiers évoluent en termes d’expertise et d’accompagnement des populations les plus fragiles. Pour illustration, en 2019, la Sécu employait 140 000 personnes, contre 156 000 personnes en 2010. Si on compte 150 000 emplois aujourd’hui, c’est qu’entre-temps nous avons intégré le RSI. Mais, structurellement, la tendance est à la diminution des effectifs.
Nous ciblons notamment les plus jeunes et les personnes durablement éloignées du marché de l’emploi. L’idée est de les informer des différentes opportunités et perspectives proposées par nos organismes. Avec la signature de cette campagne, « Je suis ce que je fais », nous avons souhaité valoriser l’engagement au quotidien des collaborateurs de la Sécurité sociale, particulièrement remarquable depuis le tout début de la période de crise que traverse la société tout entière depuis un an. En janvier 2021, le site Lasecurectrute.fr a comptabilisé 520 000 visiteurs, soit 200 000 de plus qu’en janvier l’an dernier. En outre, le nombre moyen de CV par offre est passé de 11,4, à 22,3.
La question de l’attractivité se pose plus particulièrement en Ile-de-France et dans les grandes métropoles. Une annonce pour un emploi de gestionnaire conseil à bac+2 publiée en Mayenne va facilement drainer 200 candidatures. À Créteil, dix fois moins. Notre image est en décalage avec la réalité. L’institution s’est profondément transformée et modernisée en lien avec la digitalisation de nos processus et de nos flux. Cette transformation s’est accompagnée d’une montée en compétences sur nos principaux métiers. Les cadres représentent aujourd’hui 38 % de nos effectifs. Grâce à notre organisation en réseaux, nous avons une capacité à offrir de vraies perspectives de carrière et de nombreuses possibilités de mobilité, tant géographique que fonctionnelle. 4,9 % de la masse salariale est dédiée à la formation professionnelle. En 2020, plus de 76 % des salariés ont bénéficié d’une formation.
Avec des besoins et des ressources très variables, puisque la plus petite CAF emploie moins de 100 salariés, alors qu’une structure comme l’Urssaf Ile-de-France en compte plus de 2 000. Localement, la gestion des ressources humaines s’exerce dans un cadre conventionnel commun qui est toutefois adossé à des directions propres à chacune des branches. La stratégie de recrutement est par ailleurs encadrée par des contrats quinquennaux d’objectifs et de moyens négociés avec l’État, qui fixent pour chacune des branches un plafond d’effectifs, en tenant compte des flux sortants, soit annuellement 5 000 départs en retraite, 1 300 démissions, 1 300 licenciements et ruptures conventionnelles.
La crise de la Covid-19 a représenté un défi à la fois inédit et immense pour la Sécu, qui a joué un rôle de tout premier plan en tant qu’amortisseur social. Tout en protégeant les salariés, il a fallu assurer la continuité du service public dû à nos concitoyens (couverture maladie, pensions de retraite, allocations familiales, RSA, etc.) et aux entreprises (accompagnement des mesures gouvernementales…). Les salariés des quatre branches se sont mobilisés pour verser les prestations en temps et en heure. Et l’accueil du public, notamment des plus fragiles, a continué d’être assuré pour éviter toute forme de fracture numérique. Nous avons également dû nous réinventer pour investir de nouvelles missions et de nouveaux métiers, notamment le contact tracing. Ce sont ainsi 1 200 CDI et près de 6 000 CDD qui sont à pourvoir sur cette mission.
L’Ucanss représente un cas un peu particulier puisque le télétravail avant la crise concernait déjà 55 % de nos collaborateurs, à raison d’un ou deux jours télétravaillés par semaine. Parlons plutôt des quatre branches du régime général où, depuis un accord de 2017 prévoyant la possibilité de télétravailler jusqu’à trois jours par semaine, entre 10 % et 15 % des personnels avaient déjà accédé à ce nouveau mode d’organisation. Dès le premier confinement, décision a été prise par les quatre directeurs généraux de basculer massivement en télétravail. En deux ou trois semaines, entre 60 % et 90 % des effectifs travaillaient à distance. Quand la situation reviendra à la normale, le télétravail se sera installé dans nos habitudes. Il devrait à terme concerner plus de 50 % de nos collaborateurs. C’est au demeurant devenu un argument d’attractivité. Pour autant, si l’on veut maintenir un collectif de travail et éviter les situations d’isolement, il apparaît souhaitable de rester sur une organisation mixte couplant travail sur site et travail à distance. La renégociation de notre accord est, en tout état de cause, inscrite au programme de nos discussions avec les partenaires sociaux en 2021.
Juriste de formation, titulaire d’un DESS de gestion, Raynal Le May dirige l’Ucanss depuis juillet 2018. Il était auparavant directeur de la CPAM du Val-de-Marne et directeur coordonnateur de la lutte contre la fraude pour la région Ile-de-France. Il a également enseigné la protection sociale en tant que chargé de cours à l’université de Marne-la-Vallée.