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« On peut regretter que les accords ne prévoient pas de stratégies plus ambitieuses »

Le point sur | publié le : 04.02.2021 | Benjamin d’Alguerre

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« On peut regretter que les accords ne prévoient pas de stratégies plus ambitieuses »

Crédit photo Benjamin d’Alguerre

On reproche aux accords APLD d’être peu ambitieux jusqu’à présent. Est-ce la réalité ?

Luc Bérard de Malavas : L’ambition des accords APLD consiste d’abord à éviter des licenciements de salariés et à permettre aux entreprises de conserver leurs compétences. Et les accords de branche permettent la mise en œuvre de l’activité partielle de longue durée dans les PME et TPE… où l’on ne trouve pas forcément d’interlocuteurs pour le négocier. Le premier objectif fixé à l’APLD reste la prévention des licenciements avant toute chose et, pour un certain nombre d’entreprises, elle constitue la seule alternative au PSE. Souvent, il ne s’agit pas vraiment de négociation au sens traditionnel du terme. Les marges sont plus réduites. Mais on peut regretter que les accords d’APLD ne prévoient pas davantage une stratégie ambitieuse, un diagnostic économique partagé et un effort de formation.

Ces accords ont-ils atteint leur but ?

L.B.d.M. : Globalement, oui. Rappelons que le législateur fixe, au-delà de la détermination des salariés concernés, de l’ampleur et de la durée de la réduction d’activité, trois sujets de négociation obligatoire dans ces accords : le maintien de l’emploi, la formation et l’information des syndicats signataires ou des CSE sur le suivi des accords.

Concernant le maintien dans l’emploi, le pari est plutôt réussi. La plupart des accords contiennent d’importants volets « défensifs » sur la préservation de l’emploi. En revanche, la formation et l’information des représentants du personnel sont généralement des éléments négligés. Les volets « compétences » des accords se contentent la plupart du temps de lister quelques généralités de type « l’employeur veillera à… » ou « l’employeur facilitera… », sans objectifs précis. Le décret de mise en place de l’APLD précise également les éléments « facultatifs » que les accords sont susceptibles de comprendre, comme la proportionnalité des efforts demandés aux salariés, aux dirigeants salariés et aux actionnaires de l’entreprise – sur le versement de dividendes, notamment) ; les conditions dans lesquelles les salariés peuvent bénéficier de leurs congés ou de l’usage de leur CPF ou les moyens accordés aux organisations syndicales pour suivre les effets des accords. Par ailleurs, si des entreprises sont contraintes de prévoir dans la même période des APC ou des RCC, il est préférable de traiter les sujets en même temps afin d’apporter une vision globale aux représentants du personnel, car loyauté dans la négociation et confiance vont de pair.

La plupart des accords se contentent de reprendre les dispositions légales. Existe-t-il le risque d’un « moins-disant social » ?

L.B.d.M. : Dans les grandes entreprises habituées à la pratique du dialogue social, a priori non. Dans les PME, on ne peut pas l’exclure. Mais l’enjeu consiste surtout à donner à l’APLD toute sa dimension. Trop d’accords se contentent de reprendre la loi de manière stricte. Ainsi, les accords pourraient davantage mettre l’accent sur le partage des questions économiques, la formation du personnel et l’organisation du travail. Les modalités de mise en œuvre de l’APLD sur le plan organisationnel sont souvent peu développées. Et cela peut avoir des incidences défavorables tant pour les conditions de travail que sur le plan opérationnel.

La négociation est asymétrique, d’autant que la peur du chômage est présente chez un certain nombre de salariés. Les diagnostics économiques et sociaux sur la situation de l’entreprise, préalables à l’entrée en négociation, sont trop souvent négligés. Or, c’est un élément capital de la loyauté de la négociation. Faute d’information suffisante, les négociateurs salariés peuvent n’avoir qu’une information parcellaire ou tronquée de la situation véritable, offrant à la direction le pouvoir de décider seule. Le risque de moins-disant social est là.

Auteur

  • Benjamin d’Alguerre