Dans ce recueil de chroniques, Arnaud Tonnelé explore avec humour le hiatus des méthodes de management déconnectées de la réalité des salariés. Patrons, DRH, chacun en prend gentiment pour son grade dans sa revue du fake management. Savoureux.
Dans ce recueil de chroniques, Arnaud Tonnelé explore avec humour le hiatus des méthodes de management déconnectées de la réalité des salariés. Patrons, DRH, chacun en prend gentiment pour son grade dans sa revue du fake management. Savoureux.
Les patrons et les DRH feraient-ils preuve de « paresse » en appliquant des concepts managériaux en vogue et en confondant causes et conséquences ? « L’époque ne s’encombre guère de raisonnement, de complexité », note le coach en organisation Arnaud Tonnelé dans son livre. Le fossé entre le vécu des salariés et les méthodes des dirigeants a beau se creuser, il s’étonne que ces derniers persistent dans l’erreur, avec des programmes de management qui « ratent leur cible ». Pourquoi la connaissance des salariés joue-t-elle un si faible rôle, alors qu’il est question partout de monde complexe ? Comment expliquer que des entreprises qui « s’échinent à devenir agiles » maintiennent un management par objectif « à l’antithèse » de la souplesse recherchée ? interroge-t-il. L’une des raisons serait qu’un directeur général s’entête à avoir raison envers et contre tout, « même lorsque sa stratégie ou son projet ne marche pas bien ». « Le pouvoir, c’est précisément cela : avoir le luxe ne pas se remettre en cause », pointe le coach. Avec humour, son livre, recueil de chroniques publiées sur LinkedIn, illustre de cette curieuse croyance « qui fait préférer les idées séduisantes aux idées justes ». Management, leadership, innovation, tout y passe dans sa revue illustrée du bullshit management.
Toutes ses brèves chroniques ne se valent pas, mais certaines sont jubilatoires, comme celle titrée « Il y a moins bien, mais c’est plus cher », ou comment échouer avec des solutions ultra-rationnelles et coûteuses. Exemple : ce directeur d’un cabinet de conseil qui, estimant « que les consultants ne partagent pas assez leurs méthodes, sources de perte de temps et d’efficacité pour les propositions commerciales », charge la DRH de créer une université numérique interne pour regrouper ces ressources. Résultat : « au bout de six mois et quelques milliers d’heures de travail, la fréquentation de cette université est proche de zéro », et le projet est enterré, relate l’auteur. Qui conclut : « Même vision, même punition : à question de coopération, réponse pour l’outillage ». Patrons enferrés dans les process, DRH du CAC40 coincé « dans un système qu’il a lui-même créé » (attirer les talents alors que la qualité du travail ne suit pas), Arnaud Tonnelé bouscule tout le monde avec une franchise salutaire. Et critique d’un œil amusé les effets de mode, de l’empowerment à la psychologie positive. À lire, cette anecdote croustillante d’un groupe industriel en réorganisation qui a choisi « des journées positives » pour remobiliser ses troupes. L’auteur y décrit des opérateurs n’ayant cure d’être questionnés sur leurs sources « de fierté » par leur manager, qui préféreraient des budgets pour résoudre leurs problèmes quotidiens… Si le coach finit par prêcher pour sa paroisse (partir de l’humain), il jette un regard vivifiant, souvent drôle et pertinent, sur un management hors sol. Un appel à sortir du cadre.