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RSE : La qualité d’entreprise à mission, un atout pour les RH

Le point sur | publié le : 17.02.2021 | Lys Zohin

Selon les prévisions du nouvel Observatoire des entreprises à mission, 10 000 entreprises en France pourraient être à mission en 2025. Un avantage pour la société civile. Et pour les entreprises en matière de gestion RH.

De la loi Pacte à… l’impact. C’est ainsi qu’Olivia Grégoire, la secrétaire d’État à l’Économie sociale, solidaire et responsable auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, décrit le mouvement des entreprises à mission, qui vient de se doter d’un observatoire. Introduite dans le droit français par la loi Pacte de 2019, la qualité d’entreprise à mission séduit de plus en plus. Et la crise, que l’on aurait pu croire un frein – les organisations étant avant tout concentrées sur leur survie – n’y a rien changé. Au contraire. En rebattant les cartes de la stratégie et du sens à donner aux activités, pour l’entreprise comme pour les collaborateurs, elle accroît la dynamique. Alors qu’elles n’étaient encore que 50 en octobre dernier, et parmi elles, des poids lourds « historiques » tels Danone (qui a adopté cette qualité en juin 2020, pour devenir ainsi la première société cotée à le faire), la Maif (juillet 2020) ou la Camif (septembre 2020), elles sont désormais une centaine, dont nombre de PME et d’ETI. De fait, les deux tiers des entreprises à mission comptent moins de 50 salariés. La moitié sont des structures de moins de 10 ans. Et une entreprise sur cinq est « mission native », autrement dit, née avec cette qualité. L’effet d’entraînement pourrait être tel que les experts du nouvel observatoire tablent sur quelque 10 000 entreprises à mission en France en 2025. De quoi créer un impact…

Modèle managérial

Mais, au-delà de l’impact – social, sociétal, environnemental –, la qualité d’entreprise à mission revêt également d’autres avantages pour l’organisation elle-même. L’adoption d’une mission est, comme le souligne Emery Jacquillat, PDG de la Camif, « un levier pour l’innovation et davantage de performance ». Selon le nouvel observatoire, les enjeux qui poussent les entreprises à devenir à mission sont, certes, d’abord d’ordre environnemental et social, mais les thèmes de la marque employeur et de l’engagement des collaborateurs suivent de près… « La raison d’être, puis la mission étant généralement le fruit d’une coconstruction entre direction et salariés, c’est un superbe objet partagé, qui va dans le sens d’une plus grande cohésion et sert l’engagement, voire incite à un changement de modèle managérial », relève Jean-Noël Felli, associé fondateur du groupe Balthazar, spécialisé dans le conseil en innovation et en transformation des entreprises et membre de la Communauté des entreprises à mission.

« L’adoption d’une raison d’être, puis d’une mission, assortie d’objectifs mesurables et mesurés par un comité de suivi, s’inscrit souvent dans une philosophie déjà bien ancrée », remarque Anne-France Bonnet, présidente de Nuova Vista, un cabinet de conseil en engagement sociétal, devenu société à mission dès février 2020, et co-initiatrice de la Communauté des entreprises à mission. Une philosophie qui fait la part belle à la concertation, au management bienveillant, à l’autonomie des collaborateurs. Difficile, donc, de plaquer une raison d’être ou une mission sur une culture peu porteuse et espérer de meilleurs résultats en matière d’attractivité, d’engagement, de turnover… Sur un terrain fertile, en revanche, la mission renforce ces points forts. « Sur nos 250 salariés, 40 se sont portés volontaires pour définir la raison d’être puis la décliner en mission. Ils ont pu ainsi exprimer leurs propres ambitions pour l’entreprise. Et cela a créé un engagement plus intense qu’avant », confirme Nicolas Furet, secrétaire général de Citeo, le spécialiste du recyclage des emballages ménagers, à mission depuis novembre 2020.

Attractivité

Chez Alenvi, une société spécialisée dans l’accompagnement des personnes âgées, le business modèle originel, visant à réhumaniser la relation entre auxiliaires de vie et personnes âgées, séduisait déjà les candidats qui partageaient ces valeurs avant l’adoption d’une mission, en septembre 2020. « Exposer notre mission et la façon dont elle sera mise en œuvre peut effectivement attirer les talents, les fidéliser et favoriser le dialogue social. Les salariés, qui savent ainsi dans quel cadre ils vont travailler, sont rassurés », estime Clément Saint Olive, cofondateur de la société. Même intuition chez Charles Dufourcq, directeur général de Palo-IT, une société de conseil en innovation et transformation digitale créée en 2009 avec une philosophie d’open source. Il n’a pas encore mesuré l’impact RH depuis l’adoption officielle, en octobre dernier, d’une mission, mais ses recruteurs lui rapportent déjà des cas de talents qui s’intéressent à Palo-IT précisément pour cette raison. Et si, depuis sa relance en 2009, sur des principes de responsabilité environnementale et territoriale, la Camif attirait déjà elle aussi, et encore plus après la décision de son PDG, Emery Jacquillat, de cesser de participer au Black Friday dès 2017 : « Il est clair que l’adoption d’une mission nous a permis de recruter davantage de nouveaux talents, d’autant que nos activités ont connu une forte croissance ces derniers mois, et de rajeunir nos effectifs », explique-t-il. Citeo a fait encore mieux : « La société a réussi à recruter des diplômés dont les études en école de commerce menaient plutôt vers de grands cabinets de conseil. Séduits par la culture et la mission de l’entreprise, ils ont accepté un salaire plus faible », indique Nicolas Furet.

En matière de rétention des talents, Charles Dufourcq note que le turnover a baissé chez Palo-IT. Mais il a du mal à faire la différence entre mission et crise économique actuelle, cette dernière incitant les collaborateurs à rester en poste. Emery Jacquillat est, en tout cas, convaincu que la mission a aussi un impact positif sur la fidélité des salariés. « Si certains jeunes, dont des alternants, partent de la Camif, c’est dans l’ordre des choses, note-t-il. Les autres, heureux à Niort, restent – à part quelques managers, nouvellement arrivés et qui ont eu du mal à se faire à notre mode de fonctionnement… » Un fonctionnement à base d’autonomie des collaborateurs, d’initiatives de leur part et de décisions collégiales. Charles Dufourcq a noté, également, un effet immédiat de la mission sur… les responsables RH. « Alors que certains souffraient de se voir considérer, surtout en matière de placement dans les entreprises clientes, comme des marchands de viande fraîche, la mission – et les contraintes qu’elle implique – apporte un équilibre dans la gestion des talents et une fierté renouvelée chez les responsables RH », se félicite-t-il. Autant dire que lorsqu’il s’agit de mission, tout le monde est embarqué…

Auteur

  • Lys Zohin