logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Chroniques

Jean Pralong : L’expertise du Lab RH

Chroniques | publié le : 15.03.2021 | Jean Pralong

Image

Jean Pralong : L’expertise du Lab RH

Crédit photo Jean Pralong

Ressources Humaines, un an après

Voici un an que la pandémie s’est abattue sur nos vies et sur nos organisations. Un an, donc, que les équipes RH jonglent avec les annonces gouvernementales, les accords de télétravail et la digitalisation à marche forcée. La résilience n’est plus une notion abstraite. Que s’est-il passé en un an ? Quelles digues ont résisté ? Quelles autres ont cédé ? Et quelles autres, à bas bruit, menacent de rompre ?

Il faut sans doute se féliciter de la rapidité et de l’efficacité avec lesquelles les équipes RH ont géré les aspects administratifs de la crise. Les problèmes juridiques liés au temps partiel, au chômage partiel ou au télétravail ont été rapidement traités. Reste le télétravail, à la fois vrai problème et problème symbole de tous les autres. C’est un vrai problème, car les capacités individuelles à travailler à distance et à tirer profit des outils digitaux sont inégales. Que reste-t-il à faire lorsque tous ont été équipés et formés ? Faut-il se satisfaire des discours qui vantent le maintien de la productivité ? Sans doute pas : le temps de travail réel, la charge mentale ou le stress augmentent. Et c’est bien compréhensible : comment autrement, sinon par miracle, les salariés seraient-ils plus productifs dans des conditions dégradées que dans des conditions normales ? Ici, donc, un premier sujet d’inquiétude : comment connaître les pénibilités réelles, physiques et mentales, de populations hétérogènes par leurs emplois, leurs aptitudes ou leurs ressources ?

Le télétravail est aussi un problème symbole. Il évoque la résistance des équipes et leur volonté de travailler malgré tout. Mais il engage et révèle les cultures managériales réelles. Déléguer et piloter les équipes qu’on avait sous ses yeux était un exercice de débutant, une traversée de piscine à la brasse. Gérer des travailleurs à distance serait plutôt l’apnée en eau trouble. Malgré des discours bienveillants, largement incités par les circonstances, rares sont ceux qui parviennent vraiment à faire confiance à ceux qu’on ne voit plus. L’absence crée des trous de sens, que l’imaginaire ne laisse pas longtemps vacants. Comment comprendre que le téléphone sonne dans le vide, que les e-mails restent quelques heures sans réponses ? Les managers luttent désormais contre leurs croyances. Verre à moitié vide : le travail à distance ébrèche la confiance dans des organisations où, pourtant, elle semblait établie. Verre à moitié plein : l’effet laboratoire des circonstances actuelles permet de repérer des dysfonctionnements qui seraient restés cachés et que l’avènement du future of work aurait révélés trop tard.

Enfin, le télétravail est peut-être aussi le symbole de ce qu’on ne veut pas voir de cette époque. Comme l’arbre qui cache la forêt, l’abondance des discours sur les réunions Zoom éclipse d’autres problèmes : les efforts pour professionnaliser le recrutement, les investissements pour construire une marque employeur différenciante, la rénovation des carrières semblent au point mort. On peut comprendre que ces actions attendent des jours meilleurs. On comprend donc qu’y répondre engage les deux questions les plus anxiogènes du moment : quand, et pour quelle économie ?

Auteur

  • Jean Pralong